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Les lacunes des Accords d’Evian

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  • Les lacunes des Accords d’Evian

    Les lacunes des Accords d’Evian
    Une contribution de l’historien et anthropologue Ali Farid Belkadi

    Algérie Patriotique - 16 Mar, 2017


    Si le concept de crime contre l'humanité déplait tant en France, il y a le crime d'agression qui définit les méfaits graves commis par les personnes ou Etats (la France) ayant préparé, accompli ou promu un conflit armé visant à déstabiliser un ou plusieurs Etats souverains. C'est le cas de l'Algérie dès 1830 et ainsi de suite jusqu’en 1962.

    La nouvelle génération de politiciens français, Benoît Hamon, Emmanuel Macron, et certainement d’autres personnalités politiques à venir, reproduit assez étonnamment le mythe Œdipe : adieu François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy. On se souvient de la fin de cette légende : un vieillard monté sur un char commande impérieusement au jeune Œdipe de s'écarter de son chemin. Œdipe, qui a le sang chaud, tue le conducteur du char. C'était le roi Laïos, son propre père. Ainsi, Œdipe accomplit la prophétie.

    La prophétie en politique a pour nom le changement, chose que les tenants du pouvoir en Algérie refuseront toujours obstinément. Nos hommes politiques s’achètent, se vendent au plus offrant et s’entredévorent.
    Se reproduisent comme des parasites sur le dos du peuple. Jusqu’à quand ?

    La nouvelle génération de politiciens français, qui abhorre les temps de la colonisation, voit l’Algérie et les Algériens avec un regard inédit.

    Wait and see

    Indices infâmes de la présence française en Algérie, les preuves de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de crimes d'agression sont jusqu’à nos jours fournies par la conservation au MNHN de Paris de crânes de résistants algériens assassinés et décapités par le corps expéditionnaire français lors de la conquête de l’Algérie par la France.

    Les témoignages vils de soldats français ayant participé ou commis ces crimes abominables contre les populations algériennes sont connus. Ils figurent dans d’innombrables lettres confidentielles ainsi que dans une multitude de livres qui sont accessibles à tout un chacun sur des sites consacrés à l’histoire, dont Gallica.fr.

    Au cours du XIXe siècle et au siècle suivant, des millions d'enfants, de femmes et d'hommes ont été assassinés, mutilés, estropiés en Algérie, victimes innocentes de cruautés qui défient l'imagination et offusquent profondément la conscience humaine. L'emploi de la force barbare par la France pour accaparer l'intégrité territoriale algérienne est l’un des crimes internationaux les plus méprisables dans l’histoire contemporaine.

    L’accès au savoir et à la connaissance

    Les Algériens ont été empêchés durant 132 années d’accéder au savoir et aux connaissances universelles développés par le monde occidental.


    L’instruction n’était pas consentie aux petits indigènes d’Algérie, les consignes du ministre de l’Enseignement Jules Ferry adressées aux maîtres d’école de l’époque étaient formelles. Un mythe durable, entretenu par une opinion républicaine complaisante, fait de Jules Ferry le père de l’école, en France et dans les colonies françaises. Alors que J. Ferry, fondateur de la gratuité de l'enseignement primaire ordonnée le 16 juin 1881 à l’intention des petits enfants français, interdisait en parfait raciste aux petits enfants colonisés l’accès à l’école : «Gardons-les (à l’école) disait-il, jusqu’à l’âge de 14 ans, c’est assez, bien assez puisque nous ne voulons pas leur rendre familiers nos beaux programmes d’enseignement primaire, que nous ne voulons leur apprendre ni beaucoup d’histoire, ni beaucoup de géographie, mais seulement le français, le français avant tout, le français et rien d’autre.» Jules Ferry cité par M. C. Duchet. Les Temps modernes, n° 123, mars/avril 1956.

    C’est ainsi que la plupart des Algériens se firent subordonnés de petites gens venues d’Europe (et véritables rebuts de la Méditerranée, selon le général Berthezène), serviteurs et petits fonctionnaires appariteurs dans les administrations, les moins chanceux de ces «indigènes» se firent manœuvres, portefaix, employés à la halle, cireurs pour subsister. Voilà pour les bienfaits de la France en Algérie.

    Depuis le départ des Français, les jeunes Algériens ont pris le temps de rattraper les retards éducatifs accumulés par leurs aînés, qui dépassaient rarement le cap du cocasse certificat d’études primaires et élémentaires du temps des colonies.
    Le journal El-Watan du 30 janvier 2014, dans un article intitulé «La fuite des cerveaux en chiffres», dévoile les chiffres effarants concernant les cadres et intellectuels algériens ayant fui l’Algérie : «300 000 cadres dirigeants et chefs d’entreprise algériens se sont établis à l’étranger, selon l’AIDA. 80% de ces cadres vivent en France. 80 000 entre 1994 et 2006 est le nombre de chercheurs ayant quitté le pays pour d’autres cieux plus ouverts à l’intelligence. 50 000 étudiants, entre 1970 et 1990, ont reçu des bourses pour étudier à l’étranger, dont seuls 25 000 sont revenus. 8 000 médecins algériens exercent en France. 420 millions de dollars est le coût de la formation des cadres partis à l’étranger en 20 ans.»

    L’historien Gilbert Meynier dans un entretien paru dans le journal El-Watan le 2 décembre 2011 confirme les humiliations à caractère éducatif auxquelles furent soumis les Algériens durant la période coloniale : «Sur la langue parlée par les Algériens à l’indépendance : je voulais juste souligner que peu d’Algériens parlaient français, simplement du fait de la faiblesse de la scolarisation dans l’Algérie coloniale ! D’après les chiffres officiels, 5% d’enfants étaient scolarisés en 1914, moins de 15% en 1954 – en fait, probablement moins (scolarisation qui s’est accrue in extremis avec De Gaulle et le plan de Constantine). Mais il est évident qu’à l’indépendance, une majorité d’Algériens parlaient arabe dialectal. (…) C’est un véritable retournement de l’histoire. Il en est de même de l’apprentissage du français en Algérie, que la France coloniale n’avait pas développé, se souciant plutôt de laisser les Algériens dans leur ignorance. Paradoxalement, c’est l’Algérie indépendante qui aura donné au français ses lettres de noblesse auprès des jeunes Algériens, puisqu’il est enseigné dès l’école primaire.»

    Ce retard de 132 ans d’épais obscurantisme dont ont souffert les Algériens a trouvé sa résolution aussitôt l’indépendance acquise. De nos jours, des milliers de médecins, d’ingénieurs, de cadres, de professeurs, de spécialistes de haut niveau, toutes disciplines confondues, qui n’ont pas été formés par la France, dont les mérites sont toujours ignorés par l’Etat algérien, contribuent à l’opulence sociale et économique de la France, de l’Europe ainsi que d’autres pays dans le monde, dont les Etats-Unis d’Amérique et les pays du Golfe.

    à suivre ...
    Dernière modification par Pomaria, 21 mars 2017, 00h43.
    Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

    Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

  • #2
    Les manuscrits algériens à travers l'histoire

    L’auteur A’rab Abdelhamid, dans son ouvrage Les Manuscrits et Bibliothèques musulmanes en Algérie, collection Kitàb Tabulae, Atelier Perrousseaux Editeur en France et les Editions Barzakh, écrit dans l’introduction de son livre : «Les collections de manuscrits les plus anciennes d'Algérie étaient celles conservées à la bibliothèque du roi numide Juba Il à Cherchell, la bibliothèque de saint Augustin à Bône et la bibliothèque municipale romaine à Thamugadi (Timgad antique).

    L’introduction de l’islam au Maghreb fut un autre tournant dans l'histoire culturelle de l’Algérie : Tahert, Bougie, Touat, Tlemcen, Constantine, Mazouna, etc. sont toutes des villes ayant connu des époques brillantes de prospérité intellectuelle sous les différents royaumes berbères. Même la période turque, jugée par la plupart des écrivains français comme la plus sombre époque sur le plan culturel, était caractérisée par l'abondance de ses livres et de ses bibliothèques, dont la plupart ont été hérités des civilisations précédentes.


    (…) Toutefois, comparativement à ce qui s'était passé auparavant à Bougie, Tlemcen, Mazouna ou Tahert, qui avaient brillé d'un vif éclat dans le domaine de l'esprit, la période ottomane en Algérie a représenté une époque de déclin et de décadence sur le plan culturel, en dépit de sa suprématie militaire.


    (…) Durant les trois siècles de présence turque, les forces morales et intellectuelles de l'Algérie qui échappaient au contrôle de la caste militaire des Turcs ont été dirigées par les institutions religieuses qui ont sauvegardé le patrimoine hérité du passé ainsi que l'identité de l'Algérie. Grâce à ces institutions, l'instruction fut répandue dans toute la Régence où il y avait beaucoup d'écoles ordinaires où les enfants de cinq, six ans et au-dessus apprennent à lire et à écrire. Dans le même contexte, le capitaine Rozet nous apprend qu'il y avait cent écoles publiques et particulières dans Alger avant l'intervention des Français en 1830 et que le peuple maure, pris en général, a peut-être plus d'éducation que le peuple français, puisque tous les hommes savent lire, écrire et un peu compter ; il y a un grand nombre d'écoles publiques dans la Régence d'Alger où on instruit les enfants dès l'âge de quatre ans.»

    En gros, l’Algérie figurait parmi les pays les plus évolués du pourtour méditerranéen.

    Hypothèses coloniales improductives

    A la lecture des ouvrages, revues, articles, communications savantes et écrits divers encombrés de singularités, d’affabulations à l’époque de l’Algérie coloniale, la portion de textes accordée aux lettrés autochtones est quasi nulle. L’auteur syntacticien et linguiste Cid Kaoui (né en 1859), banni des cénacles savants coloniaux racistes et démuni matériellement, parviendra à éditer malgré leur animosité ses travaux à compte d’auteur.

    L’histoire de la France en Algérie s’écrivait à sens unique, et les Algériens reclus à la tradition orale.

    C’est ainsi que l’Algérie, terre de culture multimillénaire, permit à des amateurs français illuminés plutôt qu’éclairés, et à quelques savants professionnels issus de la métropole française, d’atteindre un degré de spécialisation progressif inespéré, en compulsant à bon marché et de manière systématique les vestiges matériels et le passé de l’Algérie.

    Ces savants captivés par des disciplines nouvellement apparues en Europe, dont celles de l’épigraphie et de l’archéologie, utiliseront les connaissances pratiques de centaines d’informateurs algériens. Certains d’entre eux, qui furent de véritables documentalistes-fichistes de la grande tradition orale algérienne, aidèrent les savants coloniaux français de manière anonyme, car ils ne sont jamais cités, pour faire avancer ces sciences nouvelles.


    L’Algérie, depuis les temps immémoriaux, est une véritable caverne d’Ali Baba. Elle a aussi ses quarante voleurs, les savants coloniaux.


    Reynaud, Quatremère, Hase, De Slane…


    Ba Hamou Al-Ansari Ben Adbesselam, le secrétaire du Tebeul Moussa Ag Amastan, fut le plus prestigieux de ces bannis de la culture coloniale. Ba Hamou Al-Ansari fut le coauteur essentiel du volumineux dictionnaire qui est attribué jusqu’à nos jours au seul Charles de Foucauld. Sans Ba Hamou Al-Ansari, il n’y aurait pas eu de dictionnaire de Foucauld.

    Reynaud, Quatremère, Hase, De Slane, Walckenaer, d’Avezac, Dureau de la Malle, Marcel, Carette, Fournel, De Mas-Latrie, Vivien de Saint-Martin, Léon Rénier, Tissot, H. de Villefosse, parmi les moins connus du public, ont été aidés dans leurs travaux par des indigènes ordinaires.
    L’interprète Cid Kaoui, auteur de plusieurs plaquettes savantes éditées à compte d’auteur, fait partie d’une autre catégorie d’indigènes décriés par les savants de l’époque.

    Les hypothèses improductives d’Henri Lhote sur le Tassili n’Ajjer ou les présomptions surannées de Berbrugger, Halévy, Rodary, Reboud, Letourneux dans le domaine libyque continuent de sévir en filigrane dans les annales algériennes.


    Les fragments érudits des anciens auteurs grecs et latins, qui sont favorables aux pays maghrébins, sont minimisés, pour ne pas mettre en lumière les connaissances et le discernement scientifique des anciens Berbères. Il faut relire Juba, auquel se réfère souvent dans ses écrits Pline l’ancien. Les écrits de Polybe et Tite-Live sont riches d’enseignements sur le Maghreb ancien.


    Les égyptologues traitent souvent de mercenaire le pharaon d’origine berbère Sheshonq Ier, le fondateur de la XXIIe dynastie égyptienne, qui réunifia la haute et la basse Egypte dès 950 avant J.-C. Personne n’a jamais traité de stipendié à la solde des Etats-Unis d’Amérique John F. Kennedy, qui était pourtant d’origine irlandaise. Ni le président français Mac Mahon, gouverneur général de l’Algérie, maréchal de France et troisième président de la République française, du 24 mai 1873 au 30 janvier 1879.


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    • #3
      Le cas Cid Kaoui

      Nous citerons encore le cas de Saïd Cid Kaoui, auquel on finit par accorder sur le tard la légion d’honneur pour son rôle d’interprète, non pour ses travaux de chercheur. Alors que ses qualités d’étymologiste et de dictionnariste le destinaient à l’approfondissement des connaissances berbères de l’époque. On ne lui accorda jamais cette chance.

      Connu à l'état-civil sous le nom de Saïd Kaoui ben Mohand Akli, il est né en 1859 dans la région de Béjaïa. On le retrouve marié en 1889 avec une Française d’Algérie, Léonie Richebois, née en 1868 à l’Arb’a, dans la Mitidja, fille d’un brigadier de gendarmerie à la retraite.

      Saïd Cid Kaoui fut ancien élève du Collège de Constantine et officier interprète de 1re classe, rang pourtant bien plus élevé que celui occupé par Alfred Clerc, le traducteur de l’opuscule d’Ibn Noureddine, le secrétaire particulier du cherif Boubaghla.

      Saïd Cid Kaoui est l’auteur d’un dictionnaire français-tamasheq absolument remarquable, édité dans l’urgence en 1891, c'est-à-dire plusieurs décennies avant les études du père de Foucault sur le même sujet. Son Dictionnaire français-tachelhit et tamazir’t (dialectes berbères du Maroc) sera publié hors d’Algérie, à Paris, par l’éditeur Ernest Leroux, en 1907. L’Algérie étant alors un champ gardé pour les lettrés français de diverses origines.

      Saïd Cid Kaoui fut rarement mentionné dans les ouvrages de dialectologie berbère. René Basset, qui fut son contemporain, le considérait comme un rival en puissance. Ses contemporains français l’ignoraient.
      Devant la véhémence de ses détracteurs, qui interférèrent auprès des hautes autorités de l’époque pour empêcher la publication de ses travaux, Saïd Cid Kaoui finit par éditer ses livres à compte d’auteur, sous forme de brochures éphémères.

      A l’époque, seuls les militaires avaient droit au chapitre, parmi eux le capitaine d'artillerie Delamare qui fut nommé membre de la commission chargée de l'exploration scientifique de l'Algérie. Léon Rénier apprêta, à la demande de l'empereur, un ouvrage sur les inscriptions romaines de l'Algérie. On refusait l’apport de Cid Kaoui au domaine berbère, ethnie dont il était pourtant issu.

      L’explorateur Duveyrier, qui personnalisait à l’époque on ne peut plus crûment le mépris des intellectuels algériens par les mandarins français, écrivit le 4 septembre 1891 :

      «Cher Monsieur, Vous m’avez écrit il y a deux jours, au nom de Monsieur le Ministre de l’instruction publique. (…) Cid Kaoui n’est ni un nom français ni un nom arabe ou berbère

      En clair, cela signifiait que Cid Kaoui n’existait pas. Puisqu’il n’était ni français, ni arabe, ni berbère. Qui était-il au juste ?
      C’est dans ce contexte social ségrégationniste qu’avaient lieu les recherches à caractère historique, qui écartaient ouvertement les travaux des lettrés arabes et kabyles. Avec pour corolaires pour les savants français la maladresse, voire l’incompétence notoire pour les études berbères.

      Le cas Machar Jebrine Ag Mohamed

      Il est également intéressant de citer dans le pays touareg Machar Jebrine Ag Mohamed et Ba Hamou Al-Ansari. Machar Jebrine Ag Mohamed fut le guide et le collaborateur expérimenté d’Henri Lhote, lors de sa mission au Tassili n’Ajjer.

      C’est Machar Jebrine Ag Mohamed qui mit au jour l’abri d’Iheren après avoir remarqué les empreintes de doigts à l’ocre rouge dans l’abri. De même qu’au refuge de Talewaout. On lui doit la découverte de plusieurs sites indispensables à la connaissance de l’art saharien. Pourtant, le nom de Machar Jebrine Ag Mohamed (1890/1981) est rarement mentionné par H. Lhote, sauf pour les banalités liées aux prestations théières. Dans les années 1930, Machar Jebrine Ag Mohamed avait déjà servi Brenans dans sa prospection des fresques du Tassili. Ailleurs, on aurait dit «Machar Jebrine Ag Mohamed, inventeur de tel ou tel site». Comme ce fut le cas pour Marcel Ravidat, Jacques Marsal, Georges Agnel et Simon Coencas qui découvrirent la Grotte de Lascaux le jeudi 12 septembre 1940. La grotte des Trois Frères tire son nom des trois fils du comte Begouen, qui la découvrirent en 1910. Cette honnêteté intellectuelle n’avait pas cours en Algérie.


      Il y a un autre précédent à retenir au Tassili, en la personne de Charles de Foucauld, qui fut militaire et ecclésiastique, avant de devenir l’indélicat auteur du Dictionnaire touareg-français en quatre volumes qui porte son nom pour la postérité.


      Le cas Ba Hamou Al-Ansari


      Revenons encore à Ba Hamou Al-Ansari Ben Adbesselam, le secrétaire du Tebeul Moussa Ag Amastan, amenokal de l’Ahaggar, chargé de l'éducation du père Charles de Foucauld en langues et civilisation touarègues et coauteur émérite du fameux dictionnaire. Pour dire que son nom n’apparaît nulle part dans l’œuvre monumentale du père de Foucauld.

      Le titre de ce travail colossal, eu égard à la charité chrétienne dont se targuait Charles de Foucauld, aurait dû être : Dictionnaire touareg-français de Ba Hamou Al-Ansari Ben Adbesselam et Charles de Foucauld. En guise de gratifications pour ce travail monumental, Ba Hamou était approvisionné en thé et en sucre par le père de Foucauld. Ce dernier avait utilisé quelques années plus tôt les services remarquables du rabbin Mardochée Abi Seror pour consigner sa Reconnaissance au Maroc qui sera publiée en 1885. «J’écris des juifs du Maroc, dira le père de Foucauld, avec une fine pointe de xénophobie, moins de mal que je n’en pense.»

      On doit également au père de Foucauld (1858-1916), béatifié le 15 mai 2005, une petite introduction au catéchisme qu'il intitulera : «L'Evangile présenté aux pauvres nègres du Sahara.»


      Charles de Foucauld, qui fit ses études à l'Ecole militaire de Saint-Cyr dans la même promotion que le maréchal Pétain, vécut toute sa vie imprégné des idées expansionnistes de la société française de l’époque.


      Il manquait une clause aux Accords d'Evian


      Avec le recul du temps, nous pensons qu’il aurait fallu inclure une clause subsidiaire aux Accords d’Evian, signés le 18 mars 1962 à Evian-les-Bains, en Haute-Savoie, concernant les musées français qui détiennent des biens patrimoniaux algériens depuis les premiers moments de la colonisation.

      Ces accords, qui résultaient des négociations entreprises par les représentants du Gouvernement provisoire de la République algérienne et les responsables français, mirent fin à la guerre d'Algérie. Cette entente entre d’irréductibles ennemis d’hier, qui établissait un cessez-le-feu applicable sur tout le territoire algérien dès le 19 mars, fut approuvée par un référendum organisé en France le 8 avril 1962. 91% des votants métropolitains agréèrent ces accords qui mettaient fin officiellement à plus de sept années de guerre, à l’exclusion des électeurs d'Algérie qui ne furent pas autorisés à voter.

      Les représentants du Gouvernement provisoire de la République algérienne ne soulevèrent pas le problème des biens culturels de l’Algérie, illégitimement intégrés au patrimoine inaliénable français. Il fallait pallier au plus pressé, atténuer les souffrances de part et d’autre de la Méditerranée et hâter la paix dans un pays exsangue.

      Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

      Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

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      • #4
        Ni réparation ni repentance

        Parmi les «biens», richesses et fortunes incessibles du patrimoine culturel français, figurent des segments de corps, des crânes, des têtes momifiées provenant d’actes de barbarie dégradants. Ces restes mortuaires, qui ont été accumulés parfois clandestinement au cours du XIXe siècle, sont considérés désormais comme «des biens patrimoniaux de l’Etat français».

        D’autres biens qui affirment la personnalité culturelle de l’Algérie à travers les siècles et les millénaires sont entreposés par centaines dans les réserves du Musée du Louvre. Il s’agit des stèles d’Al-Hofra (Constantine) que nous avons dénombrées sur place et consultées en 2009. De même que l’importante stèle du mausolée libyco-punique de Dougga, dit «mausolée 'Atban», étudiée celle-là au British Museum en 2010.

        Le crâne de l’homme de Ternifine est détenu au Musée de l’homme à Paris. Cet atlanthrope (- 500.000 ans) qui fut découvert en 1955 est l’inventeur d’une technique révolutionnaire, on lui doit en particulier la production des premiers outils bifaces ainsi qu’un casse-tête dont l’arête tranchante fut fixée au bout d’un manche. Cet outil, qui servait de hache, fut substitué à l’ancien coup de poing. Ce serait bien prétentieux d’affirmer que ces gens-là furent les ancêtres des Algériens, mais s’agissant de territoires et de pays, l’enchère est permise, puisque l’homme de Cro-Magnon est considéré dans les manuels d’histoire français quasiment comme un citoyen français…

        Il faudrait signaler que le premier dentiste connu à ce jour dans le monde exerçait en Algérie il y a 7 000 ans, bien avant l’apparition des civilisations de Sumer, d’Akkad et de l’Egypte. Le site de Faïd Souar II, situé à 70 km au sud-est de Constantine, a fourni en 1954 (G. Laplace) un crâne d’homo sapiens, ancêtre direct de l’homme moderne, dont le maxillaire dévoilait une prothèse dentaire qui fut étudiée par des spécialistes de la médecine dentaire. Il faudra attendre le papyrus d'Ebers (Egypte, IIe millénaire avant J.-C.) et plus tard le médecin grec Hippocrate de Cos (Ve siècle avant J.-C.), puis l’arabo-musulman Khalaf ibn Abbas Al-Zahrawi (vers 936), connu chez les Occidentaux sous le nom d'Abulcasis ou Albucasis parfois même Alsaharavius, pour découvrir d’autres procédés permettant de traiter une dent sur le point de tomber.
        Aucune indication dans ces fameux accords d’Evian ne concerne ces objets culturels éparpillés dans les musées de France ou ces têtes entreposées dans des boîtes à chaussures dans les réserves du Muséum de Paris.

        Le 3 juillet 1962, l’Algérie, devenue Etat indépendant, ne se souciera guère de recouvrer ses biens, qui sont jusqu’à nos jours incorporés au patrimoine français.
        La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée par l'Assemblée générale le 13 septembre 2007, à laquelle la France a adhéré, est claire ; elle prescrit dans ses articles 11 et 12 aux Etats membres d’accorder réparation aux peuples autochtones.

        L'article 12 précise bien que «les Etats veillent à permettre l’accès aux objets de culte et aux restes humains en leur possession et/ou leur rapatriement, par le biais de mécanismes justes, transparents et efficaces mis au point en concertation avec les peuples autochtones concernés».

        Reste ce concept de crime contre l'humanité qui déplait tant en France, que l’on peut formuler crime d'agression, préparé, accompli ou promu en France pour déstabiliser l'Algérie dès 1830, et ainsi de suite jusqu’en 1962. En attendant la mise en pratique du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, établi en 2010. Les preuves sont au Muséum.

        Nos hommes de loi sont trop occupés par la quête du pouvoir, ils n’ont pas le temps de s’intéresser à ces choses-là, aux crimes d'agression, ni aux méfaits graves commis contre les populations algériennes à l’époque coloniale.

        Ali Farid Belkadi
        Historien, anthropologue
        Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

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