Never Let Me Go (Auprès de moi toujours)
depuis les années 60, des gamins anglais sont soigneusement préparés dès la naissance à l’abattoir, c’est-à-dire à donner leurs organes pour prolonger la vie des receveurs.Un peu comme si – toutes proportions gardées – Mike Leigh revisitait The Island de Michael Bay, ou même Harry Potter – via une première partie sise dans un collège chic.
Tout tourne ici autour d’un triangle amoureux, de l’adolescence à l’âge adulte, interprété sur le tard par la fleur du jeune actorat british, préposée aux scénarios d’initiation : une Keira Knightley fonctionnelle (de plus en plus Winona Ryder) contre Carey Mulligan (Une éducation) et Andrew Garfield (le prochain Spider-Man), davantage au diapason.Ailleurs, en Française de service, une Nathalie Richard de passage dispense son trouble capiteux habituel lors de ses apparitions.
La peinture des espérances du trio est la meilleure du film, entre justesse et distance. Le trio, comme toute jeunesse, essaie d’organiser son rapport aux autres, mais dans un environnement cloisonné, à l’image du Village de M. Night Shyamalan, où les légendes urbaines sur le monde extérieur abondent.
Emotionnellement gauches, ils n’ont comme référents que jeux de rôle ou sitcoms débiles pour se débrouiller en société. Témoin, cette scène tragi-comique où ils ont toutes les difficultés à commander à déjeuner dans un restaurant. Serrés ensemble sur la banquette, ils ont autant l’air d’oisillons tombés du nid que d’acteurs à une mauvaise audition pour le rôle de leur carrière. Et les personnages ont conscience de cette mauvaise imitation de la vie quand ils déclarent qu’ils sont “modelés sur de l’ordure, des prostituées et des junkies”.
Romanek organise ses rites de passage ado dans une langueur mortifère mais séduisante, où le zen se confondrait avec un désespoir résigné. S’il pratique à bon escient l’ellipse (le monde plus-que-parfait des receveurs d’organes est esquissé), il pèche par le soin qu’il met à faire de ses cadres de clinquantes photos-souvenirs fanées.
Cela nourrit paradoxalement la question première du film : comment articuler, exprimer ses émotions. Que l’on soit un ado désemparé ou un cinéaste zélé dans son coloriage des sentiments.
Date de sortie 2 mars 2011 (1h 43min)
De: Mark Romanek
Avec: Carey Mulligan, Andrew Garfield, Keira Knightley plus
Genres: Drame, Romance
Nationalités: Américain, Britannique
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