Bien que la littérature africaine ait pour supports linguistiques essentiels les quatre principales langues du continent- à savoir l’arabe, le français, l’anglais et le portugais- langues héritées de l’histoire tourmentée du continent et des différentes colonisations, il n’en demeure pas moins que la littérature la plus médiatisée, celle qui a fait plus parler d’elle, est la littérature francophone.
Dans cette dernière, il est né un courant et une philosophie littéraires qui se sont longtemps imposée sur la scène culturelle par la défense d’un certain nombre de principes esthétiques et culturels spécifiquement africains, par lesquels ce courant entendait entrer dans l’universalité.
Il s’agit, bien entendu, de la littérature négro-africaine qui a défini et défendu le principe de négritude. L’école française qui s’est établie dans l’AOF et l’AEF (Afrique occidentale française et Afrique équatoriale française), comme celle, établie à Ath Yenni, à Aït Hichem et à Ighil Ali. a école a formé des générations d’élèves qui - en passant entre les mailles de la discrimination et du code de l’indigénat - sont devenus des cadres et des intellectuels dont l’outil de travail et d’expression est le français.
Les partisans du nationalisme le plus étriqué avaient parlé d’aliénation culturelle et d’acculturation à propos de cette génération qui a pourtant fait sienne les revendications d’indépendance et de libération de leurs peuples respectifs.
Césaire et la négritude
Le mot "négritude" est un néologisme qu’Aimé Césaire a employé pour la première fois en 1939 dans son "Cahier d’un retour au pays natal". « La négritude, dit-il, est la simple reconnaissance du fait d’être noir, et l’acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture ». Lilyan Kesteloot, dans son ‘’Anthologie négro-africaine’’ (marabout, 1978), définit la négritude comme « la façon dont les négro-africains comprennent l’univers, c’est-à-dire le monde qui les entoure, la nature, les gens, les évènements : c’est aussi la façon dont ils créent ». Le mouvement de négritude et la littérature négro-africaine ont connu un sort florissant et se sont vraiment universalisés avec le grand écrivain et ancien président de la République du Sénégal, membre de l’académie française, Leopold Sedar Senghor, comme aussi avec des écrivains de grand talent comme Mongo Betti, Camara Laye, Edouard Glissant (préfacier de "Nedjma" de K. Yacine), Sembene Ousmane, René Depestre,... etc.
Senghor : négritude et francité
Après son départ volontaire de la présidence de la République du Sénégal, L. S. Senghor publia en 1988 ‘’Ce que je crois’’ (éd. Grasset). Il dira, dans un entretien avec le magazine Arabies qu’il s’était toujours intéressé à la culture depuis ses études ; études qui l’ont porté vers les humanités gréco-latines.
Il pense aussi que la négritude et la francité sont des univers complémentaires. « La négritude est essentiellement fondée sur la sensibilité noire, tandis que la francité, c’est essentiellement l’esprit de méthode et d’organisation hérités de l’humanisme gréco-latin (...) nous essayons au Sénégal d’assumer ces deux univers. Avant de partir (de la présidence), j’ai jeté les fondements des nouvelles méthodes d’enseignement. J’ai, pendant les six ans de mes études primaires appris à lire et à écrire en français et en Wolof. Ensuite, pendant les sept années de mes études secondaires, j’ai mené de front l’étude du français, du latin et du grec. Et, bien, je préconise cette méthode contrastive. Il s’agit de s’enraciner dans la négritude pour s’ouvrir aux valeurs complémentaires des civilisations européennes, singulièrement de la civilisation française ». Et il continue en disant : « Je voudrais que l’on fasse de la francophonie une civilisation de l’universel. La francophonie serait en somme une sorte de fédéralisme politico-culturel différent du commonwalth. Ce dernier s’occupe surtout d’économie. La francophonie, elle, s’occupera de culture plus que d’économie, voire de politique (...) Arthur Rimbaud définit la nouvelle poésie par des rythmes instinctifs et des répétitions qui ne se répètent pas. C’est exactement le style de la négritude. Et c’est cette rencontre de la poésie française, du génie français, avec la négritude qui est importante (...) depuis que nous avons adopté la négritude, nous sommes fiers de notre civilisation négro-africaine. N’ayant plus de complexe, nous avons également adopté, en symbiose, la francité, c’est-à-dire la civilisation française ». Dans une contribution à la grande revue ‘’Esprit’’ de septembre 1968, Senghor écrivait : « Je ne veux retenir, ici, que l’apport positif de la colonisation. L’ennemi d’hier est un complice qui nous a enrichi en s’enrichissant à notre contact ».
La culture kabyle et les lettres françaises
L’enseignement de la langue française en Kabylie remonte aux lois de Jules Ferry sur l’obligation et la gratuité de l’enseignement, et cela à partir des années 80 du 19e siècle. Des écoles ont été ouvertes en haute montagne des Ath Yenni, Ath Menguellet, les Aghribs, Ighil Ali,... etc. Quelles que fussent les raisons et les motivations qui ont poussé l’autorité coloniale à ouvrir de telles écoles, et les arrières-pensées d’acculturation ne manquaient pas, les jeunes kabyles qui ont pu accéder à ces établissements ont fourni des efforts immenses pour faire de cet enseignement un instrument de promotion sociale et de libération culturelle. Parmi ceux qui sont devenus eux mêmes des enseignants, une équipe a pu produire un journal de la corporation sous le titre « La Voix des Humbles » qui promet l’égalité et la fraternité entre les deux cultures kabyle et française.
La seconde étape de l’appropriation de la langue française était le passage à l’écriture littéraire, roman, poésie, conte, théâtre,... etc. Pour écrire en français, les écrivains kabyles de la première génération avaient pour première substrat la tradition orale kabyle d’une très grande richesse. D’ailleurs, une partie des travaux réalisés en français consistait en des traductions de poèmes et de contes, comme le cas de Si Saïd Boulifa qui était en même temps enseignant de langue kabyle. Le cas de Belkacem Ibazizène illustre une situation de biculturalité assumée et revendiquée en parlant du mariage de la berbérité avec la "francité".
Il occupait, disait-il, la position de "l’homme-frontière" entre les deux cultures. On peut dire que Ibazizène serait le "versant kabyle" de la négritude promue par L. S. Senghor.
Dans cette dernière, il est né un courant et une philosophie littéraires qui se sont longtemps imposée sur la scène culturelle par la défense d’un certain nombre de principes esthétiques et culturels spécifiquement africains, par lesquels ce courant entendait entrer dans l’universalité.
Il s’agit, bien entendu, de la littérature négro-africaine qui a défini et défendu le principe de négritude. L’école française qui s’est établie dans l’AOF et l’AEF (Afrique occidentale française et Afrique équatoriale française), comme celle, établie à Ath Yenni, à Aït Hichem et à Ighil Ali. a école a formé des générations d’élèves qui - en passant entre les mailles de la discrimination et du code de l’indigénat - sont devenus des cadres et des intellectuels dont l’outil de travail et d’expression est le français.
Les partisans du nationalisme le plus étriqué avaient parlé d’aliénation culturelle et d’acculturation à propos de cette génération qui a pourtant fait sienne les revendications d’indépendance et de libération de leurs peuples respectifs.
Césaire et la négritude
Le mot "négritude" est un néologisme qu’Aimé Césaire a employé pour la première fois en 1939 dans son "Cahier d’un retour au pays natal". « La négritude, dit-il, est la simple reconnaissance du fait d’être noir, et l’acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture ». Lilyan Kesteloot, dans son ‘’Anthologie négro-africaine’’ (marabout, 1978), définit la négritude comme « la façon dont les négro-africains comprennent l’univers, c’est-à-dire le monde qui les entoure, la nature, les gens, les évènements : c’est aussi la façon dont ils créent ». Le mouvement de négritude et la littérature négro-africaine ont connu un sort florissant et se sont vraiment universalisés avec le grand écrivain et ancien président de la République du Sénégal, membre de l’académie française, Leopold Sedar Senghor, comme aussi avec des écrivains de grand talent comme Mongo Betti, Camara Laye, Edouard Glissant (préfacier de "Nedjma" de K. Yacine), Sembene Ousmane, René Depestre,... etc.
Senghor : négritude et francité
Après son départ volontaire de la présidence de la République du Sénégal, L. S. Senghor publia en 1988 ‘’Ce que je crois’’ (éd. Grasset). Il dira, dans un entretien avec le magazine Arabies qu’il s’était toujours intéressé à la culture depuis ses études ; études qui l’ont porté vers les humanités gréco-latines.
Il pense aussi que la négritude et la francité sont des univers complémentaires. « La négritude est essentiellement fondée sur la sensibilité noire, tandis que la francité, c’est essentiellement l’esprit de méthode et d’organisation hérités de l’humanisme gréco-latin (...) nous essayons au Sénégal d’assumer ces deux univers. Avant de partir (de la présidence), j’ai jeté les fondements des nouvelles méthodes d’enseignement. J’ai, pendant les six ans de mes études primaires appris à lire et à écrire en français et en Wolof. Ensuite, pendant les sept années de mes études secondaires, j’ai mené de front l’étude du français, du latin et du grec. Et, bien, je préconise cette méthode contrastive. Il s’agit de s’enraciner dans la négritude pour s’ouvrir aux valeurs complémentaires des civilisations européennes, singulièrement de la civilisation française ». Et il continue en disant : « Je voudrais que l’on fasse de la francophonie une civilisation de l’universel. La francophonie serait en somme une sorte de fédéralisme politico-culturel différent du commonwalth. Ce dernier s’occupe surtout d’économie. La francophonie, elle, s’occupera de culture plus que d’économie, voire de politique (...) Arthur Rimbaud définit la nouvelle poésie par des rythmes instinctifs et des répétitions qui ne se répètent pas. C’est exactement le style de la négritude. Et c’est cette rencontre de la poésie française, du génie français, avec la négritude qui est importante (...) depuis que nous avons adopté la négritude, nous sommes fiers de notre civilisation négro-africaine. N’ayant plus de complexe, nous avons également adopté, en symbiose, la francité, c’est-à-dire la civilisation française ». Dans une contribution à la grande revue ‘’Esprit’’ de septembre 1968, Senghor écrivait : « Je ne veux retenir, ici, que l’apport positif de la colonisation. L’ennemi d’hier est un complice qui nous a enrichi en s’enrichissant à notre contact ».
La culture kabyle et les lettres françaises
L’enseignement de la langue française en Kabylie remonte aux lois de Jules Ferry sur l’obligation et la gratuité de l’enseignement, et cela à partir des années 80 du 19e siècle. Des écoles ont été ouvertes en haute montagne des Ath Yenni, Ath Menguellet, les Aghribs, Ighil Ali,... etc. Quelles que fussent les raisons et les motivations qui ont poussé l’autorité coloniale à ouvrir de telles écoles, et les arrières-pensées d’acculturation ne manquaient pas, les jeunes kabyles qui ont pu accéder à ces établissements ont fourni des efforts immenses pour faire de cet enseignement un instrument de promotion sociale et de libération culturelle. Parmi ceux qui sont devenus eux mêmes des enseignants, une équipe a pu produire un journal de la corporation sous le titre « La Voix des Humbles » qui promet l’égalité et la fraternité entre les deux cultures kabyle et française.
La seconde étape de l’appropriation de la langue française était le passage à l’écriture littéraire, roman, poésie, conte, théâtre,... etc. Pour écrire en français, les écrivains kabyles de la première génération avaient pour première substrat la tradition orale kabyle d’une très grande richesse. D’ailleurs, une partie des travaux réalisés en français consistait en des traductions de poèmes et de contes, comme le cas de Si Saïd Boulifa qui était en même temps enseignant de langue kabyle. Le cas de Belkacem Ibazizène illustre une situation de biculturalité assumée et revendiquée en parlant du mariage de la berbérité avec la "francité".
Il occupait, disait-il, la position de "l’homme-frontière" entre les deux cultures. On peut dire que Ibazizène serait le "versant kabyle" de la négritude promue par L. S. Senghor.
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