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Si M’hamed Ben Rahal, le mentor de la nouvelle élite ‘’Jeune-Algérien’’.

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  • Si M’hamed Ben Rahal, le mentor de la nouvelle élite ‘’Jeune-Algérien’’.

    Un combat en faveur de l’instruction et du progrès.
    M’hamed Ben Rahal (1856-1928) est une figure marquante de l’histoire politique de l’Algérie du début du 20ième siècle. Natif de Nédroma, il fut le premier algérien à être reçu à l’examen du baccalauréat. Cette grande figure archétypale haute en couleur occupera pendant 40 ans la scène politico-culturelle en Algérie. Il a pendant ce temps joué un rôle important dans les domaines du réformisme, de la défense de l’Islam, des Musulmans et des Arabes d’une manière générale. Il demandera l’entrée en vigueur de l’arabe dans l’enseignement des écoles. Partisan de l’enseignement des filles, parlant le français avec une pure correction et une sobre élégance, il a consacré sa grande culture et sa notoriété à défendre par la parole et l'écrit les droits civiques, politiques et culturels des Algériens auprès des plus hautes instances des autorités coloniales. Figure musulmane de premier plan, ses discours étaient particulièrement remarquables par leur haute tenue littéraire ; ils exprimaient souvent par des sentiments les plus élevés, l’idée que le relèvement de la race arabe était prochain et il comptait pour qu’il se produise sur ‘’Dieu qui n’abandonne jamais ses créatures sur le bon droit’’ disait-il avec toute la finesse subtile et diplomatique de son langage. Il affirmait sa foi à une renaissance inéluctable du monde musulman. Il jouissait dans la société de son époque d’une haute considération due à ses lumières, à son caractère et à ses engagements. Il fut avec Docteur Ben Larbi d’Alger et Docteur Morsly de Constantine un véritable mentor pour la nouvelle élite dite ‘’Jeune–Algérien’’. La dynamique historique particulière de la renaissance née du mouvement les ‘’Jeunes Algériens‘’ est une phase politique alternative, après l’échec de la lutte armée mobilisant le peuple sous la bannière de l’émir Abdelkader et des chefs religieux à la tête des insurrections populaires, elle constitue la phase au cours de laquelle sont nés les discours politiques de la nouvelle élite ‘’Jeune Algérien’’. Si M’hamed Ben Rahal, intellectuel et homme politique a exercé un ascendant sur toute la jeunesse évoluée de l’époque contribuant ainsi énormément à tracer la voie à la lutte politique pour la reconnaissance des droits et l’affirmation de l’identité. Le discours de M’hamed Ben Rahal est au cœur de l’actualité coloniale qui, au début du 20ième siècle, allait connaître des proportions considérables étouffant la société autochtone soumise au code de l’indigénat. A propos de ce personnage haut en couleur, Messali Hadj écrit dans ses mémoires : ‘’…Il y avait en lice d’autres personnalités qui jouissaient elles aussi, d’un grand prestige dans notre cité. L’une d’elles, Si M’hamed Ben Rahal, mérite une attention particulière. Cet homme qui avait alors environ soixante ans était chef d’une grande famille très connue en Algérie et au Maroc. Grand, sympathique, de vaste culture arabe et française, il avait la prestance d’un véritable chef arabe et passait aux yeux de tous pour un savant et un grand patriote’’.
    Né en 1858, à Nedroma, fils de Hamza, notable et cadi de cette même ville, nommé par l'Emir Abdelkader et confirmé par les autorités coloniales, Si M'hamed Ben Rahal est bachelier en 1874. Participant au congrès des orientalistes, à Paris, en 1989, il a donné conférence dans laquelle il déclarait que : ‘’Ce qui sépare la société musulmane aujourd’hui, c’est sa profonde ignorance. Non seulement l’ignorance des arts et des sciences actuels, mais encore et autant de chose de sa religion… C’est aussi tout ce qui vient de l’étranger est l’objet d’une méfiance injustifiée, de prohibition irréfléchies et de controverses telles que Byzance ne les désavouerait pas’’. Il est entendu, en 1891, avec Dr Ben Larbi, par la commission sénatoriale des «dix-huit» présidée par Jules Ferry, le père de l'école publique française, venu enquêter en Algérie, et auquel il dénonça l'arbitraire du régime d'indigénat, réclame des réformes fiscales, la généralisation de l'enseignement public et le droit à la représentativité politique des Algériens au sein du parlement. En 1897, il participe aux travaux du congrès des orientalistes, à Paris, sous la présidence de Rambaud, ministre de l’instruction publique, représentant la société de géographie et d’archéologie d’Oran avec Gaudfroy Demombynes, secrétaire de la section Islam. Il disait lors de ce congrès : ‘’Nous avons un passé trop grand, une histoire trop glorieuse, une religion à laquelle nous sommes trop attachés pour pouvoir renoncer à tout cela. Nous y tenons, comme vous y tenez, vous français, à ce qui fait la grandeur et le renom de la France’’. Si M’hamed Ben Rahal dont le combat politique a participé à une première forme de prise de conscience, a ouvert la voie aux premières revendications sur ‘’l’Islam et la langue arabe comme enracinement identitaire et le savoir comme ouverture à la modernité’’. Sur la religion, Si M’hamed Ben Rahal avait une image fondée sur une tradition islamique purifiée ; il disait : ‘’l’avenir de l’Islam dépend des trois conditions principales : La valeur intrinsèque, la valeur de ses adeptes et la politique des états musulmans’’. Pour ce dernier qui passait pour un sage, la démarche envers le progrès était de trouver au cœur de la tradition l’inspiration de la modernité. Ce combat devait surmonter d’extrêmes obstacles psychologiques, politiques pour libérer la parole et décoloniser le langage. Il était considéré dans les milieux coloniaux comme un sage soucieux d’équilibre et de mesure, appelé le ‘’Prince arabe‘’ favorable à une modernité endogène plutôt qu’à une occidentalisation aliénante. L’univers occidental qui se projetait à travers cette modernité était, à ce moment précis, certes pris avec beaucoup de réserves par cette personnalité politique qui préférait plutôt plaider pour un Islam capable d’affronter tous les défis d’une renaissance.
    M’hamed Ben Rahal était membre fondateur, en 1903, de l’association à vocation culturelle et philanthropique ‘’Rachidiya’’ d’Alger, présidée par Sarrouy, et président d’honneur de l’‘’Association culturelle musulmane’’, créée en 1909, présidée par Hadj Djilali Bendi Slimane. Il était également président d’honneur de l’association ’’Jeunesse littéraire musulmane’’ de Tlemcen, fondée, en 1916, par un groupe de jeunes médersiens dont Abdelkader Mahdad (1896-1994), homme de lettres et de la politique. La promotion des Jeunes issus des écoles de la colonisation en France et ailleurs, dans les pays musulmans, allait opérer un véritable basculement avec l’émergence de nouveaux courants de pensée. Si M’hamed Ben Rahal était correspondant de la Revue asiatique et membre de la société de géographie et d’archéologie d’Oran. Il est par ailleurs, l’auteur de nombreuses études dont: Le Soudan au XVIème siècle (1887), A travers les Bani Znassen (1889)... Il faut noter que M'hamed Ben Rahal est le premier à avoir écrit en 1891, une nouvelle en langue française intitulée «La vengeance du Cheikh». Si M'hamed Ben Rahal est un véritable précurseur de l'éveil national et un éminent écrivain contre le colonialisme, il était un homme de culture et de science et l'un des pionniers de la pensée algérienne qui a utilisé sa plume au service de l'identité culturelle algérienne. Ce sursaut national est la conséquence de la situation chaotique du pays du fait de la conquête couvant toujours d’une révolution. Les facteurs favorisant cette émergence en mode ‘’éveil-instruction-revendication‘‘ étaient jugées comme primordiaux à toute renaissance cela, sous l’influence des mutations politiques enregistrées en Turquie, en Egypte. Au contact avec l’Europe enfin, le courant identitaire des ‘’Renaissants-mahdistes’’ l’effervescence a accusé un certain dynamisme favorisant les étapes superposées qui vont plus tard prôner le nationalisme. Abordant les problèmes d’une manière concrète la colonisation n’était plus, pour eux, considérée comme une fatalité. L’élite nouvelle a ainsi adopté des attitudes favorables à des changements marquant aussitôt des ruptures allant vers l’idéal recherché faisant le choix d’une évolution-libération. L’apprentissage de la langue de l’occupant allait de soi, comme une arme pour rompre radicalement avec la solitude et pour mieux se défendre. La communication était devenue, face aux colons étrangers, un véritable exercice de saut d’obstacles et c’est dans ces conditions que l’enseignement de la langue française a commencé à prendre pied en Algérie au début d’une colonisation piégeuse dans un pays où l’Algérien avait un statut d’exclu. Son militantisme en faveur de l'enseignement pour les garçons et les filles et de la promotion de la langue arabe ont été marqués également par sa lutte contre la responsabilité collective imposée aux Algériens et son rejet au projet de destruction de la grande mosquée d'Alger.
    A Tlemcen, ville à majorité musulmane, Ben Ali Fekar était influencé par le combat politique et l’attitude digne et fière de Si M’hamed Ben Rahal Nédromi. Il dira sa dette envers lui mettant en valeur son rôle politique en faveur d’une modernisation soucieuse du passé et de la personnalité arabe, de l’Algérie. Si M’hamed Ben Rahal et Bénali Fekar seront unis par la même pensée, dans une même stratégie politico-intellectuelle. Ils entendent ainsi parler, tous les deux, de justice et d’entente avec l’idée d’un rapprochement dans le sens d’un équilibre humain en supprimant les frontières entre les deux sociétés, arabe et française. Pour Bénali Fekar, il n’y a, pour la France, de paix, ni d’avenir imaginable sans l’effort d’instaurer le droit et la justice. C’était là une attitude transcendante pour les libertés et l’approfondissement de la conscience. L’idéal politique de son frère Larbi est aussi au cœur de cette dialectique et cela, en mobilisant cet absent colonisé au nom de l’humanité. Il combat les préjugés sociaux et les habitudes de culture périmée. Il cherchera à unir et non à unifier, en respectant la diversité. Il était pour le parti de l’Algérie, une Algérie consciente, unie dans sa complexité et sa culture et cela, en évacuant toutes les tensions provoquées par, l’effet de choc de la colonisation.
    Ce « Prince arabe », tel désigné dans les milieux coloniaux, en raison de sa forte personnalité, délégué général, qui exigea très tôt, l’introduction de l’enseignement de l’arabe dans les écoles et l’instruction de la femme. Dans son oraison, à la mort de cette forte personnalité politique et intellectuelle, originaire de Nedroma, Moqaddem des Darkaoua, ayant terminé sa vie en ascète, recherchant la pauvreté, Larbi Fekar disait ‘’Si M’hamed Ben Rahal était une remarquable érudition tant dans les lettres arabes que dans la langue de Voltaire, c’était un homme possédant de vastes connaissances auquel tout le monde se plaisait à rendre hommage. D’une distinction rare et d’une parfaite modestie naturelle, Si M’hammed Ben Rahal n’a jamais eu qu’une pensée : le bien-être de ses coreligionnaires, idée noble entre toutes qui a fait et fera toujours l’objet des préoccupations personnelles de l’humble et admirateur du grand élu, qui vient de disparaître’’. Grâce au rôle et à l’action de ses personnalités savantes, Tlemcen en tant que vieux centre culturel et religieux s’était érigée en véritable citadelle en résistant à la fois dans sa culture demeurée vivante, s’imposant dans la lutte politique. M’hamed Ben Rahal (1856-1928) restera cette figure marquante de l’histoire politique de l’Algérie du début du 20ième siècle. C. R. Ageron disait à son sujet : ‘’Leur porte parole le plus talentueux fut sans doute Mohamed Ben Rahal, parfaitement bilingue et lettré de double culture. Il sut toujours trouver, pour dépeindre une situation, les plus justes notations. Qu’on lisse par exemple ce qu’il écrivait sur le « libéralisme un peu vague et surtout platonique du Français de France, suffisant cependant pour entretenir l’espérance des Musulmans et leur permettre de garder foi en des jours meilleurs’’. Si M'haled Ben Rahal est un sage et sa mémoire mérite d'être conservée. (Extrait de ma thèse de doctorat intitulée "Les Jeunes Algériens Procédés et engagement Analyse du discours politique de Si M'hamed Ben Rahal et Si Ben Ali Fekar (en sciences du langage) soutenue en 2018).
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