Le cinéma du Maghreb semble retrouver une seconde jeunesse. Malgré les contraintes, la production de films au Maroc et en Algérie s’améliore d’année en année. Les changements politiques majeurs dans la région arabe favorisent quelque peu cette situation. El Watan Week-end dresse un état des lieux avec les professionnels présents au 19e Festival international du cinéma méditerranéen de Tétouan (Maroc).
L’occasion est presque historique. Le cinéma maghrébin est devenu, ces trois dernières années, la locomotive du 7e art dans le Monde arabe. Le ralentissement de l’industrie cinématographique en Egypte et en Tunisie, en raison de la transition démocratique mouvementée, et l’arrêt relatif de la production de films en Syrie et en Irak ont ouvert un boulevard devant le cinéma algérien et marocain pour s’imposer sur la scène régionale. Etouffée pendant quarante ans par la dictature de Mouammar El Gueddafi, la Libye n’a pas su construire un véritable cinéma malgré les efforts de rares cinéastes comme Abdallah Zarok, Mustafa Kashem ou Mohamed Shaaban.
De jeunes cinéastes libyens, grâce aux facilités qu’offre le numérique, tentent de bâtir le 7e art à partir de presque rien à Tripoli et à Benghazi. En Mauritanie, la seule manifestation consacrée au cinéma est la Semaine nationale du film qui se tient chaque année en automne. «C’est un Festival international ouvert à tous les cinématographies du monde, surtout des pays arabes et africains. A chaque édition, il y a un thème comme l’émigration, la coexistence, le dialogue des cultures, la citadinité. En Mauritanie, le cinéma est encore naissant. La plupart des réalisateurs et producteurs, qui ont voulu lancer l’activité cinématographique par le passé, ont quitté le pays. Ils vivent en Europe. Leurs films ne sont pas présentés au public mauritanien», regrette Mohamed Ould Idoum, directeur de la Semaine nationale du film de Nouakchott, rencontré lors du Festival du film arabe d’Oran. En 2002, des cinéastes amateurs ont créé dans la capitale mauritanienne la Maison des cinéastes où des stages de formation sont assurés pour les jeunes intéressés par le 7e art.
Relève
«Nous voulons convaincre les cinéastes partis en Europe de revenir au pays pour former les jeunes et assurer la relève. Actuellement, nous produisons surtout des courts métrages et des documentaires», ajoute Mohamed Ould Idoum. Abderrahmane Sissako, l’un des premiers cinéastes mauritaniens, est revenu au pays à l’appel des jeunes de Nouakchott. Abderrahmane Sissako est connu par ses longs et courts métrages tels que Molom, conte de Mongolie, Le chameau et les bâtons flottants et La vie sur terre.
L’Algérie, qui a tous les moyens financiers nécessaires, doit repenser son industrie cinématographique, professionnaliser davantage les festivals du 7e art, perfectionner la formation, améliorer les circuits de distribution de films et réhabiliter toutes les salles de cinéma en les dotant de la technologie numérique DCP (Digital Cinema Package) de projection de films. Il est entendu que dans la plupart des pays, le 35 mm est en phase de remplacement par le DCP, plus souple, plus léger et de meilleure qualité visuelle et sonographique.
Le 19e Festival international du cinéma méditerranéen, qui s’est tenu du 23 au 30 mars, a adopté pour la première le DCP pour la projection des films. «Nous pouvons dire Adieu au 35 mm. C’est pour nous une transformation historique», confie Ahmed Hosni, directeur du festival de Tétouan. Sous l’égide du Centre cinématographie marocain (CCM), une commission d’aide à la numérisation, à la modernisation et à la construction de salles de cinéma a été créée. Elle s’occupe de la collecte de dossiers de professionnels intéressés par l’octroi d’aide de l’Etat pour réussir le projet.
A cet effet, un cahier des charges a été élaboré. «Dans tout le Maghreb, la réhabilitation des salles de cinéma est un préalable au développement de l’art cinématographique et au retour du public», plaide Khalil Demmoun, président de l’Association marocaine des critiques de cinéma (AMCC). Le Maroc, désormais numéro un en matière de production cinématographique dans le Monde arabe et deuxième en Afrique, est le pays où le cinéma est le mieux développé. Un mouvement en perpétuelle évolution depuis la fin des années 1990. «Nous arrivons à produire jusqu’à 30 films par an. Parmi cette production, il y a des navets. Des jeunes réalisent leurs premiers longs métrages avec des caméras numériques et ne prennent pas suffisamment de temps pour réfléchir à leurs projets», observe le critique Ahmed Boughaba (lire entretien).
Le CCM publie régulièrement sur son site internet les données statistiques et les informations sur la production des films, la fréquentation des salles, le montant des subventions accordées aux cinéastes, les stages de formation tant au Maroc qu’à l’étranger, l’actualité des festivals et des grandes manifestations… Le cinéma est servi par une quinzaine de festivals thématiques au Maroc (Marrakech, Tétouan, Safi, Agadir, Tanger, Rabat, Meknès….). Le Maroc compte 60 salles de cinéma, dont 25 à Casablanca (le multiplex Megarama est doté de 14 écrans).
Ouvrir le marché
Nabila Rezaïg, chef du département cinéma de l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC), souligne que ces trois dernières années, le 7e art algérien est revenu en force au devant de la scène. «A la Mostra de Venise, le dernier film de Djamila Sahraoui, Yema, a été fort bien accueilli par les critiques. Ce film a obtenu plusieurs prix à Moscou, à Ouagadougou, à Dubaï, à Oran et ailleurs. Ces derniers mois, les festivals de Abu Dhabi, Doha, Carthage et Tétouan ont consacré des hommages au cinéma algérien, cinquante ans après l’indépendance», relève-t-elle.
Elle cite les films coproduits par l’AARC , ces dernières années comme Parfums d’Alger, de Rachid Benhadj, Zabana !, de Saïd Ould Khelifa, Le menteur, de Ali Mouzaoui… «Nous allons poursuivre sur cette voie et explorer la voie de la coproduction de films avec d’autres pays dans le cadre des conventions signées par l’Etat algérien à travers le ministère de la Culture avec d’autres Etats comme l’Italie, la France, le Canada, etc. Il y a aussi des projets à l’étude avec des pays avec lesquels il n’existe pas encore d’accords. Il faut dire que l’Algérie a une longue tradition dans la coproduction depuis l’indépendance. L’Algérie est le pays arabe qui a le plus fait pour privilégier la coproduction cinématographique», note Nabila Rezaïg. Elle rappelle que l’Algérie avait aidé Youssef Chahine à réaliser ses films au moment où il était interdit en Egypte, son pays.
L’occasion est presque historique. Le cinéma maghrébin est devenu, ces trois dernières années, la locomotive du 7e art dans le Monde arabe. Le ralentissement de l’industrie cinématographique en Egypte et en Tunisie, en raison de la transition démocratique mouvementée, et l’arrêt relatif de la production de films en Syrie et en Irak ont ouvert un boulevard devant le cinéma algérien et marocain pour s’imposer sur la scène régionale. Etouffée pendant quarante ans par la dictature de Mouammar El Gueddafi, la Libye n’a pas su construire un véritable cinéma malgré les efforts de rares cinéastes comme Abdallah Zarok, Mustafa Kashem ou Mohamed Shaaban.
De jeunes cinéastes libyens, grâce aux facilités qu’offre le numérique, tentent de bâtir le 7e art à partir de presque rien à Tripoli et à Benghazi. En Mauritanie, la seule manifestation consacrée au cinéma est la Semaine nationale du film qui se tient chaque année en automne. «C’est un Festival international ouvert à tous les cinématographies du monde, surtout des pays arabes et africains. A chaque édition, il y a un thème comme l’émigration, la coexistence, le dialogue des cultures, la citadinité. En Mauritanie, le cinéma est encore naissant. La plupart des réalisateurs et producteurs, qui ont voulu lancer l’activité cinématographique par le passé, ont quitté le pays. Ils vivent en Europe. Leurs films ne sont pas présentés au public mauritanien», regrette Mohamed Ould Idoum, directeur de la Semaine nationale du film de Nouakchott, rencontré lors du Festival du film arabe d’Oran. En 2002, des cinéastes amateurs ont créé dans la capitale mauritanienne la Maison des cinéastes où des stages de formation sont assurés pour les jeunes intéressés par le 7e art.
Relève
«Nous voulons convaincre les cinéastes partis en Europe de revenir au pays pour former les jeunes et assurer la relève. Actuellement, nous produisons surtout des courts métrages et des documentaires», ajoute Mohamed Ould Idoum. Abderrahmane Sissako, l’un des premiers cinéastes mauritaniens, est revenu au pays à l’appel des jeunes de Nouakchott. Abderrahmane Sissako est connu par ses longs et courts métrages tels que Molom, conte de Mongolie, Le chameau et les bâtons flottants et La vie sur terre.
L’Algérie, qui a tous les moyens financiers nécessaires, doit repenser son industrie cinématographique, professionnaliser davantage les festivals du 7e art, perfectionner la formation, améliorer les circuits de distribution de films et réhabiliter toutes les salles de cinéma en les dotant de la technologie numérique DCP (Digital Cinema Package) de projection de films. Il est entendu que dans la plupart des pays, le 35 mm est en phase de remplacement par le DCP, plus souple, plus léger et de meilleure qualité visuelle et sonographique.
Le 19e Festival international du cinéma méditerranéen, qui s’est tenu du 23 au 30 mars, a adopté pour la première le DCP pour la projection des films. «Nous pouvons dire Adieu au 35 mm. C’est pour nous une transformation historique», confie Ahmed Hosni, directeur du festival de Tétouan. Sous l’égide du Centre cinématographie marocain (CCM), une commission d’aide à la numérisation, à la modernisation et à la construction de salles de cinéma a été créée. Elle s’occupe de la collecte de dossiers de professionnels intéressés par l’octroi d’aide de l’Etat pour réussir le projet.
A cet effet, un cahier des charges a été élaboré. «Dans tout le Maghreb, la réhabilitation des salles de cinéma est un préalable au développement de l’art cinématographique et au retour du public», plaide Khalil Demmoun, président de l’Association marocaine des critiques de cinéma (AMCC). Le Maroc, désormais numéro un en matière de production cinématographique dans le Monde arabe et deuxième en Afrique, est le pays où le cinéma est le mieux développé. Un mouvement en perpétuelle évolution depuis la fin des années 1990. «Nous arrivons à produire jusqu’à 30 films par an. Parmi cette production, il y a des navets. Des jeunes réalisent leurs premiers longs métrages avec des caméras numériques et ne prennent pas suffisamment de temps pour réfléchir à leurs projets», observe le critique Ahmed Boughaba (lire entretien).
Le CCM publie régulièrement sur son site internet les données statistiques et les informations sur la production des films, la fréquentation des salles, le montant des subventions accordées aux cinéastes, les stages de formation tant au Maroc qu’à l’étranger, l’actualité des festivals et des grandes manifestations… Le cinéma est servi par une quinzaine de festivals thématiques au Maroc (Marrakech, Tétouan, Safi, Agadir, Tanger, Rabat, Meknès….). Le Maroc compte 60 salles de cinéma, dont 25 à Casablanca (le multiplex Megarama est doté de 14 écrans).
Ouvrir le marché
Nabila Rezaïg, chef du département cinéma de l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC), souligne que ces trois dernières années, le 7e art algérien est revenu en force au devant de la scène. «A la Mostra de Venise, le dernier film de Djamila Sahraoui, Yema, a été fort bien accueilli par les critiques. Ce film a obtenu plusieurs prix à Moscou, à Ouagadougou, à Dubaï, à Oran et ailleurs. Ces derniers mois, les festivals de Abu Dhabi, Doha, Carthage et Tétouan ont consacré des hommages au cinéma algérien, cinquante ans après l’indépendance», relève-t-elle.
Elle cite les films coproduits par l’AARC , ces dernières années comme Parfums d’Alger, de Rachid Benhadj, Zabana !, de Saïd Ould Khelifa, Le menteur, de Ali Mouzaoui… «Nous allons poursuivre sur cette voie et explorer la voie de la coproduction de films avec d’autres pays dans le cadre des conventions signées par l’Etat algérien à travers le ministère de la Culture avec d’autres Etats comme l’Italie, la France, le Canada, etc. Il y a aussi des projets à l’étude avec des pays avec lesquels il n’existe pas encore d’accords. Il faut dire que l’Algérie a une longue tradition dans la coproduction depuis l’indépendance. L’Algérie est le pays arabe qui a le plus fait pour privilégier la coproduction cinématographique», note Nabila Rezaïg. Elle rappelle que l’Algérie avait aidé Youssef Chahine à réaliser ses films au moment où il était interdit en Egypte, son pays.
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