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Où sont passés les marchés contractés par B&RC avec Sonatrach?

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  • Où sont passés les marchés contractés par B&RC avec Sonatrach?

    Dissoute, pas dissoute ? Rachetée, pas rachetée ? Plus de trois ans après l’éclatement du scandale lié aux passations de marchés entre la joint-venture algéro-américaine B&RC (Brown & Root-Condor, filiale de KRB, elle-même filiale du géant pétrolier américain Halliburton), et la compagnie Sonatrach ainsi que le ministère de la Défense, l’énigme reste entière.

    Pour comprendre l’affaire, il faut remonter à l’origine du scandale. En février 2006, le chef de gouvernement de l’époque, Ahmed Ouyahia, charge l’Inspection générale des finances (IGF) de mener des investigations sur les marchés passés entre Sonatrach et le MDN avec B&RC.

    Les investigations se concentrent sur 41 contrats, 27 pour la compagnie nationale, et 14 au profit du MDN. Après plusieurs mois d’enquête, l’IGF remet son rapport dans le courant du mois de juillet. Dans ce document d’une cinquantaine de pages, les inspecteurs pointent du doigt de graves irrégularités concernant la passation de ces marchés de gré à gré pour un montant global de 2, 8 milliards de dollars. Les premières révélations fuitent en octobre 2006 lorsque El Khabar et El Watan font état de l’existence de ce rapport de l’IGF.

    Interrogé peu de temps après la divulgation de ces informations, le ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, botte en touche une première fois en refusant de répondre aux questions des journalistes. Invité de l’émission de la Chaîne III « En toute franchise » le dimanche 25 novembre 2006, M. Khelil adopte la posture de celui qui ignore tout. « Je n’ai pas été convoqué par la police, s’offusque-t-il. Je n’ai pas eu connaissance du rapport de l’IGF, ni d’ailleurs le PDG de Sonatrach. Je ne suis donc pas au courant du rapport de l’IGF. » Alors ce fameux rapport, une pure invention de reporters en mal de scoops ? C’en est presque vrai à entendre les arguments du ministre de l’Energie, qui fut également directeur de Sonatrach entre 2001 et 2003.

    Ce même responsable ne départira pas de sa position initiale, samedi 24 février 2007, lorsqu’une journaliste de la Télévision algérienne le questionne sur cette affaire au cours de l’émission « Forum de l’ENTV ». Le rapport de l’IGF ? « Les seules informations que j’ai sont celles publiées, avec ma photo dans Jeune Afrique l’Intelligent. Tout le monde semble informé sauf moi », affirme M. Khelil. Voilà qui est très clair. Le ministre de l’Energie et des Mines ne sait rien, ne connaît rien, ignore tout du scandale mis à part le peu de choses qui a filtré dans la presse. Mais voilà. Lundi 5 mars 2007, M. Khelil se déjuge au cours du petit-déjeuner organisé par le quotidien arabophone El Khabar dont il était l’invité. Au détour d’une question sur l’affaire B&RC, M. Khelil annonce que Sonatrach souhaite racheter la totalité du capital de B&RC.

    Des questions s’imposent : comment peut-on plaider l’ignorance du dossier le 24 février et affirmer le 5 mars, soit un intervalle de dix jours, que la compagnie pétrolière nationale envisage l’acquisition de la totalité des parts (49%) détenues par B&RC dans cette joint-venture ? Si en date du 24 février 2007, M. Khelil ignorait tout du dossier, comme il ne cesse de le prétendre, il ne pouvait donc raisonnablement engager une opération de rachat des parts de B&RC au profit de Sonatrach en un laps de temps aussi court sans éveiller des soupçons. Compte tenu du statut de B&RC, de l’ampleur des marchés qu’elle a obtenus, de l’importance de ses partenaires (Sonatrach et le MDN), une éventuelle acquisition nécessiterait des mois et des mois de pourparlers…

    Ces interrogations appellent d’autres. Pourquoi l’empressement des dirigeants de Sonatrach à racheter les parts de B&RC, alors que celle-ci fait déjà l’objet d’une enquête de la part de l’IGF ? Qui a pris l’initiative d’une telle acquisition ? La direction de Sonatrach ? Le ministre de l’Energie ? La Présidence ? Alors que les investigations de l’IGF devaient normalement aboutir à l’ouverture d’une instruction judiciaire pour faire la lumière sur ce scandale, voilà que Sonatrach et les dirigeants de KBR (maison mère de B&RC) entreprennent, dans une opacité totale, des négociations pour la vente-rachat des parts de B&RC. C’est ainsi que le 5 mai 2007, M. Khelil fait état d’un début d’accord entre Algériens et Américains à propos de cette transaction : « Je crois qu’on a un accord sur un chiffre de vente », dit-il.

    Le deal est enfin scellé durant l’été. Mardi 7 août 2007, les dirigeants de KBR annoncent avoir cédé les parts de B&RC à la firme algérienne pour un montant de 24 millions de dollars payés en dinars.

    La décision de cession a été dûment enregistrée à la Securities and Exchange Commission (SEC) à Washington. Cette revente aura permis à KBR d’empocher un bénéfice de 18 millions de dollars avant impôt. Il n’y a pas de petits profits. Non seulement les Américains (via B&RC) ont obtenu 41 marchés, bien sûr en association avec Sonatrach, pour la coquette somme de 2,8 milliards de dollars, mais ils se voient gratifiés d’un « bonus » de 24 millions de dollars. Chapitre clos. Que deviennent les marchés contractés par B&RC avec Sonatrach et le MDN ? Où en sont les investigations de l’IGF ? Le rachat des parts de B&RC par Sonatrach ne constitue-t-il pas une tentative de faire disparaître l’objet du délit ?

    Par Samy Ousi-Ali, El Watan
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