Littérature maghrébine francophone : quelle identité et quel genre pour une écriture délocalisée ? Les personnages emblématiques de la femme, de l’émigré, de la mère, mais aussi du texte, et leur étrangeté.
Charles BONN, Université Lyon 2
Le libellé « littérature maghrébine de langue française » indique un double espace de fonctionnement littéraire. Il installe d’emblée une spatialisation, et signale le désir de l’Autre, à travers sa lecture, comme l’un des fondements de la tension dynamique autour de laquelle se constitue l’écriture. Abdelkébir Khatibi ne disait-il pas, dans La Mémoire Tatouée, « Quand je danse devant toi, Occident, sache que cette danse est de désir mortel » ?
Pourtant cette tension, qui installe l’érotique du texte, n’est pas propre au roman maghrébin. Toute littérature s’écrit nécessairement en dialogue désirant avec son lecteur, et avec tous les textes diffus ou précis qui composent à l’écriture une sorte d’écran, de scène, où elle les convoque tour à tour. Mais en ce qui concerne le champ littéraire maghrébin, du fait de son Histoire, il faudra nécessairement tenir compte à la fois d’un double espace géographique référentiel, d’une lecture doublement localisée, facteur d’une attente également double, et d’une inscription de ce double espace dans le texte. On se trouvera donc devant des textes à l’identité littéraire et culturelle problématique, à supposer cependant que l’on puisse parler de l’identité d’un texte littéraire. La question de l’identité du texte écrit doit être en effet relativisée, si l’on considère qu’un tel texte, principalement lorsqu'il s’agit d’un roman, s’écrit toujours par rapport à une ubiquité de sa lecture comme de ses référents littéraires, à la différence par exemple de la tradition orale, qui ne rencontre la totalité de ses significations possibles que dans le groupe localisé par rapport auquel elle se produit.
On est donc amené à se demander quels sont les indicateurs, dans le texte littéraire et particulièrement au niveau des personnages, de cette érotique de la différence qu'on vient de voir comme fondatrice de l’écriture. La femme et l’émigré seront de ce fait, si l’on part d’une logique sociologique, des indicateurs privilégiés, en quelque sorte, a priori. Mais la description de ces indicateurs et de leur inscription dans les textes nous amènera aussi à nous interroger sur le bien-fondé du concept de différence, dans l’acceptation de double clôture qui lui est donnée le plus souvent. Les deux pôles de l’érotique spatiale du fonctionnement littéraire maghrébin doivent-ils être opposés de façon aussi catégorique que ne le font les lectures sociologiques les plus courantes ? N’y a-t-il pas, pour chacun de ces indicateurs, une situation par rapport à leur espace culturel emblématique, que l’on pourrait qualifier d’intériorité et d’extériorité à la fois ? Intériorité-extériorité qui récusera donc les clivages trop tranchés que suppose une perception réductrice de la différence, pour installer au contraire une productivité de l’ambigu, du mixte, de l’interfécondation en laquelle on pourra voir une des conditions du surgissement du texte, et peut-être plus généralement de toute créativité sociale ou culturelle. On proposera donc comme concept provisoire, pour désigner cette bi-spatialité ambiguë hors de la catégorisation rigide généralement liée encore au concept de différence, celui d’étrangeté qui, certes, ne vaut guère mieux, mais signale du moins, parce qu’inhabituel, que la perception de ce qu’il désigne est problématique. À y bien réfléchir pourtant, il s’agit peut-être moins de produire un nouveau concept, ou de nouvelles certitudes, que de déstabiliser un champ conceptuel dont la logique semblerait plus cumulative que critique.
L’absence de l’émigré
La société maghrébine fournit un personnage qui pourrait incarner cet « intérieur-extérieur » que représente aussi le genre romanesque par rapport au champ emblématique « Maghreb » : l’émigré. Car s’il vit en dehors de l’espace géographique « Maghreb », l’émigré fait partie intégrante du vécu social maghrébin : quel est le village, quelle est la famille qui n’en compte pas ? Et de plus on a coutume de définir l’émigration-immigration à partir de critères identitaires qui renvoient le plus souvent à la « Société d'origine », ou à la « Culture d’origine ». Mais force est de constater la quasi-absence de l’émigré comme objet principal de la narration romanesque maghrébine de langue française. Si, en 1955, Les Boucs de Driss Chraïbi y est en partie consacré, il faudra attendre Topographie idéale pour une agression caractérisée de Boudjedra, en 1975, pour en retrouver le thème. Mais dans l’intervalle l’écriture romanesque maghrébine de langue française aura abandonné le projet descriptif de ses débuts, pour s’interroger davantage sur son signifiant que sur son signifié. La marge sociale de l’émigration peut donc lui fournir un cadre-prétexte à une écriture de la marge, ou dans la marge. Espace aphasique en littérature, l’émigration-immigration sera dès lors une sorte de creuset, de laboratoire d’écriture. Mais elle ne sera pas, à proprement parler, décrite. Elle reste ce que j’ai appelé ailleurs un indicible de la littérature et de l’idéologie maghrébines. Aussi les textes d’écrivains maghrébins consacrés qui situent leur parole au plus profond du vécu intime de l’émigré, La Réclusion solitaire de Tahar Ben Jelloun et Habel de Mohammed Dib (1976 et 1977), sont-ils également ceux qui semblent le plus s’en éloigner, dans une recherche métaphysique sur la parole et ses prolongements qu’une perception sociologique de l’émigration n’irait pas y chercher. Quant aux romans que commence à produire depuis quelques années ce qu’on appelle la « deuxième génération », ou encore « les beurs », leur retour à l’autobiographie non-distanciée, leur narration descriptive « plate » et leur fréquente mise en cause d’une définition identitaire à partir de « cultures d'origine » dans lesquelles leurs auteurs ne se reconnaissent plus, met en cause, plus profondément, la notion même de littérature. L’« intériorité-extériorité », l’un par rapport à l’autre, du champ du roman maghrébin et de celui de l’émigration est donc peut-être bien en pleine crise : celle-là même que devait inévitablement produire une trop longue assimilation de la production littéraire à des définitions identitaires idéologiques figées ? À force d’ignorer un référent inclassable selon les catégories descriptives consacrées, le roman maghrébin comme l’idéologie maghrébine, comme plus généralement une perception de l’interculturel à base de « différence » se sont peut-être bien laissés définitivement distancier par un référent têtu, créateur depuis peu d’une expression qui leur échappe.
Personnages féminins
Rien de tel pour le personnage féminin, qui semble bien au contraire participer dès ses débuts à l’élaboration même du texte romanesque maghrébin. On n’en sera cependant pas surpris si l’on considère, d’une part, que c’est là une constante de toute tradition romanesque, par rapport à laquelle le roman maghrébin montre relativement moins de personnages féminins. Et d’autre part, à la différence de l’émigré, le personnage féminin ne représente pas a priori de rupture de l’espace géographique emblématique « Maghreb ». Sauf, pourtant, s’il s’agit d’une femme étrangère, une amante française par exemple, auquel cas la différence culturelle surajoutée risquerait bien, par sa surcharge précodée, de camoufler l’étrangeté sexuelle plus difficilement dicible ?
Dans la plupart des romans « traditionnels », quel que soit leur référent culturel, la protagoniste féminine est bien souvent celle qui permet l’intrigue romanesque, fréquemment amoureuse. Dans le roman maghrébin, ce type d’intrigue se trouve surtout dans des textes à facture « classique », comme certains romans « ethnographiques » des années cinquante, ou encore des romans dits de l’« acculturation » dans les années qui suivent. Or, non seulement ces romans ne sont pas les plus nombreux dans l’ensemble de cette production, mais de plus on va progressivement voir le protagoniste féminin quitter, avec l’intrigue amoureuse qui lui est liée, le noyau de l’action narrée, pour devenir, à l’extérieur de cette action proprement dite, l’auditrice privilégiée à laquelle l’histoire est racontée. Le personnage féminin, dans des écritures un peu plus maîtrisées que celles des débuts du roman maghrébin, deviendra aussi destinataire supposé de la narration romanesque, laquelle deviendra à son tour parole problématique. Récit suspendu, comme celui de Schéhérazade, à la relation du narrateur et du destinataire de cette narration. À moins que ce ne soit le contraire, ou à moins encore que la relation amoureuse ne soit le récit même, que l’étrangeté et le dire se confondent.
Le roman le plus connu pour illustrer ce schéma est bien sûr La Répudiation de Rachid Boudjedra (1969). Le récit plus ou moins autobiographique du narrateur y est en effet explicitement présenté comme narré à l’amante étrangère. De plus, la progression chaotique de ce récit comme son existence même sont inséparables de l’évolution de la relation sexuelle du narrateur, Rachid, avec Céline. L’érotique du texte, de la narration, que soulignaient à la même époque bien des essais universitaires français ou américains, est ainsi - et avec quelque lourdeur, ce qui n’empêcha pas le succès de scandale du livre - directement montrée, débarrassée de tout mystère... Or cette différence sexuelle du narrateur et de l’allocutaire de son récit est aussi différence culturelle, que souligne le roman en commençant la narration autobiographique par le récit de ce qui manifeste la plus grande différence culturelle entre ces protagonistes : le Ramadhan. Cette différence culturelle exhibée souligne donc encore plus la tension, déjà lourde dans le roman, de l’érotique textuelle qui le fonde. Elle souligne également la rupture de l’écriture romanesque en tant que telle avec la clôture de la culture traditionnelle : dans quelle mesure le surgissement du moi autobiographique en rupture avec cette clôture n’a-t-il pas besoin de l’étai de la double différence introduite par Céline ? Mais ce dédoublement de la différence sexuelle de l’allocutaire peut apparaître aussi comme une surcharge inutile, une redondance qui souligne peut-être surtout, y compris par sa lourdeur « pédagogique », la dépendance de fait de La Répudiation par rapport à une lecture française de l’écriture maghrébine.
Charles BONN, Université Lyon 2
Le libellé « littérature maghrébine de langue française » indique un double espace de fonctionnement littéraire. Il installe d’emblée une spatialisation, et signale le désir de l’Autre, à travers sa lecture, comme l’un des fondements de la tension dynamique autour de laquelle se constitue l’écriture. Abdelkébir Khatibi ne disait-il pas, dans La Mémoire Tatouée, « Quand je danse devant toi, Occident, sache que cette danse est de désir mortel » ?
Pourtant cette tension, qui installe l’érotique du texte, n’est pas propre au roman maghrébin. Toute littérature s’écrit nécessairement en dialogue désirant avec son lecteur, et avec tous les textes diffus ou précis qui composent à l’écriture une sorte d’écran, de scène, où elle les convoque tour à tour. Mais en ce qui concerne le champ littéraire maghrébin, du fait de son Histoire, il faudra nécessairement tenir compte à la fois d’un double espace géographique référentiel, d’une lecture doublement localisée, facteur d’une attente également double, et d’une inscription de ce double espace dans le texte. On se trouvera donc devant des textes à l’identité littéraire et culturelle problématique, à supposer cependant que l’on puisse parler de l’identité d’un texte littéraire. La question de l’identité du texte écrit doit être en effet relativisée, si l’on considère qu’un tel texte, principalement lorsqu'il s’agit d’un roman, s’écrit toujours par rapport à une ubiquité de sa lecture comme de ses référents littéraires, à la différence par exemple de la tradition orale, qui ne rencontre la totalité de ses significations possibles que dans le groupe localisé par rapport auquel elle se produit.
On est donc amené à se demander quels sont les indicateurs, dans le texte littéraire et particulièrement au niveau des personnages, de cette érotique de la différence qu'on vient de voir comme fondatrice de l’écriture. La femme et l’émigré seront de ce fait, si l’on part d’une logique sociologique, des indicateurs privilégiés, en quelque sorte, a priori. Mais la description de ces indicateurs et de leur inscription dans les textes nous amènera aussi à nous interroger sur le bien-fondé du concept de différence, dans l’acceptation de double clôture qui lui est donnée le plus souvent. Les deux pôles de l’érotique spatiale du fonctionnement littéraire maghrébin doivent-ils être opposés de façon aussi catégorique que ne le font les lectures sociologiques les plus courantes ? N’y a-t-il pas, pour chacun de ces indicateurs, une situation par rapport à leur espace culturel emblématique, que l’on pourrait qualifier d’intériorité et d’extériorité à la fois ? Intériorité-extériorité qui récusera donc les clivages trop tranchés que suppose une perception réductrice de la différence, pour installer au contraire une productivité de l’ambigu, du mixte, de l’interfécondation en laquelle on pourra voir une des conditions du surgissement du texte, et peut-être plus généralement de toute créativité sociale ou culturelle. On proposera donc comme concept provisoire, pour désigner cette bi-spatialité ambiguë hors de la catégorisation rigide généralement liée encore au concept de différence, celui d’étrangeté qui, certes, ne vaut guère mieux, mais signale du moins, parce qu’inhabituel, que la perception de ce qu’il désigne est problématique. À y bien réfléchir pourtant, il s’agit peut-être moins de produire un nouveau concept, ou de nouvelles certitudes, que de déstabiliser un champ conceptuel dont la logique semblerait plus cumulative que critique.
L’absence de l’émigré
La société maghrébine fournit un personnage qui pourrait incarner cet « intérieur-extérieur » que représente aussi le genre romanesque par rapport au champ emblématique « Maghreb » : l’émigré. Car s’il vit en dehors de l’espace géographique « Maghreb », l’émigré fait partie intégrante du vécu social maghrébin : quel est le village, quelle est la famille qui n’en compte pas ? Et de plus on a coutume de définir l’émigration-immigration à partir de critères identitaires qui renvoient le plus souvent à la « Société d'origine », ou à la « Culture d’origine ». Mais force est de constater la quasi-absence de l’émigré comme objet principal de la narration romanesque maghrébine de langue française. Si, en 1955, Les Boucs de Driss Chraïbi y est en partie consacré, il faudra attendre Topographie idéale pour une agression caractérisée de Boudjedra, en 1975, pour en retrouver le thème. Mais dans l’intervalle l’écriture romanesque maghrébine de langue française aura abandonné le projet descriptif de ses débuts, pour s’interroger davantage sur son signifiant que sur son signifié. La marge sociale de l’émigration peut donc lui fournir un cadre-prétexte à une écriture de la marge, ou dans la marge. Espace aphasique en littérature, l’émigration-immigration sera dès lors une sorte de creuset, de laboratoire d’écriture. Mais elle ne sera pas, à proprement parler, décrite. Elle reste ce que j’ai appelé ailleurs un indicible de la littérature et de l’idéologie maghrébines. Aussi les textes d’écrivains maghrébins consacrés qui situent leur parole au plus profond du vécu intime de l’émigré, La Réclusion solitaire de Tahar Ben Jelloun et Habel de Mohammed Dib (1976 et 1977), sont-ils également ceux qui semblent le plus s’en éloigner, dans une recherche métaphysique sur la parole et ses prolongements qu’une perception sociologique de l’émigration n’irait pas y chercher. Quant aux romans que commence à produire depuis quelques années ce qu’on appelle la « deuxième génération », ou encore « les beurs », leur retour à l’autobiographie non-distanciée, leur narration descriptive « plate » et leur fréquente mise en cause d’une définition identitaire à partir de « cultures d'origine » dans lesquelles leurs auteurs ne se reconnaissent plus, met en cause, plus profondément, la notion même de littérature. L’« intériorité-extériorité », l’un par rapport à l’autre, du champ du roman maghrébin et de celui de l’émigration est donc peut-être bien en pleine crise : celle-là même que devait inévitablement produire une trop longue assimilation de la production littéraire à des définitions identitaires idéologiques figées ? À force d’ignorer un référent inclassable selon les catégories descriptives consacrées, le roman maghrébin comme l’idéologie maghrébine, comme plus généralement une perception de l’interculturel à base de « différence » se sont peut-être bien laissés définitivement distancier par un référent têtu, créateur depuis peu d’une expression qui leur échappe.
Personnages féminins
Rien de tel pour le personnage féminin, qui semble bien au contraire participer dès ses débuts à l’élaboration même du texte romanesque maghrébin. On n’en sera cependant pas surpris si l’on considère, d’une part, que c’est là une constante de toute tradition romanesque, par rapport à laquelle le roman maghrébin montre relativement moins de personnages féminins. Et d’autre part, à la différence de l’émigré, le personnage féminin ne représente pas a priori de rupture de l’espace géographique emblématique « Maghreb ». Sauf, pourtant, s’il s’agit d’une femme étrangère, une amante française par exemple, auquel cas la différence culturelle surajoutée risquerait bien, par sa surcharge précodée, de camoufler l’étrangeté sexuelle plus difficilement dicible ?
Dans la plupart des romans « traditionnels », quel que soit leur référent culturel, la protagoniste féminine est bien souvent celle qui permet l’intrigue romanesque, fréquemment amoureuse. Dans le roman maghrébin, ce type d’intrigue se trouve surtout dans des textes à facture « classique », comme certains romans « ethnographiques » des années cinquante, ou encore des romans dits de l’« acculturation » dans les années qui suivent. Or, non seulement ces romans ne sont pas les plus nombreux dans l’ensemble de cette production, mais de plus on va progressivement voir le protagoniste féminin quitter, avec l’intrigue amoureuse qui lui est liée, le noyau de l’action narrée, pour devenir, à l’extérieur de cette action proprement dite, l’auditrice privilégiée à laquelle l’histoire est racontée. Le personnage féminin, dans des écritures un peu plus maîtrisées que celles des débuts du roman maghrébin, deviendra aussi destinataire supposé de la narration romanesque, laquelle deviendra à son tour parole problématique. Récit suspendu, comme celui de Schéhérazade, à la relation du narrateur et du destinataire de cette narration. À moins que ce ne soit le contraire, ou à moins encore que la relation amoureuse ne soit le récit même, que l’étrangeté et le dire se confondent.
Le roman le plus connu pour illustrer ce schéma est bien sûr La Répudiation de Rachid Boudjedra (1969). Le récit plus ou moins autobiographique du narrateur y est en effet explicitement présenté comme narré à l’amante étrangère. De plus, la progression chaotique de ce récit comme son existence même sont inséparables de l’évolution de la relation sexuelle du narrateur, Rachid, avec Céline. L’érotique du texte, de la narration, que soulignaient à la même époque bien des essais universitaires français ou américains, est ainsi - et avec quelque lourdeur, ce qui n’empêcha pas le succès de scandale du livre - directement montrée, débarrassée de tout mystère... Or cette différence sexuelle du narrateur et de l’allocutaire de son récit est aussi différence culturelle, que souligne le roman en commençant la narration autobiographique par le récit de ce qui manifeste la plus grande différence culturelle entre ces protagonistes : le Ramadhan. Cette différence culturelle exhibée souligne donc encore plus la tension, déjà lourde dans le roman, de l’érotique textuelle qui le fonde. Elle souligne également la rupture de l’écriture romanesque en tant que telle avec la clôture de la culture traditionnelle : dans quelle mesure le surgissement du moi autobiographique en rupture avec cette clôture n’a-t-il pas besoin de l’étai de la double différence introduite par Céline ? Mais ce dédoublement de la différence sexuelle de l’allocutaire peut apparaître aussi comme une surcharge inutile, une redondance qui souligne peut-être surtout, y compris par sa lourdeur « pédagogique », la dépendance de fait de La Répudiation par rapport à une lecture française de l’écriture maghrébine.
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