Le patrimoine musical populaire est rehaussé par un festival qui porte le nom de Aïssa
El Djarmouni. Le troubadour au bendir, premier artiste arabe à se produire sur la scène de l’Olympia, a enflammé de sa voix puissante plusieurs générations par ses litanies et ses complaintes chaouies
«Aïssa El Djarmouni mérite amplement qu’on donne son nom à un festival national consacré au patrimoine musical populaire», a affirmé la ministre de la Culture, Khalida, lundi dernier à l’occasion de l’ouverture officielle du Festival national Aïssa El Djarmouni, à la maison de la culture Nouar Boubakeur d’Oum El Bouaghi.
Dans son allocution d’ouverture, la ministre a souligné l’importance occupée par Aïssa El Djarmouni dans la chanson algérienne et le patrimoine culturel national ayant marqué le début du siècle dernier.
Un art, précise Mme Toumi, «dont les racines se nourrissent des profondeurs du terroir, mais dont la vocation nationale ne faisait aucun doute, compte tenu de son influence exceptionnelle et des thèmes qu’il traitait dans ses chansons».
Elle dira également que Aïssa El Djarmouni El Harkati qui «a porté très haut la voix de la société rurale écrasée par la colonisation, en exprimant ses inquiétudes, ses espoirs et ses souffrances, fait partie des grands artistes en lesquels se reconnaît le peuple dans ses différentes composantes.
A l’image de ceux qui viendront ensuite, comme Akli Yahiaten, Slimane Azzam, Ali Maachi, Abderrahmane Aziz et bien d’autres noms ayant su exprimer des facettes de notre personnalité, ou illustrer un aspect de notre conscience nationale».
Mme Toumi a aussi mis en exergue «la voix puissante de ce météore de la chanson rifie».
Une voix, a estimé la ministre, qui a accompagné les événements majeurs de cette partie de notre histoire nationale, le refus de la conscription des Algériens durant la Première Guerre mondiale, la révolte dans les Aurès en 1916, l’épopée des «bandits d’honneur» qui commençait alors, avec Messaoud Benzelmat, élevé au rang de héros national dans la chanson Ekker Ennouguir, les affres de la Seconde Guerre mondiale, les épreuves de la répression du 8 Mai 1945, de la famine et des épidémies qui n’épargnèrent pas Aïssa El Djarmouni lui-même, mort prématurément en 1946, à l’âge de 66 ans.
Parmi les artistes invités au Festival national Aïssa El Djarmouni, Abdelhamid Bouzaher, choisi pour interpréter le film que consacra en 1987 Abderrezak Hella à Djermouni. a confié que «nul ne peut prétendre, à mon avis, représenter ou remplacer Aïssa El Djarmouni que je qualifie de véritable phénomène miraculeux, dans la musique nationale du 20ème siècle. De par la puissance extraordinaire de sa voix, son intelligence artistique, la sensibilité de son expression traduisant admirablement les moindres vibrations de la société de son époque». Il ajoute : «Il avait un don, une poitrine et un souffle d’une puissance extraordinaire jamais vus depuis, sa voix portait à quatre km.»
Selon la biographie établie par l’Association des amis de l’art et de la culture de la wilaya d’Oum El Bouaghi, Aïssa El Djarmouni El Harkati est né en 1886 à Sidi R’ghis près d’Oum El Bouaghi. Berger privé d’aller à l’école, il apprit à chanter en gardant son troupeau. Ses flûtistes étaient Hadj Mohamed Benzine et Miloud Guenaïchi, Mohamed Benderradji était le «berrah», poète et animateur du groupe.
Un autre biographe explique que «Mtoussa est un petit village enneigé, situé au nord-est de la ville de Aïn El Beïda et au sud-ouest de Khenchela, avec un alignement de maisons précaires le long de la grande piste, des touffes de chaume pourri perçant la couche de neige recouvrant les toits. Certaines masures n’ont pas de cheminée, la fumée s’échappe par la porte, par les meurtrières basses et les fausses fenêtres entrebâillées. C’est là que naît en 1886 Merzougui Aïssa, dit Djermouni El Harkati» Aïssa Djermouni a commencé à chanter en 1910 et a sillonné toute l’Algérie et le Maghreb. Il enregistra des disques à Tunis et Paris dans les années 1930. En 1930, c’est la consécration en France où il enregistre plus de 35 chansons en 78 tours chez «Haroun José Edition». Il a déjà plus de 120 chansons dans son répertoire.
Le troubadour chaoui, aux cheveux noirs, au regard ferme et énergique, à la moustache portée à la turque, va en 1937 enflammer l’Olympia avec ses chansons Akerr Anouguir, Salef dhaberkane, Hill li ma
aandouche wali, Aïn El Karma, Ma tgoulou dhelou. L’anecdote raconte que Djarmouni s’est passé de la sonorisation de la salle, il demanda simplement de quoi chauffer les percussions bendir qui accompagnaient ses deux flûtistes. C’est la naissance d’un véritable mythe qui se poursuivra au-delà de sa mort survenue le 16 juin 1946 à Constantine. Il fut enterré à Sidi Rghiss à Oum El Bouaghi, Soixante ans après sa disparition, ses chansons émeuvent encore le cœur des habitants des Hauts Plateaux, où Aïn El Karma demeure la fierté des indomptables chaouis.
S. B.
© Copyright La Tribune d'Algerie
El Djarmouni. Le troubadour au bendir, premier artiste arabe à se produire sur la scène de l’Olympia, a enflammé de sa voix puissante plusieurs générations par ses litanies et ses complaintes chaouies
«Aïssa El Djarmouni mérite amplement qu’on donne son nom à un festival national consacré au patrimoine musical populaire», a affirmé la ministre de la Culture, Khalida, lundi dernier à l’occasion de l’ouverture officielle du Festival national Aïssa El Djarmouni, à la maison de la culture Nouar Boubakeur d’Oum El Bouaghi.
Dans son allocution d’ouverture, la ministre a souligné l’importance occupée par Aïssa El Djarmouni dans la chanson algérienne et le patrimoine culturel national ayant marqué le début du siècle dernier.
Un art, précise Mme Toumi, «dont les racines se nourrissent des profondeurs du terroir, mais dont la vocation nationale ne faisait aucun doute, compte tenu de son influence exceptionnelle et des thèmes qu’il traitait dans ses chansons».
Elle dira également que Aïssa El Djarmouni El Harkati qui «a porté très haut la voix de la société rurale écrasée par la colonisation, en exprimant ses inquiétudes, ses espoirs et ses souffrances, fait partie des grands artistes en lesquels se reconnaît le peuple dans ses différentes composantes.
A l’image de ceux qui viendront ensuite, comme Akli Yahiaten, Slimane Azzam, Ali Maachi, Abderrahmane Aziz et bien d’autres noms ayant su exprimer des facettes de notre personnalité, ou illustrer un aspect de notre conscience nationale».
Mme Toumi a aussi mis en exergue «la voix puissante de ce météore de la chanson rifie».
Une voix, a estimé la ministre, qui a accompagné les événements majeurs de cette partie de notre histoire nationale, le refus de la conscription des Algériens durant la Première Guerre mondiale, la révolte dans les Aurès en 1916, l’épopée des «bandits d’honneur» qui commençait alors, avec Messaoud Benzelmat, élevé au rang de héros national dans la chanson Ekker Ennouguir, les affres de la Seconde Guerre mondiale, les épreuves de la répression du 8 Mai 1945, de la famine et des épidémies qui n’épargnèrent pas Aïssa El Djarmouni lui-même, mort prématurément en 1946, à l’âge de 66 ans.
Parmi les artistes invités au Festival national Aïssa El Djarmouni, Abdelhamid Bouzaher, choisi pour interpréter le film que consacra en 1987 Abderrezak Hella à Djermouni. a confié que «nul ne peut prétendre, à mon avis, représenter ou remplacer Aïssa El Djarmouni que je qualifie de véritable phénomène miraculeux, dans la musique nationale du 20ème siècle. De par la puissance extraordinaire de sa voix, son intelligence artistique, la sensibilité de son expression traduisant admirablement les moindres vibrations de la société de son époque». Il ajoute : «Il avait un don, une poitrine et un souffle d’une puissance extraordinaire jamais vus depuis, sa voix portait à quatre km.»
Selon la biographie établie par l’Association des amis de l’art et de la culture de la wilaya d’Oum El Bouaghi, Aïssa El Djarmouni El Harkati est né en 1886 à Sidi R’ghis près d’Oum El Bouaghi. Berger privé d’aller à l’école, il apprit à chanter en gardant son troupeau. Ses flûtistes étaient Hadj Mohamed Benzine et Miloud Guenaïchi, Mohamed Benderradji était le «berrah», poète et animateur du groupe.
Un autre biographe explique que «Mtoussa est un petit village enneigé, situé au nord-est de la ville de Aïn El Beïda et au sud-ouest de Khenchela, avec un alignement de maisons précaires le long de la grande piste, des touffes de chaume pourri perçant la couche de neige recouvrant les toits. Certaines masures n’ont pas de cheminée, la fumée s’échappe par la porte, par les meurtrières basses et les fausses fenêtres entrebâillées. C’est là que naît en 1886 Merzougui Aïssa, dit Djermouni El Harkati» Aïssa Djermouni a commencé à chanter en 1910 et a sillonné toute l’Algérie et le Maghreb. Il enregistra des disques à Tunis et Paris dans les années 1930. En 1930, c’est la consécration en France où il enregistre plus de 35 chansons en 78 tours chez «Haroun José Edition». Il a déjà plus de 120 chansons dans son répertoire.
Le troubadour chaoui, aux cheveux noirs, au regard ferme et énergique, à la moustache portée à la turque, va en 1937 enflammer l’Olympia avec ses chansons Akerr Anouguir, Salef dhaberkane, Hill li ma
aandouche wali, Aïn El Karma, Ma tgoulou dhelou. L’anecdote raconte que Djarmouni s’est passé de la sonorisation de la salle, il demanda simplement de quoi chauffer les percussions bendir qui accompagnaient ses deux flûtistes. C’est la naissance d’un véritable mythe qui se poursuivra au-delà de sa mort survenue le 16 juin 1946 à Constantine. Il fut enterré à Sidi Rghiss à Oum El Bouaghi, Soixante ans après sa disparition, ses chansons émeuvent encore le cœur des habitants des Hauts Plateaux, où Aïn El Karma demeure la fierté des indomptables chaouis.
S. B.
© Copyright La Tribune d'Algerie
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