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Les Déracinés /BENI HENDEL

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  • Les Déracinés /BENI HENDEL


    1880 dans l'Ouarsenis. L'irréversible processus de dépossession des
    paysans algériens par la colonisation est entamé. L'avidité du colon n'a
    d'égale que la force de repli sur soi du fellah. Refuge dans la tradition,dans la langue, dans les tentes étroites contrastant avec l'immensité des domaines que se taillent les occupants. Refuge dans une temporalité dépassée, dans l'errance face à l'étranger qui s'installe pour l'éternité. Le début du film illustre bien le texte sociologique qui lui sert de scénario.
    Il fonctionne tant qu'il s'agit de mettre en images des ambiances, mais, dès que le texte analyse des mécanismes, des rapports de force, Beni-Hendel laisse apparaître de grandes faiblesses dont la plus importante est certainement l'échec de la transcription du langage sociologique en langage cinématographique. La thèse dont est tiré le scénario traite de la dépossession des fellahs. Si le sujet est parfaitement appréhendé par la sociologie, il n'en demeure pas moins un thème général et abstrait pour le cinéma.
    A aucun moment, le film n'arrive à articuler ce thème autour des médiations qui sont celles du cinéma: récit, personnage, dramaturgie.
    1880 dans l'histoire de l'Algérie, c'est déjà la loi Warnier, une dynamique à l'oeuvre, complexe, qui dans le film, va être réduite à un mécanisme simple. La tribu des Beni-Rendel n'est que le prétexte qui va permettre de partir du général (approche sociologique) plutôt que du particulier (approche cinématographique). Choisir le groupe comme point de départ du film ne permet pas de faire l'économie de la construction des personnages. Dès que ceux-ci se mettent à parler il apparaît clairement qu'ils n'existent que comme support d'un discours scientifique. L'image montre, le dialogue, redondant, explique. Ce défaut, seul, aurait produit un mauvais film. Ce qui est plus grave, c'est la réduction qu'il opère de l'analyse sociologique. Peu à peu, l'idée de la tribu, modèle de société démocratique et égalitaire, va s'imposer. Cette vieille hypothèse se rattache à certaines conceptions de l'histoire qui continuent d'attribuer des vertus socialisantes aux valeurs tribales.
    A partir de là, la schématisation, dissimulée par le propos général du début, va marquer le reste du film. Chaque groupe, chaque individu va incarner non pas un personnage mais une force. A la tribu des Beni-Rendel, unie, représentant le peuple, seul héros, s'oppose la panoplie des forces coloniales: un sous-préfet républicain, un colon avide, un avocat véreux, rompu aux astuces de l'expropriation, un curé, une institutrice.
    Face à ces figures si mièvres qu'on peut se demander comment elles ont pu durer cent trente ans, la tribu des Beni-Rendel, marquée dès l'ouverture par la mort du patriarche. Tribu aux figures symboliques s'inscrivant dignement en contrepoint des personnages ennemis: un doyen soucieux du bien collectif, une folle aux paroles prophétiques, un évadé du bagne colonial, un taleb, efficace transmetteur du savoir ancestral. Il n'y a aucun affrontement direct entre les deux communautés. Tous les conflits passent par le caïd, rejeté par les siens, méprisé par ses maîtres.
    La fin du film redevient l'illustration d'une histoire écrite par la sociologie. Les paysans démunis vendent leur force de travail dans les villes. La tribu se disloque. La famille restreinte apparaît. De cette décomposition naîtra la révolte. L'évadé tirera le premier coup de fusil sur un mariage colonial qui aurait dû sceller l'alliance de la propriété industrielle et de la propriété
    foncière.
    Le discours du film étant linéaire, le recours aux artifices techniques s'imposait, pour montrer que quand même, le temps historique est différent du temps cinématographique. Les flash-back sont utilisés pour jouer la condensation temporelle, alourdissant une écriture laborieuse, construite sur un cadrage serré et des plans où peu de choses passent si ce n'est un orientalisme d'autant plus vivace que refoulé. L'écriture banale, desservie par un montage narratif, soulignent le didactisme maladroit du film. Dans Beni-Hendel, la sociologie ne détruit pas le mythe. Elle conforte le mythe comme tenant lieu d'histoire .
    Dernière modification par katiaret, 22 avril 2014, 20h45.
    dz(0000/1111)dz

  • #2
    C'est la pire période de la colonisation. Il faut savoir qu'au départ la France avait opté pour une présence militaire sans plus, de la même manière que les Ottomans. A partir du début des années 1860 l'optique a changé, elle est devenue coloniale. Dépossession des terres au profit des colons arrivés en masse, déportation pure et simple vers les hauts plateaux semi-desertiques, acculturation etc.. toute la gamme y est passée. C'était la période des famines, de la disette et des épidémies narrées dans des poèmes de Si Mohand U M'hand, de Abdellah ben Keriou , de Kaddour Ben Achour et de bien d'autres chantres du melhoun. Cette agression pure et simple a couté plus de la moitié de sa population à l'Algérie. Agression théorisée, intellectualisée et justifiée par les racialistes, Ernest Renan, Gobineau, Jules Ferry etc.. paradoxalement c'est à une autre facette racialiste que nous devons l’arrêt du rouleau compresseur colonial, aux orientalistes. N'en déplaise à Edward Said. En effet, peu de de la réalité Algérienne arrivait aux oreilles et aux yeux métropolitains. La mode orientaliste a fait en sorte que cette réalité éclate au grand jour, éclabousse la façade " civilisatrice" de la France.

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