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Histoire de l'Algérie médiévale - le 10e siècle après. J.-C.

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  • #46
    B. Qu'en est-il de situation religieuse chez-nous ?

    Le 10e siècle apr. J.-C. est l'époque où les Musulmans deviennent majoritaires dans tous les pays de l'Empire issu des conquêtes arabes des deux siècles précédents. Cela s'inscrit d'ailleurs dans la dynamique globale d'intégration économique et culturelle de cet éspace arabo-islamique et qui, comme nous venons de le dire plus haut, atteint à ce moment sa forme définitive.

    Mais, comme nous l'avons vu dans le topic dédié au 9e siècle, les sources laissent croire que le mouvement de conversion à l'Islam a été nettement plus rapide au Maghreb, et il se pourrait donc que ce basculement d'une minorité dominante vers une majorité de la population pour les musulmans avait déjà eu lieu deux ou trois générations avant l'an 900 pour ce qui nous concerne. La sitution des anciennes communautés chrétiennes au cours de cette période n'a donc fait que poursuivre l'évolution entamée au siècle précédent, marchant doucement mais sûrement vers une disparition qui s'annonce désormais proche.

    En fait, ce qui distingue totalement ce 10e siècle de celui qui le précède sur le plan religieux chez-nous, c'est les interactions à l'intérieur même de l'Islam : l'apparition sur la scène du Shīisme Ismaélien, alors que la période précédente fut exclusivement marquée par le Sunnisme mālikite et le Kharrijisme ibādite. De plus, ces deux dérniers éléments avaient évolué chez-nous dans deux éspaces politiques séparés au cours du 9e siècle, c'est-à-dire sous l'Etat Aghlabide pour le Mālikisme et sous l'Etat Rustomide pour l'Ibādisme et, du coup, la prise du pouvoir au tout début de ce 10e siècle par les Fatimides va tout compliquer puisque, en plus de rajouter un 3e élément à l'équation, elle va imposer aux deux éléments les plus anciens de devoir vivre sous un pouvoir politique qu'ils considèraient comme hérétique (voir pas "musulman" tout court) et qui, pour sa part, verra en eux des ennemis tapis et naturellement enclins à l'abattre ou à pactiser avec ses ennemis Omeyyades ou Abassides.

    On peu facilement imaginer l'impacte d'une telle situation sur la société de l'époque, et c'est pour cela qu'on va lui consacrer un peu d'espace, d'abord à chacun des groupes cités pour se faire une idée sur leur état d'évolution à cette époque précise, mais aussi à la relation des deux groupes désormais dominés avec le pouvoir ismaélien, Fatimide puis Zirīde, afin de se faire une idée sur les interactions qui avaient cours et leur impacte sur la suite de notre Histoire. C'est compliqué, mais malheureusement inevitable pour une bonne compréhension de l'ensemble. On essaiera donc de faire le plus court possible ... lol

    ... /...
    Dernière modification par Harrachi78, 05 décembre 2022, 12h53.
    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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    • #47
      a) Le Sunnisme :

      Nous avons vu au siècle précedent comment s'était constitué le Droit islamique commun, qu'on appelle Sunnite, sous l'impulsion de dizaines de juristes à travers l'Empire. Parmi ces nombreux pionniers, les cercles d'elèves de certains d'entre eux vont être particulièrement actifs et, à la fin du 9e siècle, les ulémas vont finir par se regrouper en réseaux autour de quatre noms qui deviendront éponymes des quatre Écoles (madhāhib) juridiques de Ahl a-Sunna wa l-Jamā3a : Abū-Hanīfa (m. 765), Mālik (m. 795), a-Shāfi3i (m. 820) et Ibn Hanbal (m. 855). Peu après, le corpus des de la Tradition prophétique (Hadith), une des quatre sources (uçul) de légiferation chez les Sunnites, est définitivement fixé grâce aux travaux d'al-Bukhāri (m. 870) et de Muslim (m. 875).

      Au Maghreb, y compris en Andalus, après le précurseur que fut Asad b. al-Furāt (m. 828), c'est l'école de Mālik qui s'impose définitivement dans les années 840, du temps de l'imām Sahnūn (m. 855) dont l'œuvre principale (al-Mudawwana) était déjà la deuxième référence majeure du droit mālikite, après al-Muwatta' composé par l'imām Mālik près d'un siècle plus tôt. Qayrawān était alors le principal centre de constitution et de rayonnement du Mālikisme dans le monde islamique, drainant particulièrement des générations entières de juristes qui venaient s'y former de toutes les villes du Maghreb de l'époque.


      b) Le Kharrijisme :

      Nous avions vu comment les premiers missionnaires Kharrijites ont introduit cette doctrine parmi de nombreuses tribus Berbères du Maghreb à partir des années 720, particulièrement les Ibādites comme Salama b. Sa3d, suivi par les fameux "Cinq Porteurs du Savoir" parmi lesquels se trouvait Abderrahmān b. Rustom.

      Après de grands troubles politiques, ce dérnier, finit par fonder le premier Etat kharrijite de l'histoire en 736, et certains de ses sucesseurs furent eux-mêmes parmi les plus grands juristes ibādites au 9e siècle. Tāhert devient alors le principal centre de développement et d'enseignement du droit ibādite dans le monde Islamique, drainant à son tour les étudiants de toutes les communautés ibādites, depuis celles de Libye jusqu'à celles d'Irak et d'Oman.


      c) Le Shiīsme :

      Nous avons abordé de manière assez détaillée dans le précèdent topic l'origine du Shiīsme de manière générale, et ensuite son évolution jusqu'à la mort du 6e imām, Ja3far a-Sādiq en 765, qui vit la scission du mouvement entre une majorité dite Imamite et une minorité dite Ismaélienne dont les adeptes vont littéralement disparaître dans la clandéstinité après la mort de leur 7e imām, Muhammad b. Ismā3il, en 795.

      Les Imamites vont suivre leur propre lignée d'imāms, jusqu'à ce que le 12e, Mohamed al-Mahdi qui etait un enfant, disparait mystérieusement en 874. On annonça alors qu'il était jusye caché (ghayba çughrā) et qu'il continuait à communiquer avec ses fidèles par le biais d'une lignée d'agents attitrés. Mais, en 941, le dérnier de ces agents annonce que l'imām était entré en "Occultation majeure" (ghayba kubrā) et qu'il n'y avait plus de contact possible avec lui, jusqu'à son retour attendu pour la fin des temps. Entre temps, comme nous l'avons vu au tout début de ce topic, Ubaydallāh, l'imām de la lignée ismaélienne qui étaient cachés depuis environ un siècle, se dévoile en 903 et annonce être le véritable Mahdi de la lignée Alide.

      Au Maghreb, avant l'arrivée du dā3i Abū-Abdallāh chez les Kutāma dans les années 880, le Shiīsme de manière générale était peu répandu au Maghreb, si ce n'est sous forme d'une vague vénération aux Alides, comme ce fut le cas pour les Idrissides qui fonde un État au Maghreb Extrême deux ou trois décennies après celui des Rustomides au Maghreb Central, c'est-à-dire à une époque où le Shiīsme imāmite se structurait en Orient au tour de ses 12 imāms et que les Ismaéliens se terraient dans le secret, sachant que les Idrissides sont des déscendants d'al-Hassan b. Ali alors que le Shiīsme classique, qu'il soit Imāmite ou Ismaélien, considèraient que l'imāmat légitime courait exclusivement dans la lignée d'al-Hussayn b. Ali, frère cadet d'al-Hassan.

      Donc, la première véritable communauté shiīte au Maghreb est celle fondée chez les Kutāma par le missionnaire ismaélien Abū-Abdallāh a-Shīi dans la dernière décennie du 9e siècle, et qu'on a vu fonder l'Etat Fatimide au tout début de ce 10e siècle, et c'est ainsi que vont se rencontrer les trois courants historiques de l'Islam dans notre histoire ... et toutes ne vont pas y survivre au final ...

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      Dernière modification par Harrachi78, 06 décembre 2022, 21h00.
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      • #48
        d) Cohabitation avec les Califes Fatimides (910-972) :

        Après l'intronisation officielle de Ubaydallāh al-Mahdi en 910, la politique religieuse des Fatimide est agressive. La base doctrinale du Shiisme étant la reconnaissance du rôle divin de l'imām, ce point fut le premier point d'affrontement avec les Sunnites dont la doctrine sur le califat était totalement différente. Se rallier au nouveau régime passait donc nécessairement par la conversion au Shīisme. Or, si la da3wa ismaélienne fonctionna à merveille chez les frustes Kutāma, il en était tout autrement dans les milieux Sunnites des villes, et particulièrement à Qayrawān qui était une des grandes métropoles de l'Islam à l'époque. Ainsi, en dehors de certains aristocrates de l'ancien régime et de grands bourgeois qui se rallièrent au Shiisme pour maintenir leurs positions et privilèges, la masse Sunnite resta farouchement hermétique à la da3wa ismaélienne. Au contraire la communauté renforça sa doctrine autour des ulémas Mālikites qui menaient la controverse contre ce qu'il appelaient avec dédain dans leurs écrits al-Mashāriqa (les Orientaux).

        Face à cette résistance, al-Mahdi et son sucesseur al-Qā'im osent la persécution. Les premières victimes furent deux grands ulémas de Qayrawān, Ibrahim b. Badhrūn et Sahl b. Hudhayl, réputés pour leur verve hostile aux doctrines shiītes, qui sont flagéllés puis exécutés. D'autres suivront, tandis que les juristes mālikites furent partout bannis ou interdits d'enseignement, et que les postes de juges (qādi) étaient désormais confiés à des hommes engagés dans la da3wa ismaélienne, sous la protection de garnisons de Kutāma. En 921, al-Mahdi s'établit dans la nouvelle capitale-forteresse de Mahdiyya car il ne se sentait pas en sécurité à Raqqāda, trop proche de l'hostilité Sunnite à Qayrawān. Le régime Fatimide traitait alors la population Sunnite dans les villes en communautés conquises, leur imposant une fiscalité de plus en plus lourde en guise de punition, mais les soumettant surtout à d'insupportables usages devenus typiques du Shīisme à cette époque, comme l'insulte publique des Compagnons du Prophpète, la modification de l'appel à la prière, l'interdiction des tarāwīh durant le Ramadhan ... etc.

        Cette politique demeura en vigueur sous les deux premiers califes, jusqu'à ce que révolte Kharrijite d'Abū-Yazīd éclate en 944, et que le régime se retrouve face à la perspective d'une destruction pure et simple. Nous avons vu que les populations s'étaient d'abord ralliées aux rebelles dans la perspective de se débarrasser du pouvoir shiīte, avant de se désolidariser avec eux suites aux exactions que leur ont firent subir les nouveaux maîtres Ibādites. Lorsque al-Mançūr, le troisième calife Fatimide, va enfin se débarrasser d'Abū-Yazīd en 948, les années de guerre sans merci autant détruit toutes forces Kharrijites au Maghreb. Nous avions vu que, déjà après la prise de Tāhert par les Kutāma et la destruction de l'Etat Rustomide en 909, une bonne partie des tribus Ibādites quittent l'O. algérien et se retirent vers Warjilān (Ourgla). La défaite d'Abū-Yazīd provoquera un nouvel exode, notamment du Hodna algérien et, à partir de cette date, les communautés ibādites vont se refermer définitivement sur elles-mêmes et vivre dans des sortes de petites républiques autonomes sur les marges du Sahara. Ils ne joueront plus jamais de rôle politique au Maghreb.

        D'un autre côté, le calife al-Mançūr eut la sagesse de tirer les bonnes conclusions de la terrible épreuve dont il venait de triompher presque par miracle. Il prit des mesures d'apaisement à l'égard des populations Sunnites, en faisant cesser par exemple les provocations à leur égard et les insultes contre les Compagnons du Prophpète, mais aussi en allégeant le fiscalité qui pesait sur eux et en permettant aux juristes mālikites de reprendre des postes de juges à certains endroits, y compris à Qayrawān. Une espèce d'équilibre s'établit alors entre le pouvoir Ismaélien et la majorité Mālikites, et il va perdurer tout au long du règne d'al-Mançūr et de son sucesseur al-Mu3izz jusqu'à ce que ce dérnier migre vers l'Egypte en 972 et qu'il laisse le pouvoir aux Zirīdes.

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        Dernière modification par Harrachi78, 09 décembre 2022, 19h50.
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        • #49
          e) Cohabitation avec les premiers Zirides (972-1000) :

          Nous avons vu que les Sanhāja du Maghreb-Central se rallient au pouvoir Fatimide dans les années 920. Toutefois, si les chefs de la confédération, comme Zīri ou Bulkīn, sont clairement engagés dans l'allégence à l'Imām ismaélien, les sources ne disent pas de manière claire si l'ensemble de la population sanhājienne fut activement enrôlée dans la doctrine Shiīte ismaélienne comme ce fut le cas pour les Kutāma une quarantaine d'années auparavant, ou si il s'agissait juste d'un lien de bay3a avec l'imām. En tout cas, la place des Kutāma au sein du régime, qui les nommaient officiellement Awliyā' Allāh ("Alliés de Dieu"), n'a pas été modifiée par le ralliement des Sanhāja, même lorsque ces dérniers jouent le rôle qu'on a vu dans le sauvetage du régime en 944-948. Aussi, contrairement aux nombreux notables et dā3i ismaéliens d'origine kutāmienne qui sont mentionnés tout au long des 60 ans que dura la résidence du pouvoir Fatimide au Maghreb, les Sanhāja sont exclusivement cités dans les campagnes militaires et dans les commandements militaires et rien d'autre. Tout porte donc à croire que l'engagement des Zirides dans la cause Fatimide eut toujours une valeur politique plus qu'idéologique, soit bien moins que celui des Kutāma dont l'engagement fut total dans le Shiīsme ismaélien.

          Cette différence de statut va en tout cas se voir après la remise du pouvoir du Maghreb aux Zirīdes en 972. Les premiers émirs restent officiellement fidèles aux imāms Fatimides établis désormais au Caire, mais leur attitude politique est de moins en moins conforme à l'idéal d'obeissance aux imāms comme nous avons vu dès Bulkīn, alors que cet aspect est fondemental au Shiīsme. Aussi, les émirs semblent beaucoup moins chauds à entrer en conflit avec leurs populations et leurs élites Sunnites pour des histoires de doctrine religieuse où, de toute manière, il ne devaient pas piger grand chose

          Ainsi, et bien que le Shiīsme ismaélien demeurait la doctrine officielle de l'Etat Zirīde sous Bulkīn et son sucesseur al-Mançūr, les Sunnites vivaient désormais sous un pouvoir politique beaucoup moins "idéologique" que du temps des califes Fatimides. Cela se traduira par une consolidation définitive des élites Mālikites qui deviennent le visage exclusif de l'Islam Sunnite dans tout le Maghreb (jusqu'à nos jours), en attendant qu'ils parviennent à éliminer littéralement ledit Shiīsme au cours du siècle suivant comme nous le verrons dans un prochain topic.

          Entre-temps, le Sunnisme revit de plus belle chez-nous, et c'est justement durant cette premiere époque Zirīde que vécut Abdallāh b. Abī-Zayd al-Qayrawāni (922-996), grand juriste dont la Risāla va constituer le troisième ouvrage majeur de l'Ecole mālikite, après le Muwattā' et la Mudawwana des imāms Mālik et Sahnūn que nous avions vu au cours des deux siècles précédents. L'autre grand nom de l'école Mālikite à la même époque était Ibn Abī-Zamānīn al-Albīri (936-1008), un natif d'Elvira et qui vécut dans la Cordoue ommeyyade, mais dont la famille était issue d'un clan berbère de Nfzāwa, émigré en Andalus depuis Ténès quelques générations plus tôt.
          Dernière modification par Harrachi78, 09 décembre 2022, 19h31.
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          • #50
            Nous avons vu le rôle central du peuple berbère de Kutāma dans l'avènement de l'Etat fatimide depuis le tout début de ce 10e siècle, et ensuite pendant toute la durée de son existence au Maghreb. Le transfert du califat vers le Caire en 972 marquera une migration massive des Kutāma vers l'Egypte, tandis que leur rôle politique au Maghreb sera définitivement détruit par le 2e émire Zirīde après leur révolte de 988.

            A partir de ce point, la destinée des Kutāma sera liée au Mshriq et ne concerne plus l'Histoire de l'Algérie. Il reste néanmoins intéressant de jeter un rapide coup d'œil sur leur destinée orientale.
            Dernière modification par Harrachi78, 28 décembre 2022, 23h55.
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            • #51
              C. Le destin des Kutāma en Orient :

              a) al-Mu3izz (967-975) :

              L'expédition Fatimide qui va aboutir à la conquête de l'Egypte abasside démarre en 967. Le commandant en chef était Jawhar a-Çiqilli, cet affranchi du Calife d'origine sicilienne que nous avions croisé avec Zīri b. Mannād, et le gros de l'armée était constitué de l'élite des forces kutāmiennes commandées à l'épiqie par Ja3far b. Falāh. L'opération réussit, et Jawhar s'attèle aussitôt à organiser la nouvelle province et à préparer la venue du calife en lançant la construction d'une nouvelle fortresse à côté de l'ancienne capitale de Fustāt, al-Qāhira. Mais, nous avons vu que l'ambition finale des Fatimides depuis leur avènement était de devenir maitres de tout l'Empire de l'Islam, et l'Egypte n'était donc vue que comme une étape de plus sur le chemin de Bagdad.

              Ainsi, en 969, Ja3far b. Falāh prend la tête d'une partie de l'armée Kutāma d'Egypte et se met à la conquête de la Syrie qui était alors sous le pouvoir de deux dynasties princières sous allégeance Abasside. Le général fatimide marché de victoire en victoire jusqu'à la prise de Damas. Il s'applique immédiatement à mettre en place une politique shiite vigoureuse, suscitant l'hostilité violente de la population foncièrement sunnite. Il s'attèle en même temps à relancer le jihād contre les Byzantins qui avaient repris Antioche aux Musulmans quelques années auparavant. Il commet ainsi l'imprudence d'occuper le gros de ses troupes sur le front du N., pendant que les Syriens nouaient une alliance avec les Qarmates, ces extrêmistes Ismaéliens qui avaient jadis refusé de reconnaître l'imamat de Ubaydallāh al-Mahdi au tout début du siècle, et qui avaient fondé leur propre Etat en Arabie orientale. Ils attaquent donc Damas dès 970, et Ja3far trouve la mort dans la bataille avant qu'il ne puisse être secouru par les troupes kutāmiennes revenues à la hâte. Les Qarmates passent immédiatement à l'offensive vers l'Egypte, et ce n'est que difficilement qu'il seront finalement repoussés par Jawhar et ce qui restait de forces Kutāma, commandés cette fois par un certain al-Hassan b. 3ammār.

              Entre temps, le calife al-Mu3izz avait pris la route de l'E., emmenant avec lui une bonne partie de ce qui réstait de Kutāma au Maghreb. L'immense cortège arrive au Caire nouvellement construite début 972. Bizarrement, le fidèle Jawhar est mis sur la touche, même si avec les honneurs, et comme une réitération du système qui était en vigueur au Maghreb, les chefs kūtamiens sont placés dans tous les postes clefs du régime : 3aslūj b. al-Hasan a-Danhāji aux finances, qui restera toute sa vie un des piliers du régime ; la justice fut confiée d'abord à Abdallāh b. Abī-Thawbān al-Kutāmi, mais passe après sa mort l'année suivante à Ali b. a-Nu3mān al-Tamīmi, qui n'est pad de Kutāma mais un des fils du grand juriste ismaélien au Maghreb de la génération précédente. La confiée à deux kutāmiens, Jabr b. al-Qāsim al-Maslāti et 3arūba b. Ibrāhim, le premier étant très proche du calife et dépositaire de son testament. Les gouverneurs des provinces furent presque tous des hommes de Kutāma aussi, comme un certain Hamza qui s'érigea carrément en potentat à Assouan au S. de l'Egypte, ou Aflah b. Nāchib à Barqa (act. Benghazi) en Libye. Ainsi, toute une caste nouvelle d'hommes de pouvoirs issus de Kutāma se met en place et, comme ils étaient tous de fervents ismaéliens et qu'ils se comportaient ostensiblement comme tels, les sources Sunnites orientales appelaient communément ces hommes du régime al-Maghāriba (les "Occidentaux") avec la même charge de mépris que les Sunnites maghrébins appelaient jadis les ismaéliens et les partisans des Fatimides chez-eux al-Mashāriqa (les "Orientaux"). Et là encore, la relation entre les locaux et avec cette communauté de dizaines de mliers de Maghāriba sera jonchée de conflits face à la résistance sunnite aux efforts de conversion au Shīisme, tant en Syrie qu'en Egypte, à tel point. Ainsi, afin de mettre fin aux troubles au Caire par exemple, il qu'il fut décidé par le Calife d'évacuer tous les Kutāma de la Fustāt et de les regrouper dans la nouvelle ville, dans un quartier du Caire qui porte encore leur nom de nos jours : Hārat Kutāma.

              En 974, les Qarmates mènent une nouvelle offensive contre l'Egypte. Ils sont sévèrement battus cette-fous-ci, et le calife charge le kutāmien Ibrāhim b. Ja3far b. Falāh de les poursuivre, venger son père et leur reprendre la Syrie. La mission est accomplie et, parmi les mesures prises, le Fatimide fera déporter en Egypte deux tribus nomades d'Arabie qui s'étaient alliées aux Qarmates, afin de les couper d'eux et éviter une récidive : ce sont les turbulents Bani Hilāl et Bani Sulaym qu'on retrouvera le siècle suivant chez-nous au Maghreb. Pour l'heure, Ibrahim remet la Syrie sous le pouvoir Fatimide, peu avant la mort d'al-Mu3izz en 975.

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              • #52
                b. al-Azīz (975-996) :

                Lorsque le régime Fatimide s'est stabilisé en Egypte, le nouveau calife s'attela à mettre un peu d'équilbre dans le système. Ainsi, pour contre-balancer la puissance des Kutāma, il remit sur pied une partie de l'ancienne élite administrative de l'ancien régime, et surtout il créa un nouveau jund dans l'armée Fatimide qu'il cobstitua de militaires Turcs que les Abassides avaient introduits dans la région le siècle précédent. Dés lors, toute la vie politique en Egypte et en Syrie sera rythmée par la rivalité -souvent violente- entre les Maghāriba soutenus par le jund de Kutāma et les Mashāriqa appuyés par le jund Turc, tandis que la cour Fatimide slalomer entre les deux pour se maintenir au pouvoir.

                Ainsi, dès 975, prenant avantage des relations excerables que les gouverneurs kutāmiens entretenaient avec leurs sujets dans les villes de Syrie, le chef du jund Turc, Aftakīn, organise un coup de force avec l'appui des Qarmates et prend le pouvoir dans le pays. Les Maghrébins reprennent l'initiative en 977, lorsque Ja3far b. Ja3far b. Falāh entre à Damas et occis le chef turc. En 978, il se sent même assez fort pour envoyer une armée contre les Byzantins à Antioche, voulant achever ce que son père n'avait pu finir 8 ans auparavant, mais sans plus de succès au final. A sa mort en 980, c'est Antioche était toujours aux mains des Byzantins, et c'est son neveu Jaysh b. A-Çammāma qui lui succède à Damas. Celui-ci laissera dans les sources sunnite loczles la mémoire d'un tyran sanguinaire, ce qui explique le nouveau coup de force du jund Turc contre lui en 982, mais cette fois avec la complicité des hauts fonctionnaires orientaux au Caire qui voulaient eux aussi se débarrasser de la prépondérance des Maghāriba à la cour. Le complot sera finalement mis en échec par Ibn 3ammār au Caire, mais les Turcs resteront maîtres de la Syrie jusqu'en 995. A ce moment, c'est les Byzantins qui mènent une grande offensive contre la province, et alors que Jaysh b. a-Çammāma mène une armée de secours kutāmienne, il en profite pour reprendre pied dans le pays et s'établit à Tripoli au Liban.


                Cette peinture de l'époque illustre les deux ailes du système militaire fatimide (à droite un soldat kutāmien, à gauche un militaire turc) :



                En somme, en cette fin du 10e siècle, le parti des "Maghrébins" gardait encore la haute main sur le pouvoir au sommet du régime Fatimide tant en Egypte qu'en Syrie, alors que leurs frères Kutāma restés au Maghreb sont définitivement défaits et réduits par les Zirīdes et les Sanhāja en 988 comme nous avions vu plus haut. Ainsi, c'est le chef des Kutāma al-Hassan b. 3ammār et le Cadi suprême Muhammad b. Nu3mān (un autre fils du juriste maghrébin qui avait succédé à son frère au poste) que le calife al-Azīz fit appel sur sont lit de mort, en 996, afin de divulguer l'identité de son successeur et les prier de le soutenir et assurer son accession au trône, car il savait que c'est de leur nonne grâce que cela dépendait.

                La suite des événements releve des deux siècles suivants et n'a donc pas sa place dans ce topic, d'autant que ça ne fait pas partie de l'histoire de l'Algérie proprement dite. On dira seulement que ce jeu de bascule entre Maghāriba et Mashāriqa va se poursuivre ainsi au fil des décennies, tant en Egypte qu'en Syrie, jusqu'à à ce que les Kutāma perdent progressivement la main sur le pouvoir après 1080. Il garderont tout de même une certaine identité de groupe, notamment parcequ'ils étaient ismaéliens contrairement au reste de la population restée sunnite, et un corps de jund Kutāma existera toujours au sein du régime Fatimide jusqu'à sa dissolution finale par Saladin ... en 1171.

                [Fin]
                Dernière modification par Harrachi78, 29 décembre 2022, 10h44.
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                • #53
                  Comme à l'accoutumée, on va clore ce topic avec un coup d'œil rapide sur l'évolution des choses dans d'autres pays et d'autres régions du monde au cours de ce même siècle, afin de garder une vue sur le contexte global du temps.

                  Dans l'ensemble, la situation politique en Méditerranée vers l'an 980 se présentait ainsi :



                  A ce moment, l'État Fatimide s'était étendu vers l'E., le siège du Califat étant désormais au Caire tandis que les Émirs Zirides gouvernaient le Maghreb en leur nom. On peut détailler un peu la situation des principaux ensembles qui apparaissent sur cette carte, en allant de notre voisinage immédiat à l'O. vers les pays les plus éloignés à l'E.

                  ... /...
                  Dernière modification par Harrachi78, 31 décembre 2022, 22h18.
                  "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                  • #54
                    a) L'Espagne et le Portugal :

                    Il n'existe encore à ce stade aucun pays nommé "Espagne" ou "Portugal", et encore moins de nations de ces noms. Hispania reste un terme de géographie latine, utilisé dans les sources chrétiennes pour désigner toute la Péninsule Ibérique, et il avait pour équivalent dans la littérature géographique arabe de la même époque le terme al-Andalus. Cet enemble était divisé en deux mondes en perpétuelle opposition :



                    >> Au S., la majorité du territoire était encore tenu par la dynastie des Omeyyades de Cordoue, et dont les Émirs (qui se succédaient ici depuis deux siècles maintenant) arrivent justement au fait de leur puissance sous Abderrahmān III (912-961), dit a-Nāçir. Celui-ci, après l'avènement de Ubaydallāh al-Mahdi et des Fatimides au Maghreb en 909, se retrouve face au danger de la propagande ismaélienne et il décide, en 925, de franchir le pas qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait osé depuis la chute du califat omeyyade de Damas en 750 : se donner le titre califal de Amīr al-Mu'minīn. Dès lors, la lutte contre les Fatimides se fera à statut égal et au nom du Sunnisme, même si -comme nous l'avions vu- l'affeontement se fera essentiellement par le biais de proxys et avec pour principal enjeu la domination de ce qui est de nos jours le N. du Maroc : Berbères Sanhāja dans le camps fatimide ; Berbères Zanāta dans le camps Ommeyyade. Après le départ des Fatimides vers l'Egypte en 972, l'affrontement se poursuivra contre leurs sucesseurs au Maghreb, les Zirides, notamment par al-Hakam II (961-972) et Hishām II (976-1009) dont le règne marquera l'apogée de la dynastie et la période faste de l'Andalus, et dont l'époque deviendra un des thèmes classiques de la littérature arabe médiévale et post-medivale. Après cela, et pratiquement sans transition, les affaires partent en couille et en guerres-civiles à Cordoue, jusqu'à la disparition pure et simple et de la lignée en 1031 et l'éclatement du domaine ommeyyade en une vingtaine de principautés locales qui vont s'entre-déchirer dans la joie et le bonheur : mulūk a-Tawā'if.

                    Comme dans les autres territoires islamique à cette époque, la populations de cet espace était variée, tant sur le plan religieux que éthnique : Arabes et Berbères étaient musulmans Sunnites, tandis que les populations d'origine locale étaient musulmane pour une partie et restée chrétienne pour l'autre. Par-contre, l'environnement culturel et linguistique était arabe et plutôt homogène pour l'ensemble des groupes en présence, ce qui était un des principaux traits distinctifs de l'Abdalus par rapport au Maghreb ou l'élément Berbère restait encore très apparent dans le paysage.

                    __________________

                    >> Au N., nous avions vu qu'une une petite partie, plutôt isolée et montagneuse, avait regroupé quelques seigneurs Wisigoths qui ont pu échapper à la conquête musulmane en 711, et où un petit royaume chrétien s'était constitué en 722. Ce royaume des Asturies s'était maintenu pour un temps, mais finit par éclater au fil du temps en trois ou quatre seigneuries rivales, jusqu'à ce que l'un d'entre eux, Alfonso IV de Leòn parvient à les soumettre à son pouvoir en 924. Ainsi se créa le Royaume de Leòn, au départ sur ce qui est de nos jours extrême N.-O. de l'Espagne (Galice) et N. du Portugal (Porto), avant qu'il ne commence à grignoter sur les territoires de l'Andalus au S. au fur et à mesure que déclinait la puissance ommeyyade à partir de 1009. A ce dérnier stade du siècle, d'autres petites entités politiques vont apparaître à l'E. de cette bande de territoire et le long des Pyrénées. Ils formeront d'autres petits royaumes chrétiens au début du siècle suivant, tout comme le compté de Barcelone se détaché du royaume Franc pour former l'embryon d'un autre royaume.

                    Sinon, la population, chrétienne, qui habitait ce royaume de Leòn parlait un dialecte latin qui deviendra plus tard le portugais. Les castes dirigeantrs étaient pour leur part issues de l'ancienne noblesse wisigoth, mais leur langue gérmanique avait alors totalement disparu et ils étaient désormais de langue romane, même si ils gardaient une identité de caste assez marquée.

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                    Dernière modification par Harrachi78, 30 décembre 2022, 23h09.
                    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                    • #55
                      b) La France et l'Allemagne :

                      Au milieu du siècle précédent, l'Empire franc des Carolingien s'était divisé en deux royaumes : la Francie Occidentale, qui correspond à une partie de la France actuelle ; et la Fracie orientale, qui correspond à ce qui est aujourd'hui Allemagne, Belgique, Hollande, Suisse, Autriche et République Tchèque.

                      Jusqu'en 887, cette séparation n'etait pas définitive car, au gré des successions, l'ensemble fut parfois gouverné par un seul souverain carolingien. Mais à la mort de Charles III, la division devint permanente puis, en 911, soit au moment où se mettait en place l'État Fatimide au Maghreb, le dérnier souverain de la lignée de Charlemagne meurt sans déscendant. La séparation devient alors définitive, ce qui marque le début d'une Histoire distincte pour chacune des deux "Francies", et ca va aboutir par la suite à la création de deux pays : la France et l'Allemagne.



                      a) Francia Occidentalis :

                      Dans la littérature géographique de l'époque, le pays se nomme toujours Gallia (la Gaule), tandis que politiquement les souverains se titrent "roi des Francs de l'Ouest". Le terme "Francie Occidentale" commence alors à devenir courant pour désigner le royaume et les pays qu'il domine. A la disparition du dérnier roi carolingien en 911, c'est une nouvelle dynastie issue de l'aristocratie franque qui prend le pouvoir : les Capétiens.

                      Dans cet ensemble franc occidental, la seule région qui était peuplée de Francs à proprement parler correspond à la région actuelle de Paris et ses alentours. Ces Francs de Gaule ne parlent alors plus leur langue gérmanique d'origine, mais un dialecte roman spécifique qui deviendra peu à peu ce qui est appelé "Langue d'Oïl", ancêtre direct du français. Dans le reste du royaume, la situation est diverse : dans le S. (Aquitaine ... etc.) c'est toujours des populations latines qui prédominent, développant leur propre dialecte roman qui deviendra plus tard "Langue d'Oc" ou occitan. En Bretagne, la population est celtique, alors que la Normandie est colonisée au cours de ce 10e siècle par des populations venue de Scandinavie, qu'on nomme Normands ou Vikings, et qui parlent leur propre langue gérmanique. C'est de ce melting-pot que va peu à peu se constituer la France le long des siècles à venir.

                      _______________________


                      b) Francia Orientalis :

                      Dans un premier temps, vers 843, le royaume des Francs de l'Est s'organise autour de 5 entités que les sources nomment les "Duchés éthniques". Il s'agit en gros des territoires des anciens peuples germaniques que les Carolingiens avaient soumis pour former leur Empire : Lotharingie, Franconie, Saxonie, Allemanie (ou Souabe) et Bavière. A cette entité centrale s'ajoutaient les autres dépendances à l'Est (Bohème, Carinthie), à l'O. (Burgondie) et au S. (Italie). A la mort du dérnier Carolingien en 911, c'est une dynastie Saxonne qui prend le pouvoir. Mais la situation reste confuse jusqu'en 932, lorsque Othon Ier parvient à remettre de l'ordre dans cet ensemble : 962, il se sent assez fort pour restaurer le titre impérial à son profit, et ainsi va naître ce qui était appelé le "Saint Empire romain de la Nation gérmanique".


                      Là encore, dans cette "Francie Orientale", les seules régions proprement peuplées de Francs étaient la Lotharingie (actuelle Lorraine) et la Franconie (région de Frankfurt) qui est la zone d'origine de ce peuple. Le reste était très varié : populations latines en Italie et en Burgondie, populations Slaves en Bohème et en Moravie ... etc. Même dans les régions germaniques, divers dialectes vont se constituer pour donner ultérieurement naissance à diverses langues (allemand, néerlandais ... etc.) Ici, c'est l'idée politique d'Empire qui va prédominer et, ainsi, le terme de "Francia Orientalis" va rapidement tomber en désuétude, alors qu'il va se maintenir dans l'O. qu'on commencera à nommer "Francia" tout court au lieu de "Gaule". C'est de ce glissement que vient le nom de "France", alors que les duchés éthniques qui formaient le cœur de l'Empire deviendront "Germania".

                      A noter que, à ce stade, ce "Saint Empire" inculait ce qui était appelé Royaume de Burgondie qui correpond aux actuelles Bourgogne, Provence et Suisse romande, alors que l'actuelle Allemagne de l'Est (y compris Berlin) était encore une région etrangère peuplée de tribus Slaves.

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                      Dernière modification par Harrachi78, 31 décembre 2022, 23h46.
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                      • #56
                        c) Les Îles Britanniques :

                        A la fin du siècle précédent, en 877 plus précisément, ce qui était encore appelé île de Bretagne (Brittania) dans la géographie latine fut envahie par une nouvelle de populations germaniques. Il s'agissait cette fois de Normands/Vikings venus de l'actuel Danmark, qui parviennent à soumettre les royaumes Angles de l'Est et du Centre, donnant à cette partie de pays le nom de Danelaw :



                        Cette situation perdure jusqu'en en 910, soit l'époque où se constitua l'Etat Fatimide au Maghreb. A ce moment, parmi les royaumes Anglo-Saxons du S. qui avaient échappés à cette invasion danoise, celui de Wessex parvient à s'imposer aux autres, annexant d'abord ce qui restait du royaume angles de Mercie puis, à partir de 918, soumet les chefs Danois et poursuit son avancée jusqu'au Northumberland, limite N. des anciens territoires anglo-saxons avec le pays celtique des Scots (Écosse). Ainsi, en 927, le roi saxon Aethelstan de Wessex céee pour la première fois un "Royaume d'Angleterre" (England), dont le territoire sera définitivement achevé par la conquête de la principauté danoise de York en 957.

                        Contrairement à la Gaule où les Francs s'étaient romanisés comme nous l'avons vu plus haut, ici le pays s'était plutôt germanisé depuis l'arrivée des Angles et des Saxons trois siècles auparavant, alors que les anciennes populations celtiques de l'Ile étaient désormais cantonnées dans le Pays de Galles à l'O. et à l'Ecosse au N. C'est ainsi que débute l'Histoire anglaise à proprement parler.

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                        Dernière modification par Harrachi78, 01 janvier 2023, 22h35.
                        "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                        • #57
                          d) Les peuples nomades :

                          Le 10e siècle en Europe fut marqué par deux vagues d'invasions nomades qui eurent un impact direct sur les évolutions politiques et éthniques de certaines régions : les Normands (Vikings) et les Magyars (Hongrois).



                          Les Normands/Vikings :

                          Les attaques par mer des tribus de Scandinavie commencent dès le siècle précédents comme nous avons vu dans un précédent topic. Ça touche d'abord l'île britannique, puis s'étend au continent peu à peu, et tout particulièrement le N. de la Gaule franque (France), mais aussi l'actuelle Russie car ces groupes de pilards Vikings remontent les rivières et frappent très loin à l'intérieur des terres. Ce mouvement resta quasiment incessant durant tout le 9e siècle, et finit par toucher la Méditerranée où les côtes du Maroc furent atteintes en 844, les sources arabes appellant ce peuple Majūs car ils étaient Païens, tandis que les sources franques les nomment Normands (Hommes du Nord)

                          Mais, à partir de l'an 900, la donne évolue : les Normands ne se contentent plus de mener des raides avant de rentrer en Scandinavie, mais commencent carrément à migrer vers certaines zones et à y établir des colonies de peuplement. Ce fut déjà le cas en Grande Bretagne où ils constituent le Danelaw en 875, puis sur les côtes de la Manche en Gaule en 911 où le roi de Francie Occidentale, de guerre lasse, finit par leur reconnaître un territoire qui devient duché de Normandie en 933.

                          Parallèlement à cela, à l'autre bout du continent, d'autres groupes s'établissent le long de ka Volga et fonde une principauté à Novgorod en 862 et où ils règnent sur des tribus slaves. De là, il continuent à s'étendre vers le S. où ils prennent Kiev en 882. Leur roi Oleg s'y établit alors et c'est ainsi que fut fondée ce qui était appelé la "Rus' de Kiev".En 906, la Rus' est tellement puissante qu'elle attaque Constantinope, et dans les années 960, l'aristocratie normande s'assimile totalement à la culture locale, adoptant les noms et les dieux des populations Slaves qu'elle dominait depuis un siècle. En 965, la Rus' annexe le vieux royaume des Khazars, puis le roi Vladimir se convertit avec tout son peuple au Christianisme orthodoxe en 989. C'est de cette évolution que va naître la Russie, de qui sortira ensuite une Ukraine et une Biélorussie.

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                          Les Magyars/Hongrois :

                          Au 9e siècle, nous avions laissé les tribus Magyars nomadisant dans les steppes du S. des actuelles Russie et Ukraine, côtoyant les Khazars iraniens.

                          En l'an 900, un chef nommé Arpàd parvient à soumettre les 7 tribus Magyars avec 3 tribus Khazars dont il se proclame Grand-Prince. Il mène alors son peuple à la conquête de l'O., traverse les Carpates, détruit le royaume slave de Moravie et l'installe dans la plaine actuelle de Hongrie d'où il chasse les tribus slaves. De là, les Magyars mènent de longues expéditions de pillage jusqu'en Allemagne et en France jusqu'à la fin du siècle, avant que ça ne se calme et qu'ils finissent pas se sédentariser dans le pays qui porte encore de nos jours le nom de Hongrie.
                          "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                          • #58
                            C'est en gros cela qui se passa en Europe pendant que se déroulaient les événements qu'on a vu plus haut chez-nous et au Maghreb au cours de ce 10e siècle.

                            On peut constater que ce topic fut relativement long par rapport aux trois précédents. Ce n'est pas parceque ce siècle fut plus riche événements, mais simplement parceque les sources deviennent beaucoup plus fournies et beaucoup plus généreuses en informations. Nous arrivons maintenant à l'an 1000 après J.-C., et la suite des événements concerne donc le 11 siècle et un autre topic à venir.
                            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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