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Histoire de l'Algérie médiévale - le 8e siècle après. J.-C.

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  • #31
    3. Qu'en est-il des religions ?

    Globalement, les historiens estiment que les Musulmans restent minoritaires dans l'ensemble de l'Empire islamique jusqu'au 10e siècle. Mais, il y avait naturellement des variations régionales et la situation exacte au Maghreb est parmi les plus difficiles à évaluer du fait de la pauvreté des sources d'information contemporaines.

    Si l'on crois les sources arabes disponibles, la majorité du Maghreb était déjà devenu musulman au milieu de notre 8e siècle. Il est vrai qu'un pic de conversions a bien pu se produire sous le califat de Umar b. Abdelazīz dans les années 712, mais il est difficile d'en estimer la portée réelle sur l'ensemble du Maghreb. Possible donc que les régions orientales (Tunisie, E. algérien) aient été très touchées dès cette époque, mais il devait néanmoins subsister de larges pans de population chrétienne, même dans les zones très islamisées.

    Le problème est que ce Christianisme supposé ne s'exprime prèsque plus dès cette époque, ce qui appuie la possibilité d'une islamisation précoce. D'un autre côté, l'ampleur de la rèvolte qui éclate en 739 et les motifs que les sources arabes lui imputent (le traitement discriminatoire des musulmans berbères par les gouverneurs ommeyades ... etc.) laisse aussi supposer une large diffusion de l'Islam parmi les tribus insurgées, et ce jusqu'aux lointaines régions du Maghreb Extrême. Il est donc probable que le niveau de l'islamisation au Maghreb eut été supérieur à celui des autres provinces de l'Empire en ce 8e siècle, et il se pourrait aussi que cette islamisation de l'intérieur du pays soit en partie l'œuvre des missionnaires Kharrijites, tant ibādites que Çofrites, qu'on vois se répandre un peu partout à partir des années 720, et qui seront justement à l'origine des révoltes qui éclatent après les années 740. Un autre élément spécifique au Maghreb aurait aussi pu favoriser cette évolution rapide : la structure tribale de la société. Cette organisation fait que la conversion des chefs de tribus entraîne systématiquement celle de leurs compatriotes, ce qui donne un schémas d'évolution très similaire à celui qui avait entraîné la conversion massive des Arabes à l'Islam un siècle auparavant.

    On pourrait donc croire que l'islamisation aurait pris deux chemins parallèles chez-nous : d'un côté, les populations romano-africaines des zones urbanisées qui se rallient à l'Islam progressivement, plus ou moins au même rythme que celui qui aurait eu lieu en Espagne ou en Égypte par exemple et sous la même influence qui était celle des communautés arabo-musulmanes établies dans les villes ; et de l'autre côté, le monde des tribus Berbères qui s'islamise à un rythme plus élevés de par sa structure tribale, mais plutôt poussé à cela par l'action énergique et l'attrait politique de la chose telle que présentée par la da3wa kharrijite.

    En somme, c'est tout ce que permet de supposer le trop peu d'informations dont on dispose sur cette question.
    Dernière modification par Harrachi78, 10 janvier 2023, 11h29.
    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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    • #32
      4. Contexte général de l'Islam à cette époque :

      Avec la chute des Omeyyades en 750 et l'avènement du régime Abasside, l'Empire islamique mute sur certains aspects et évolue vers de nouvelles formes qui vont devenir caractéristiques.

      Politiquement, le califat cesse en quelque sorte d'être le "royaume arabe" qu'il avait été jusque-là, pour ressrmbler de plus en plus à un Empire multiethnique, un peu dans le style des empires romain tardif ou de l'Empire achéménide de l'Antiquité. Certes, les familles régnantes restent d'essence arabe du fait que la légitimité politique était encore liée à la primauté en Islam ou à la parenté avec le Prophète ; les groupes arabes restent encore à ce stade le noyau central des armées du califat, et la langue arabe -qui est sur le point d'atteindre son stade classique- devient l'idiome commun de toute cette civilisation islamique en formation. Mais, dans la pratique quotidienne du pouvoir sous les califes Abassides, le personnel du gouvernement et les élites militaires commencent à se recruter courement parmi les grandes familles non-arabes, parfois converties à l'Islam depuis à peine une génération. Le cercle du pouvoir central s'élargit, et il en va de même dans les provinces où de plus en plus de non-arabes sont aux commandes, à tous les échelons. Les Arabes eux-mêmes changent en tant que société : désormais moins exclusivement réservés à l'exercice du pouvoir politique et au métier des armes, ils investissent individuellement d'autres domaines, parfois anciens comme le commerce ou la littérature, et parfois nouveaux comme les domaines du savoir, côtoyant en cela les nouvelles têtes sorties des sociétés nouvellement islamisées. C'est un moment de brassages important.

      En fait, et c'est un peu paradoxal, cette fin du 8e siècle siècle marque en même temps le début de la fin pour l'unité politique de l'Empire avec l'émergence des États dynastiques en Occident (Omeyyades en Espagne, Rustomides en Algérie, Idrissīdes au Maroc ... etc.), et le début d'une unification culturelle qui va faire naître une aire civilisationnelle homogène et une zone économique et sociale ouverte sur tout l'espace de ce qu'on va commencer à appeler Dār al-Islam : c'est la naissance du "Monde musulman". Cette première époque abasside (750-900), celle de Hārūn al-Rachīd ou de Abbās al-Mu3taçim, des Mille et Une Nuits ou d'Is'hāq al-Mawçili ... etc. va représenter par la suite l’époque classique et la référence par excellence en quelque sorte dans l'imaginaire de toutes les sociétés musulmanes des siècles suivants, et ce quelle que soit l'évolution politique et la succession des régimes et dynasties au pouvoir qui aura lieu ici ou là.
      Dernière modification par Harrachi78, 10 janvier 2023, 11h36.
      "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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      • #33
        5. Pendant ce temps ...

        Comme à l'accoutumée, on clos la période en jetant un petit coup d'œil sur ce qui se passait ailleurs à la même époque :

        a) Allemagne / France / Italie :

        En 751, soit au moment de la chute des Omeyyades et de l'avènement des Abassides, une nouvelle dynastie prend aussi le pouvoir chez les Francs, celle des Carolongiens. Ils viennent d'Austrasie, un des royaumes Francs dont le territoire correspondait à peu près au N.-O. de l'Allemagne actuelle, avec une partie de la Belgique et de la Hollande, et héritent au départ d'un royaume qui recouvre, en plus des territoires cités, le N.de la France actuelle qui était un royaume franc aussi (Neustria), ainsi que le S.-E. qui formait à l'origine le royaume d'un autre peuple germanique, les Burgondes.



        A partir de ce premier noyau (zone en gris uni sur la carte), les rois Carolingiens étendent leur pouvoir sur de nouveaux territoires entre 741 et 799, c'est-à-dire à la période où se constituaient les Etats Rustomide, Idrisside et Aghlabide au Maghreb : ils prennent l'Aquitaine (tout le S.-O. de la France actuelle) qui était un Etat indépendant, le S. de l'Allemagne qui était un royaume des Bavarois et enfin le N. et le Centre de l'Italie où ils mettent fin au Royaume des Lombards.

        En l'an 800, Charles le Grand (dit Charlemagne en français), roi des Francs depuis 768, domine tous les peuples germaniques et latins d'Europe de l'O, sauf ceux d'Espagne ou regnaient les émirs Omeyyades de Courdoue, et se proclame "Empereur romain d'Occident", un titre qui avait disparu depuis quatre siècles à ce moment.

        _______________


        b) Grande-Bretagne :

        A la fin de ce 8e siècle, il n'existait pas encore d'Angleterre. L'île de Grande-Bretagne était toujours partagée entre un puzzle de petits royaumes, tous tenus par les deux peuples germaniques qu'on avait vu envahir le pays par la mer au siècle précédent (Angles en Mercia, East Anglia et Northumbria ; Saxons en Essex, Wessex et Kent), le reste étant tenu par de tout aussi nombreux peuples celtiques (Gallois à l'O. et Écossais au N.), eux mêmes partagés en tribus :



        Ainsi s'achève la vue générale sur ce 8e siècle apr. J.-C.
        Dernière modification par Harrachi78, 10 janvier 2023, 11h14.
        "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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        • #34
          .....vu la qualité du travail et les efforts fournis , ces threads ouverts sur l'histoire médievale du Maghreb central méritent de paraitre du moins en premiére page ...et ce pour la bonne information de tous.
          ارحم من في الارض يرحمك من في السماء
          On se fatigue de voir la bêtise triompher sans combat.(Albert Camus)

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