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Se réapproprier les idéaux du combat et de la liberté

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  • Se réapproprier les idéaux du combat et de la liberté

    Première station de la révolution de Novembre 54, le 20 août 1956 a été le tremplin de l'organisation de la lutte de libération nationale sous toutes ses formes: sur le plan de la division du territoire national en wilayas, sur le plan de l'affectation des postes de responsabilité aux militants et en matière de logistique.

    Et plus que tout cela, le Congrès de la Soummam, dont l'architecte principal est Abane Ramdane, a assis la base idéologique et la stratégie de lutte de libération, vingt-et-un mois après le tir des premières balles.

    Un an auparavant, le 20 août 1955, les combattants algériens ont, avec l'offensive du nord Constantinois, montré que la révolution algérienne n'était pas le coup de quelques "égarés" ou une aventure hasardeuse.

    Cet épisode donna la mesure à l'ennemi de ce que sera cette guerre de libération nationale et montra ses objectifs réels. Pour capitaliser cet élan définitif vers la libération du territoire, créer une synergie entre toutes les forces politiques en présence, y compris les moins engagées d'entre elles, et organiser de façon moderne les méthodes de combat, Abane Ramdane et Larbi Ben M'hidi ont abattu un travail titanesque. Rallier Ferhat Abbas, convaincre le PCA de verser ses combattants de la libération aux éléments de l'ALN, convaincre les Oulémas d'être de la révolution, ne fut pas une sinécure. En quelques mois, Abane Ramdane émergea alors comme le leader unificateur des rangs et organisateur de la stratégie. Il fit adopter au Congrès deux principes majeurs de la philosophie de la lutte de libération nationale: la primauté de l'intérieur sur l'extérieur et la primauté du civil sur le militaire.

    Mieux encore, la vision de Abane dépassait la seule étape de la guerre, puisqu'elle était aussi dirigée vers cette future Algérie, débarrassée du colonialisme. Il la voyait comme une république sociale, démocratique, débarrassée des reliques d'archaïsmes, où tous les citoyens auraient les mêmes droits et devoirs, indépendamment de leur appartenance religieuse ou linguistique. La plate-forme de la Soummam était donc un creuset de la stratégie de la révolution dans ses aspects organisationnels, logistiques et pratiques, comme elle était une vision de l'Algérie postindépendance. C'étaient cette dimension et cette ambition modernistes qui dérangèrent tous ceux qui étaient tapis dans l'ombre, tous ceux qui se voulaient déjà des rentiers de la révolution et qui travaillaient pour placer l'Algérie sur une orbite autre que celle que lui destine son histoire millénaire. Ces personnages, qui furent de simples accidents de l'histoire, ne pardonnèrent pas à l'architecte de la plate-forme de la Soummam son audace, sa dimension d'unificateur des rangs de la révolution, son engagement et sa vision de l'Algérie de demain. Il paya alors ses qualités, ses initiatives et son action de sa vie. Son itinéraire prend fin un certain 27 décembre 1957, dans une ferme de Tétouan, au Maroc, où il fut attiré dans un guet-apens par ses frères d'armes qui l'étranglèrent. Il était âgé de trente-sept ans.

    L'assassinant de Abane Ramdane, considéré comme une page noire de la révolution de Novembre 54, signifie, du même coup, l'échec de faire transformer le processus de décolonisation en fondation d'une république moderne à l'antipode de la politique de domination et d'indigénat mise en œuvre pendant plus d'un siècle. Ce fut aussi la dérive qui ouvrit les portes aux luttes acharnées pour la prise de pouvoir bien avant l'indépendance du pays. L'indépendance acquise, la lutte pour le pouvoir et le dévoiement des valeurs de Novembre et de la Soummam s’exacerba au point de mettre la souveraineté populaire et les idéaux de la démocratie entre parenthèses pendant un demi-siècle. Revisiter aujourd'hui la plate-forme de la Soummam et rendre hommage à son principal architecte signifie, pour la jeunesse de ce début du 21e siècle, un ressourcement nécessaire, une nouvelle inspiration afin de continuer le combat des aînés pour une république démocratique moderne, instaurant l'égalité des droits et des devoirs et consacrant l'idéal de l'esprit de citoyenneté. C'est un ressourcement indispensable en ce moment de pertes de repères et de flou qui caractérisent non seulement la scène nationale, mais également la scène régionale et les relations internationales.



    Amar Naït Messaoud - La Dépêche de Kabylie
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