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Yamina Benguigui "9/3, mémoire d'un territoire"

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  • Yamina Benguigui "9/3, mémoire d'un territoire"

    Yamina Benguigui, née à Lille de parents algériens, construit une oeuvre tournée sur l'histoire des immigrés en France. Elle s'est fait connaître notamment par son documentaire Mémoires d'immigrés, l'héritage maghrébin, réalisé en 1998 pour Canal+ et largement diffusé en salles. Dans Le Plafond de verre (2005), elle étudie les discriminations à l'embauche subies par les jeunes Français d'origine étrangère. Elle a réalisé Aïcha, une série de fiction pour France 2. En mars, elle a été élue à la Mairie de Paris, sur la liste de Bertrand Delanoë.

    Votre film se termine par un hommage aux deux jeunes qui sont morts électrocutés dans un transformateur en fuyant des policiers en 2005, et s'ouvre par les images des émeutes qui ont suivi. Pourquoi ?

    Lors de ces événements, la question de l'histoire de ce territoire n'a pas été abordée. J'ai pensé qu'il fallait prendre le temps de replonger dans la mémoire et traiter les émeutes comme une longue nuit des désespérés, sans qu'on entende les mots de "Kärcher" ou de "racaille". Je voyais une terre malade, oubliée par la France depuis le XIXe siècle, un continent qui se détache à la dérive. Après deux années de travail sur ce documentaire, je me suis trouvée avec 155 heures de rushes et de quoi faire quatre heures de film ! Je finissais par avoir l'impression que cette terre allait m'engloutir et j'ai décidé d'ordonner le film autour de trois axes, le logement, l'industrie, les populations.

    A cette jeune génération des émeutes, que souhaitez-vous dire ?

    Je veux leur dire qu'à la discrimination sociale - on mettait tous les pauvres ensemble dans ce nord-est de Paris - a succédé la discrimination raciale. Dire à ces jeunes, Blacks et Arabes en majorité, que leurs arrière-grands-pères virtuels étaient Bretons, Auvergnats, Espagnols, qu'ils ont chèrement payé pour la modernisation de la France.

    Vous dénoncez les responsabilités de l'Etat. Votre film est-il une charge politique ?

    C'est le film le plus politique que j'aie jamais fait et je suis toujours en colère. Ces dernières années, on a redoré le ghetto, c'est tout. Mon but est de contribuer à faire cesser cette relégation. Un ghetto, ce ne sont pas des gens qui s'adorent et décident de se mettre ensemble ! En réalité, c'est une marginalisation organisée, une discrimination raciale.

    J'ai fait ce film pour ouvrir le débat et pour rendre hommage à tous ces héros du 93, comme on rend hommage aux héros de Verdun. Leur condition, c'était Les Temps modernes. Il a fallu en passer par là pour que le monde entre dans la modernité. Il faudrait que l'Etat reconnaisse que ce poumon européen de l'industrie a été un territoire sacrifié.

    Par Le Monde
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