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L'Iran invité d'honneur au Festival du film amazigh

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  • L'Iran invité d'honneur au Festival du film amazigh

    Katayoon Shahabi, chef de la délégation iranienne, invité d’honneur au 9e Festival du film amazigh de Sidi Bel Abbes, revient dans cet entretien sur le cinéma iranien. La place du cinéma dans ce vaste pays, connu à travers, notamment les médias occidentaux comme une fourmilière d’islamistes intolérants. Elle nous renseigne sur cette industrie cinématographique iranienne connue dans le monde.

    La Dépêche de Kabylie : Pouvez-vous nous résumer en quelques mots la situation de l’art en général en Iran ?

    Katayoon Shahabi : L’Iran est un pays très jeune. 65% de sa population est âgée de moins de 21 ans, donc c’est le plus jeune pays au monde. C’est pour cette raison que l’art est très actif en Iran. Comme la peinture, la musique, le cinéma… sont très populaires chez nous en Iran. Je pense aussi qu’étant donné que l’art fait partie de notre culture perse ancienne, comme la littérature, ont toujours fait partie de notre vie. Le cinéma aussi est très enraciné dans notre culture. C’est pour ces raisons aussi que le cinéma iranien se porte bien d’ailleurs la production a atteint 80 films par an et entre 80 et 100 films de 35 millimètre. On produit aussi entre 2500 et 3.000 documentaires et courts métrages chaque année. La télévision produit presque 300 téléfilms et feuilletons. Le cinéma est une très grande industrie en Iran. On a beaucoup de cinéastes de différentes générations qui activent sur ce terrain. Ces derniers sont connus dans le monde entier comme étant de grands réalisateurs et cinéastes. Grâce au digital, la nouvelle génération de réalisateurs et de cinéastes commence à produire des films intéressants à petits budgets.

    Sinon, quelles sont les retombées de la révolution islamique iranienne de 1979 sur le monde l’art et du cinéma en particulier ?

    Quelques années après la révolution, c’était le chaos total, parce que toute la structure du pays a été chamboulée et il n’y avait pas de politique culturelle exacte et déterminée pour la culture. Mais quelques années après, notamment pour le cinéma, une autre politique culturelle vient occuper le vide laissé auparavant. C’était une politique déterminée pour qu’on puisse produire un cinéma à la hauteur de la culture du pays. Donc, le gouvernement a investi dans le cinéma avec la construction et l’ouverture d’écoles de cinéma, l’enseignement de cet art dans les universités et ensuite donner l’opportunité aux jeunes à travers les 80 bureaux expérimentaux et de centre culturels pour les courts métrages. Ces jeunes ont pu faire et réaliser des films avec les moyens mis à leur disposition et acquérir l’expérience dans le domaine. Et aussi par l’intermédiaire de la télévision, en montrant des films de qualité afin de donner un bon goût pour le cinéma aux jeunes cinéastes iraniens. Le goût en art est le produit d’une bonne éducation pour que l’on puisse admirer cet art.

    Même durant le règne de Khomeyni, il y avait cet effort pour le cinéma ?

    Bien sûr, c’était au moment du règne de Khomeyni que ces efforts ont été consentis pour le cinéma. Après la révolution, une fondation pour le cinéma a été créée par le gouvernement. Elle s’appelait "La fondation de Farrabi", qui travaillait pour la promotion du cinéma iranien de par le monde. Elle investissait dans le cinéma d’auteur. Pendant plusieurs années, nous étions présents dans plusieurs festivals et manifestations cinématographiques partout dans le monde. Le cinéma iranien est classé à la troisième place dans le monde.

    Que reste-t-il de la culture perse en Iran d’aujourd’hui ?

    La culture perse en Iran est comme la racine d’un arbre. Cette racine s’étend dans tous les domaines artistiques. Elle est présente dans la musique, la peinture…donc la racine du cinéma iranien est cet arbre qui grandit petit à petit, maintenant, il est devenu un grand arbre très fort.

    On nous a toujours présenté l’Iran comme un pays fermé notamment à travers les médias occidentaux, donc quelle est la véritable vie de l’artiste iranien ?

    On peut voir deux images différentes d’un seul pays. Vous avez une image que présente le gouvernement qui reflète l’image officielle du pays et de l’autre vous avez la réalité des gens qu’on peut voir à travers l’art. Donc, je pense que si vous voulez voir la réalité de l’Iran c’est à travers le film que vous allez la voir.

    Vous dites que le cinéma iranien interdit le sexe, l’alcool et la violence dans ses productions : comment se fait-il que l’on mette des barrières pour les artistes dans leurs expressions artistiques ?

    Cela fait partie des lois de la République d’Iran. On ne peut pas les transgresser même si parfois on est contre une loi. Quand un pays décide d’une loi, en tant qu’artiste on ne peut les changer mais il faut trouver une manière de s’exprimer à travers l’art, en respectant ces mêmes lois.

    Chez vous l’industrie cinématographique est très épanouie, existe-t-il un cinéma de critique politique et sociale, un cinéma engagé ?


    Beaucoup de cinéastes iraniens font un tas de choses dans ce domaine. Ils produisent des films qui critiquent notre société. Une des tâches d’un artiste est de critiquer son univers et d’être le miroir de sa société. Si un art ne reflète pas l’image d’une société, comment voulez vous que cette même société reconnaisse ses défauts et se corrige ? Donc, bien entendu, dans le cinéma iranien, notamment dans les films documentaires, nos cinéastes parlent beaucoup de notre société qu’ils décortiquent souvent. Ils abordent les problèmes sociaux…

    Sinon, ce genre de cinéma est-il toléré chez vous ?

    Oui, il est toléré, mais tout dépend du niveau de la critique. La plupart qui sont connus dans le monde sont des films qui ont un message à faire passer et des critiques.

    Quels sont les canaux de diffusion de ces films, sont-ils des canaux officiels ?

    C’est surtout les salles de cinémas. La télévision montre beaucoup moins de films critiques. La télévision étant gouvernemental évite ce genre de cinéma. Ces films occupent néanmoins, le marché noir du cinéma. Ils sont diffusés à travers des canaux non officiels, les gens peuvent se les procurer en DVD par exemple.

    Par rapport au Festival du film amazigh, quelles sont vos impressions ?


    C’est la première fois que je viens en Algérie. Je savais que la situation était peu appréciable. J’admire énormément ce que les organisateurs font dans ce domaine. Je crois que la culture est très importante pour un pays comme le vôtre pour avoir une voix pour le pays. Avoir du cinéma c’est avoir une voix dans le monde. Et si vous n’avez pas de voix, personne ne va vous écouter, donc il faut avoir de l’art et du cinéma.

    Par la Dépêche de Kabylie

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