Lumineuse, exubérante, rieuse, intensément sérieuse aussi, un bagou terrible... Ainsi se présente la jeune actrice iranienne Golshifteh Farahani. A 26 ans, elle a déjà une longue carrière derrière elle, ses débuts d'actrice remontant à 1998, quand elle en avait 14.
L'année dernière, le monde entier l'a découverte aux côtés de Leonardo DiCaprio dans Mensonges d'Etat, de Ridley Scott. Succès mondial, ce film lui a valu de sérieux problèmes dans son pays. Parce qu'il était américain, mais plus encore parce que, le soir de la première, elle a foulé le tapis rouge à tête découverte. "C'est la première fois qu'une actrice iranienne apparaissait publiquement sans quelque chose dans les cheveux qui faisait office de voile."
De retour en Iran, elle s'est vu interdire de quitter le territoire, qu'elle a déserté à la première occasion - une autorisation de sortie de vingt-quatre heures.
Exilée depuis un an, elle vit à Paris, avec son mari et un passeport français qu'elle vient d'obtenir, partagée entre la douleur d'être séparée des siens, d'assister, impuissante, à la répression qui s'est abattue sur eux depuis les élections de juin dernier, et l'ivresse de vivre enfin dans un pays libre. "Je brûle d'envie d'être là-bas, j'en pleure tous les soirs. Mais peut-être suis-je plus utile ici ? On se retrouve, entre exilés, et c'est exactement ce que le gouvernement ne veut pas. Ce qu'ils veulent, c'est prouver aux 90 % des jeunes qui veulent quitter le pays que, s'ils partent, on les oubliera. Ils diffusent des documentaires sur les SDF iraniens vivant à l'étranger, ils se donnent un mal fou ! En cela, mes projets à Hollywood sont une manière de dire "Yes we can !""
Culture du mensonge
Golshifteh Farahani est une artiste engagée : "Je voudrais être un gladiateur !", lance-t-elle. Comme le cinéaste Jafar Panahi, dont elle admire l'esprit de résistance inflexible. La jeune actrice se félicite pour l'instant de s'être émancipée de la culture du mensonge qui gangrène la société iranienne, comme on le voit dans A propos d'Elly. "En Iran, le mensonge est une question de survie. Pour sortir de l'école, pour être diplômé de l'université, il faut savoir très bien mentir. Il faut pouvoir dire sans sourciller qu'on veut la destruction des Etats-Unis."
Elevée dans une famille d'artistes, Golshifteh Farahani se destinait à la musique. A 14 ans, elle se préparait à intégrer le conservatoire de Vienne quand elle a goûté "les délices du cinéma". Très vite, elle a reçu beaucoup de scénarios (jusqu'à quarante par an ces dernières années), et s'est distinguée, explique-t-elle, par un certain nombre de rôles "difficiles", des personnages très variés, des scénarios qui "disaient quelque chose des souffrances qui minent en profondeur la société". Elle évoque l'un d'eux, Santoori, de Dariush Mehrjui, l'histoire d'un artiste que ses ennuis avec la censure poussent dans la drogue, qui n'a finalement le choix qu'entre mourir et quitter le pays, "comme tous les artistes en Iran aujourd'hui".
Depuis qu'elle vit en France, elle a tourné dans le nouveau film du Britannique Roland Joffé. Elle s'est aussi remise à la musique pour enregistrer un album avec un musicien iranien underground exilé en France, qui a passé cinq ans en prison. "Un disque réalisé par deux artistes en exil, ça a une forte portée symbolique." Hantée par "tous ces gens qui sont morts dans la rue" ces derniers mois, Golshifteh Farahani se raccroche à l'idée que ce qu'elle fait "peut rappeler au monde l'existence de (s)on peuple" : "Avec la mort de Michael Jackson, les actualités ont tourné le dos à l'Iran. Nous avons besoin d'attention. Il y a des abus sexuels dans les prisons, des viols... Les étudiants qui sont enfermés vivent des choses atroces. Si le monde oublie, ils seront oubliés et on pourra leur faire n'importe quoi."
Par le Monde
L'année dernière, le monde entier l'a découverte aux côtés de Leonardo DiCaprio dans Mensonges d'Etat, de Ridley Scott. Succès mondial, ce film lui a valu de sérieux problèmes dans son pays. Parce qu'il était américain, mais plus encore parce que, le soir de la première, elle a foulé le tapis rouge à tête découverte. "C'est la première fois qu'une actrice iranienne apparaissait publiquement sans quelque chose dans les cheveux qui faisait office de voile."
De retour en Iran, elle s'est vu interdire de quitter le territoire, qu'elle a déserté à la première occasion - une autorisation de sortie de vingt-quatre heures.
Exilée depuis un an, elle vit à Paris, avec son mari et un passeport français qu'elle vient d'obtenir, partagée entre la douleur d'être séparée des siens, d'assister, impuissante, à la répression qui s'est abattue sur eux depuis les élections de juin dernier, et l'ivresse de vivre enfin dans un pays libre. "Je brûle d'envie d'être là-bas, j'en pleure tous les soirs. Mais peut-être suis-je plus utile ici ? On se retrouve, entre exilés, et c'est exactement ce que le gouvernement ne veut pas. Ce qu'ils veulent, c'est prouver aux 90 % des jeunes qui veulent quitter le pays que, s'ils partent, on les oubliera. Ils diffusent des documentaires sur les SDF iraniens vivant à l'étranger, ils se donnent un mal fou ! En cela, mes projets à Hollywood sont une manière de dire "Yes we can !""
Culture du mensonge
Golshifteh Farahani est une artiste engagée : "Je voudrais être un gladiateur !", lance-t-elle. Comme le cinéaste Jafar Panahi, dont elle admire l'esprit de résistance inflexible. La jeune actrice se félicite pour l'instant de s'être émancipée de la culture du mensonge qui gangrène la société iranienne, comme on le voit dans A propos d'Elly. "En Iran, le mensonge est une question de survie. Pour sortir de l'école, pour être diplômé de l'université, il faut savoir très bien mentir. Il faut pouvoir dire sans sourciller qu'on veut la destruction des Etats-Unis."
Elevée dans une famille d'artistes, Golshifteh Farahani se destinait à la musique. A 14 ans, elle se préparait à intégrer le conservatoire de Vienne quand elle a goûté "les délices du cinéma". Très vite, elle a reçu beaucoup de scénarios (jusqu'à quarante par an ces dernières années), et s'est distinguée, explique-t-elle, par un certain nombre de rôles "difficiles", des personnages très variés, des scénarios qui "disaient quelque chose des souffrances qui minent en profondeur la société". Elle évoque l'un d'eux, Santoori, de Dariush Mehrjui, l'histoire d'un artiste que ses ennuis avec la censure poussent dans la drogue, qui n'a finalement le choix qu'entre mourir et quitter le pays, "comme tous les artistes en Iran aujourd'hui".
Depuis qu'elle vit en France, elle a tourné dans le nouveau film du Britannique Roland Joffé. Elle s'est aussi remise à la musique pour enregistrer un album avec un musicien iranien underground exilé en France, qui a passé cinq ans en prison. "Un disque réalisé par deux artistes en exil, ça a une forte portée symbolique." Hantée par "tous ces gens qui sont morts dans la rue" ces derniers mois, Golshifteh Farahani se raccroche à l'idée que ce qu'elle fait "peut rappeler au monde l'existence de (s)on peuple" : "Avec la mort de Michael Jackson, les actualités ont tourné le dos à l'Iran. Nous avons besoin d'attention. Il y a des abus sexuels dans les prisons, des viols... Les étudiants qui sont enfermés vivent des choses atroces. Si le monde oublie, ils seront oubliés et on pourra leur faire n'importe quoi."
Par le Monde