Voilà une question qui ne sera pas débattue chez Delarue ou Calvi ni même chez Bern dans L’Arène de France. Imaginez Yan Moix ou Frédéric Mitterrand causer sur le summer of love et les mérites respectifs de Jagger et Plant. Un vrai cauchemar. Qui n’aura pas lieu et c’est une bonne nouvelle. Autre bonne nouvelle, L’Arène de France est supprimée, on ne verra plus Stéphane Bern. Stones ou Led Zep ? Pensez-y, c’est l’été, quand on danse un slow avec une dame, cette question atteste d’une certaine originalité, signant une jeunessitude que les moins de 40 ans n’ont pas connue. Mais il n’y a plus de slow, la sono est devenue trop forte. Es-tu Stones ou Led Zep ? Quoi ? Oui, je suis sourd, c’est ce que tu me demandais !
En vérité, cette question, quelques-uns la posent de temps à autre, dans des conversations entre vieux quadragénaires et jeunes quinquagénaires. Les Stones et Led Zep sont de la même époque, du moins c’est ce que l’on croit. Disons que les jeunes gens de 1970 écoutaient autant les premiers que les seconds, mais les Stones semblaient avoir fait leur temps, contrairement à Led Zep qui en l’espace de trois ans, allait transpercer la scène rock pour réaliser quatre albums retentissants, assortis de prestations scéniques impressionnantes, d’autant plus que la puissance des amplis était à la hauteur des barres d’enceintes. Bref, la technique suivait le style et le plus grand groupe de rock, en 1972, c’était Led Zep, n’en déplaise aux fans des ineffables Stones, fatigués d’une fin des sixties peu glorieuse, marquée par Altamont, puis les trois J morts au champ d’honneur du front du rock, Janis, Jimmy et Jim. Vers 1971, les Stones ont sorti Sticky Fingers et Exile, deux moments de pur rock bien ficelé, travaillé, magistralement composé et exécuté avec un tandem Richard-Jagger aux commandes, mais sans doute ennuyeux eu égard à la folie des sixties, bref, loin d’être des chefs-d’œuvre comme l’a dit et répété une critiqué hébétée par le phénomène Stones. Par contre, Led Zep a sorti, entre 1969 et 1971, quatre bombes sur le label qui, dix ans auparavant, édita John Coltrane.
Le lecteur aura compris que je suis plus Led Zep et que je n’ai jamais été Stones, du moins dans le sens où ce billet l’entend, fan des Stones. Le seul album des Stones que j’apprécie vraiment est Satanic Majesty, le seul qui ne sonne pas vraiment Stones mais plus psyché. Dont le sens apparaîtra dans le film Performance où Jagger en flower power attitude, joue le rôle d’une star décadente initiant un truand en cavale aux délices des épices orientales. Les Stones évoquent une époque, une liberté, un esprit, un art, une attitude, mais question création musicale, ils ne tiennent pas la route face aux quatre musiciens de Led Zeppelin.
Ecoutez Black Dog par exemple, ce morceau de l’album IV représentant exactement le style de Led Zep. Des morceaux hachés, faits de ruptures, de séquences, de détours inattendus, avec la voix haut perchée de Robert Plant, la rythmique qu’on devine plus qu’efficace, ça cogne, à côté, Charlie Watts et Bill Wyman passent pour des musiciens de bal. Jimmy Page, subtil guitariste, aussi célèbre et céleste que son pair Blackmore de Deep Purple, bien plus fougueux que Clapton, aussi précis qu’Hendrix dans les écarts, du grand art que cette cavalerie musicale satellisant les incroyables vocalises de Robert Plant sur une orbite jupitérienne.
Les Stones ont appliqué la recette du blues américain et en sont même les héritiers assez appliqués, étrangement blancs pour assumer cette musique de black. Led Zep a emprunté au blues mais l’a transfiguré, un peu comme Magma et Christian Vander ont procédé face à Coltrane. Pour s’en convaincre on écoutera Dazed and Confused, surtout dans l’interprétation lors des sessions de la BBC et le live en Californie l’été 72, une version qui dépasse les 20 minutes. Sans oublier les medley exécuté sur un Whole Lotta Love dévoilant la démesure rythmique du tandem John Bonhan surdoué à la batterie, comme le sut très tôt Robert Plant, et John Paul Jones à la basse lancinante autant qu’éblouissante. C’est justement sur ce critère qu’on mesure ce qui sépare les Stones, archétypes du rock band british exécutant des bons morceaux de quatre minutes, de ces magiciens et musiciens de Led Zep capables d’improviser dix minutes et plus. Comme d’ailleurs les hérauts du krautrock allemand. Alors que dans le genre progressif, on ne lésine pas sur la durée. Parmi mes connaissances qui s’y entendent dans le prog, la plupart savent goûter du Led Zep, en bons connaisseurs de la quintessence de l’art à jouer et composer pour une formation de musique amplifiée. Mais aucun n’apprécie les Stones, sauf j’imagine pour agrémenter une réunion de seniors autour d’un barbecue.
De Led Zep, on conseillera évidemment les quatre premiers albums. Le cinquième, House of the Holy, se révèle plus subtil, traduisant un désir d’innovation, de rénovation, de rupture stylistique vers un genre plus travaillé et classieux, anticipé par le culte morceau Stairway to Heaven, somptueuse composition, qui débute comme un slow, finit en fureur, et qui pour quelques couples, rappelle une folle décadence d’un soir ayant signé un bail jusqu’à l’éternité. Viendra ensuite le double vinyl Physical Graffiti et son non moins somptueux morceaux Kashmir, aux ambiances arabisantes et « persantes », qu’on croirait émanées de la fusion de Black Sabbath et Khatchaturian.
Led Zep, bien plus prodigieux que les Stones qui, bien qu’incarnant de rebelles sixties, paraissent fades en comparaison. Les radios des campus américains ne s’y sont pas trompées. Led Zep est l’un des groupes les plus diffusés là-bas sur la bande FM. L’un de leurs morceaux s’intitule justement Going to California. Subtile alchimie entre un Robert Plant aux incantations feutrées, accompagnées par une toute acoustique guitare, telle qu’on croirait Page métamorphosé en Neil Young. C’est bien cela le secret de Led Zep, jouer dans des styles et genres diversifiés avec une incroyable classe et un sens de la composition que peu de rock band ont su maîtriser. Bref, le plus grand groupe de rock des seventies, c’était bien Led Zeppelin. Il est bon de le rappeler.
En vérité, cette question, quelques-uns la posent de temps à autre, dans des conversations entre vieux quadragénaires et jeunes quinquagénaires. Les Stones et Led Zep sont de la même époque, du moins c’est ce que l’on croit. Disons que les jeunes gens de 1970 écoutaient autant les premiers que les seconds, mais les Stones semblaient avoir fait leur temps, contrairement à Led Zep qui en l’espace de trois ans, allait transpercer la scène rock pour réaliser quatre albums retentissants, assortis de prestations scéniques impressionnantes, d’autant plus que la puissance des amplis était à la hauteur des barres d’enceintes. Bref, la technique suivait le style et le plus grand groupe de rock, en 1972, c’était Led Zep, n’en déplaise aux fans des ineffables Stones, fatigués d’une fin des sixties peu glorieuse, marquée par Altamont, puis les trois J morts au champ d’honneur du front du rock, Janis, Jimmy et Jim. Vers 1971, les Stones ont sorti Sticky Fingers et Exile, deux moments de pur rock bien ficelé, travaillé, magistralement composé et exécuté avec un tandem Richard-Jagger aux commandes, mais sans doute ennuyeux eu égard à la folie des sixties, bref, loin d’être des chefs-d’œuvre comme l’a dit et répété une critiqué hébétée par le phénomène Stones. Par contre, Led Zep a sorti, entre 1969 et 1971, quatre bombes sur le label qui, dix ans auparavant, édita John Coltrane.
Le lecteur aura compris que je suis plus Led Zep et que je n’ai jamais été Stones, du moins dans le sens où ce billet l’entend, fan des Stones. Le seul album des Stones que j’apprécie vraiment est Satanic Majesty, le seul qui ne sonne pas vraiment Stones mais plus psyché. Dont le sens apparaîtra dans le film Performance où Jagger en flower power attitude, joue le rôle d’une star décadente initiant un truand en cavale aux délices des épices orientales. Les Stones évoquent une époque, une liberté, un esprit, un art, une attitude, mais question création musicale, ils ne tiennent pas la route face aux quatre musiciens de Led Zeppelin.
Ecoutez Black Dog par exemple, ce morceau de l’album IV représentant exactement le style de Led Zep. Des morceaux hachés, faits de ruptures, de séquences, de détours inattendus, avec la voix haut perchée de Robert Plant, la rythmique qu’on devine plus qu’efficace, ça cogne, à côté, Charlie Watts et Bill Wyman passent pour des musiciens de bal. Jimmy Page, subtil guitariste, aussi célèbre et céleste que son pair Blackmore de Deep Purple, bien plus fougueux que Clapton, aussi précis qu’Hendrix dans les écarts, du grand art que cette cavalerie musicale satellisant les incroyables vocalises de Robert Plant sur une orbite jupitérienne.
Les Stones ont appliqué la recette du blues américain et en sont même les héritiers assez appliqués, étrangement blancs pour assumer cette musique de black. Led Zep a emprunté au blues mais l’a transfiguré, un peu comme Magma et Christian Vander ont procédé face à Coltrane. Pour s’en convaincre on écoutera Dazed and Confused, surtout dans l’interprétation lors des sessions de la BBC et le live en Californie l’été 72, une version qui dépasse les 20 minutes. Sans oublier les medley exécuté sur un Whole Lotta Love dévoilant la démesure rythmique du tandem John Bonhan surdoué à la batterie, comme le sut très tôt Robert Plant, et John Paul Jones à la basse lancinante autant qu’éblouissante. C’est justement sur ce critère qu’on mesure ce qui sépare les Stones, archétypes du rock band british exécutant des bons morceaux de quatre minutes, de ces magiciens et musiciens de Led Zep capables d’improviser dix minutes et plus. Comme d’ailleurs les hérauts du krautrock allemand. Alors que dans le genre progressif, on ne lésine pas sur la durée. Parmi mes connaissances qui s’y entendent dans le prog, la plupart savent goûter du Led Zep, en bons connaisseurs de la quintessence de l’art à jouer et composer pour une formation de musique amplifiée. Mais aucun n’apprécie les Stones, sauf j’imagine pour agrémenter une réunion de seniors autour d’un barbecue.
De Led Zep, on conseillera évidemment les quatre premiers albums. Le cinquième, House of the Holy, se révèle plus subtil, traduisant un désir d’innovation, de rénovation, de rupture stylistique vers un genre plus travaillé et classieux, anticipé par le culte morceau Stairway to Heaven, somptueuse composition, qui débute comme un slow, finit en fureur, et qui pour quelques couples, rappelle une folle décadence d’un soir ayant signé un bail jusqu’à l’éternité. Viendra ensuite le double vinyl Physical Graffiti et son non moins somptueux morceaux Kashmir, aux ambiances arabisantes et « persantes », qu’on croirait émanées de la fusion de Black Sabbath et Khatchaturian.
Led Zep, bien plus prodigieux que les Stones qui, bien qu’incarnant de rebelles sixties, paraissent fades en comparaison. Les radios des campus américains ne s’y sont pas trompées. Led Zep est l’un des groupes les plus diffusés là-bas sur la bande FM. L’un de leurs morceaux s’intitule justement Going to California. Subtile alchimie entre un Robert Plant aux incantations feutrées, accompagnées par une toute acoustique guitare, telle qu’on croirait Page métamorphosé en Neil Young. C’est bien cela le secret de Led Zep, jouer dans des styles et genres diversifiés avec une incroyable classe et un sens de la composition que peu de rock band ont su maîtriser. Bref, le plus grand groupe de rock des seventies, c’était bien Led Zeppelin. Il est bon de le rappeler.
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