Sans connexion Internet et privés de messagerie durant cinq jours, les Algériens ont subi ce « rituel » pour la huitième fois d’affilée.
Par notre correspondant à Alger, Adlène Meddi
Publié le 15/06/2024 à 15h22En Algérie, la connexion est suspendue lorsque les candidats planchent, de manière à lutter contre la tricherie, qui est punie de prison ferme. © ADIL BENAYACHE/SIPA
La semaine dernière, des coupures d'internet ont frappé plusieurs pays de l'Afrique de l'Est pour cause des défaillances affectant les systèmes de câbles sous-marins Seacom et Eassy qui desservent la région. En mars dernier c'était l'Afrique de l'Ouest qui a subi les mêmes désagréments. En Algérie, les coupures Internet, la semaine écoulée, étaient d'une tout autre nature. Comme depuis huit ans, et prétextant lutter contre les fraudes lors de l'examen du baccalauréat, les autorités ont coupé le réseau Internet et la 4G durant cinq jours, de dimanche à jeudi, pendant les heures de l'examen.
Des coupures qui perturbent le quotidien des Algériens
« Couper Internet pour empêcher la tricherie aux examens, perturber la circulation pour sécuriser les routes et imposer des fouilles sans fin dans les aéroports… sont des signes du retard du régime et de sa vision dépassée de la sécurité et du contrôle », s'insurge l'éditorialiste Nadjib Belhimer. Dans les réseaux sociaux se déclencha une vague d'indignation face à ces coupures qui perturbent le quotidien des Algériens. « Je travaille dans la formation en free-lance, ce qui nécessite beaucoup de recherches sur Internet. Toutes ces coupures me causent du retard et génèrent trop de stress… et de frustrations. Chaque année on espère que la coupure n'aura pas lieu ! Mais si ! » témoigne une coach de cadres d'entreprise. « Le pire cette semaine pour moi est que j'ai dû décaler ou annuler tous mes rendez à cause de l'impossibilité de commander un VTC », indique une jeune entrepreneuse.
« Panne Internet catastrophique »
« J'ai un site de e-commerce, alors je ne vous dis pas la galère ! » appuie un autre entrepreneur qui se rappelle qu'un de ses associés a préféré partir en Tunisie monter son affaire après les coupures de l'année dernière. « J'ai dû organiser un événement sans Internet, sans WhatsApp, sans réseaux sociaux… Une folie ! » témoigne un acteur de l'événementiel. La seule différence avec l'année dernière est que quelques entreprises étatiques ont maintenu connectés des serveurs de secours, comme Air Algérie.
Même l'opposante et candidate à la présidentielle anticipée de septembre, Zoubida Assoul, a commenté ces perturbations : « Je souhaite à tous les courageux bacheliers une belle réussite à leurs examens. Des efforts et un dévouement continus vous mèneront loin ! Notre message arrive en retard à cause de cette panne Internet catastrophique ! Il semble qu'en 2024 la fuite des sujets d'examens pourrait encore perturber le pays. » Pour Boucherim Youcef, expert international en technologie de la communication, « couper Internet à cause de l'examen du baccalauréat en 2024 est une honte pour tous les responsables liés à ce secteur ». « Je me contente de cette phrase, car j'en ai assez d'énumérer les pertes et les dommages directs et indirects qui affectent tous les secteurs, notamment l'économie nationale et même la réputation de l'Algérie. Et on parle encore sans vergogne de numérisation, de commerce électronique et de e-paiement. »
Face à cette situation, une large partie de l'opinion a réclamé des indemnisations aussi bien à Algérie Télécom (qui détient le monopole sur Internet) et aux opérateurs de téléphonie mobile. Un autre expert, Younes Grar, a également exigé un remboursement par les « opérateurs téléphoniques pour la totalité des usagers d'internet impactés ». Selon son analyse, « comme l'Algérie compte 30 millions de clients des opérateurs mobiles auxquels ces derniers facturent l'équivalent d'un dollar par jour, la coupure de l'Internet pendant cinq jours équivaut à 30 millions de dollars par journée, soit 150 millions de dollars pour cinq jours, cela sans compter les dommages et intérêts pour les lignes professionnelles ». « Il faut ajouter les 3 millions d'abonnés d'Algérie Télécom (50 millions de dollars) sans compter les banques et toutes les autres entreprises dont le business dépend totalement d'Internet », soutient l'expert. Ni les autorités, ni Algérie Télécom et ni les opérateurs téléphoniques ne se sont exprimés sur ces coupures.
Par notre correspondant à Alger, Adlène Meddi
Publié le 15/06/2024 à 15h22En Algérie, la connexion est suspendue lorsque les candidats planchent, de manière à lutter contre la tricherie, qui est punie de prison ferme. © ADIL BENAYACHE/SIPA
La semaine dernière, des coupures d'internet ont frappé plusieurs pays de l'Afrique de l'Est pour cause des défaillances affectant les systèmes de câbles sous-marins Seacom et Eassy qui desservent la région. En mars dernier c'était l'Afrique de l'Ouest qui a subi les mêmes désagréments. En Algérie, les coupures Internet, la semaine écoulée, étaient d'une tout autre nature. Comme depuis huit ans, et prétextant lutter contre les fraudes lors de l'examen du baccalauréat, les autorités ont coupé le réseau Internet et la 4G durant cinq jours, de dimanche à jeudi, pendant les heures de l'examen.
Des coupures qui perturbent le quotidien des Algériens
« Couper Internet pour empêcher la tricherie aux examens, perturber la circulation pour sécuriser les routes et imposer des fouilles sans fin dans les aéroports… sont des signes du retard du régime et de sa vision dépassée de la sécurité et du contrôle », s'insurge l'éditorialiste Nadjib Belhimer. Dans les réseaux sociaux se déclencha une vague d'indignation face à ces coupures qui perturbent le quotidien des Algériens. « Je travaille dans la formation en free-lance, ce qui nécessite beaucoup de recherches sur Internet. Toutes ces coupures me causent du retard et génèrent trop de stress… et de frustrations. Chaque année on espère que la coupure n'aura pas lieu ! Mais si ! » témoigne une coach de cadres d'entreprise. « Le pire cette semaine pour moi est que j'ai dû décaler ou annuler tous mes rendez à cause de l'impossibilité de commander un VTC », indique une jeune entrepreneuse.
« Panne Internet catastrophique »
« J'ai un site de e-commerce, alors je ne vous dis pas la galère ! » appuie un autre entrepreneur qui se rappelle qu'un de ses associés a préféré partir en Tunisie monter son affaire après les coupures de l'année dernière. « J'ai dû organiser un événement sans Internet, sans WhatsApp, sans réseaux sociaux… Une folie ! » témoigne un acteur de l'événementiel. La seule différence avec l'année dernière est que quelques entreprises étatiques ont maintenu connectés des serveurs de secours, comme Air Algérie.
Même l'opposante et candidate à la présidentielle anticipée de septembre, Zoubida Assoul, a commenté ces perturbations : « Je souhaite à tous les courageux bacheliers une belle réussite à leurs examens. Des efforts et un dévouement continus vous mèneront loin ! Notre message arrive en retard à cause de cette panne Internet catastrophique ! Il semble qu'en 2024 la fuite des sujets d'examens pourrait encore perturber le pays. » Pour Boucherim Youcef, expert international en technologie de la communication, « couper Internet à cause de l'examen du baccalauréat en 2024 est une honte pour tous les responsables liés à ce secteur ». « Je me contente de cette phrase, car j'en ai assez d'énumérer les pertes et les dommages directs et indirects qui affectent tous les secteurs, notamment l'économie nationale et même la réputation de l'Algérie. Et on parle encore sans vergogne de numérisation, de commerce électronique et de e-paiement. »
Face à cette situation, une large partie de l'opinion a réclamé des indemnisations aussi bien à Algérie Télécom (qui détient le monopole sur Internet) et aux opérateurs de téléphonie mobile. Un autre expert, Younes Grar, a également exigé un remboursement par les « opérateurs téléphoniques pour la totalité des usagers d'internet impactés ». Selon son analyse, « comme l'Algérie compte 30 millions de clients des opérateurs mobiles auxquels ces derniers facturent l'équivalent d'un dollar par jour, la coupure de l'Internet pendant cinq jours équivaut à 30 millions de dollars par journée, soit 150 millions de dollars pour cinq jours, cela sans compter les dommages et intérêts pour les lignes professionnelles ». « Il faut ajouter les 3 millions d'abonnés d'Algérie Télécom (50 millions de dollars) sans compter les banques et toutes les autres entreprises dont le business dépend totalement d'Internet », soutient l'expert. Ni les autorités, ni Algérie Télécom et ni les opérateurs téléphoniques ne se sont exprimés sur ces coupures.
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