Le bricolage politique auquel nous assistons actuellement, n’est que la suite logique d’une lutte des clans du pouvoir qui se déroule, sous nos yeux mais qui a commencé dès 1999, date à laquelle, l’institution militaire a décidé d’installer Abdelaziz Bouteflika à la présidence de la république, en remplacement, de Liamine Zeroual dont le départ précipité n’a pas encore révélé toutes ses facettes, bien que les causes essentielles sont plausibles.
En effet, deux objectifs vitaux ont animé l’action du Président dès son intronisation : liquider, d’une manière ou d’une autre, tous ceux qui ont contribué, de près ou de loin, à sa désignation élective et prendre sa revanche sur ceux qui l’on éliminé du chemin de la présidence à la mort de Houari Boumediene, c’est-à-dire, la sécurité militaire de l’époque ! L’artisan inconditionnel de ce retour, feu le général Larbi Belkheir, a plaidé sa cause auprès des chefs de l’institution militaire (1), auprès de la France et des pays du Golfe, les plus influents. Il fut, comme tout le monde le sait, le premier à être sacrifié sur l’autel d’une politique de destruction systématique, de tous prétendants au partage du pouvoir ou du moins, se considérant comme ayant été déterminants dans l’ascension présidentielle et donc éligibles au partage des rentes, liée au pouvoir.
Son renvoi humiliant et humilié, de la présidence de la république, n’a pas servi de leçons aux autres généraux, tenants du pouvoir, pour prendre la décision de déchoir le Président, dès le premier mandat, alors qu’ils pouvaient aisément le faire (2). Chacun d’eux a fait son calcul personnel, trop heureux de voir débarquer d’une pièce capitale du pouvoir de l’époque, d’autant que le TPI leur pendait au nez et qu’il redoublait d’efforts pour leur demander des comptes sur ce que nous appelons pudiquement la "décennie noire". Pour arriver à ses fins, le président a compris que seul un découplage de l’institution militaire, entre le corps de bataille et les services de sécurité, pouvait lui assurer la pérennité au pouvoir, tout en lui permettant de mener à bien cette mission "d’épuration" de tous ceux, civils et militaires, qui prétendaient partager son pouvoir.
Utilisant tantôt l’un, tantôt l’autre, en fonction du rapport de force du moment, il va créer des tensions antagoniques entre les tenants du pouvoir, en distribuant parcimonieusement, ses attributs, afin d’éliminer tous ceux qui lui contestent la manière dont il partage de la rente. Cette politique est construite sur une déstabilisation permanente des institutions et leurs responsables de manière systématique, consommant ainsi des centaines de cadres, d’officiers supérieurs, de ministres, une dizaine de Premiers ministres et de chefs du gouvernement et bien entendu des milliards de dollars US, à travers le FRR (3). Cette politique d’éradication politique, par le vide, va être dévastatrice pour notre pays et en particulier pour les élites, qui n’auront pour choix qu’entre l’obséquiosité et l’apologie du pouvoir ou l’exil intérieur et extérieur. En même temps, cette politique va favoriser l’installation de la médiocrité et le régionalisme, dans toutes les institutions, les organismes, les entreprises, les partis, les syndicats, la diplomatie, l’éducation, l’université, l’art, la culture, la religion… à la recherche permanente des rentes et des attributs du pouvoir, ce qui va structurer sociologiquement la nation algérienne.
Ainsi, pour consolider son pouvoir durant son premier mandat, les services de sécurité (organisés autour du DRS) vont être "privilégiés" pour mater les coups de boutoirs portés par le chef d’état-major, commandant du corps de bataille (4).Cette politique va payer puisque ces derniers lui ont assuré quatre mandats consécutifs (5) et peut-être même un cinquième, si ce n’était l’incident cardiovasculaire du Président et la problématique de sa succession, qui vont brouiller les "cartes boulitiques" et qui vont aboutir au départ coloré du commandant du DRS et de la concentration du pouvoir de l’institution militaire, entre les mains de son chef d’état-major et vice-ministre de la défense (6) !
Comme analysé dans diverses contributions antérieurement, la problématique du cinquième mandat, anticipé ou pas, est réelle, n’en déplaise à ceux qui persistent dans le déni de la réalité politique de notre pays, niant l’évidence d’une lutte clanique (7) et la victoire incontestable d’un clan du Pouvoir sur l’autre. Le vainqueur tente d’éradiquer le vaincu, là où ils se trouvent afin de neutraliser ses capacités de nuisance (8) et de récupérer tous les leviers du Pouvoir (9)… Apparemment, peu importe le nom du successeur pour réaliser ce cinquième mandat (10). Sans changement systémique, il faut occuper le terrain "boulitique" (11) et mettre en œuvre les moyens de son redéploiement (12). Tel est le leitmotiv du Pouvoir actuel. Il ne faut surtout pas laisser, à l’opposition officielle, regroupée au sein des partis et les personnalités politiques, l’annexion du terrain sociopolitique et économique. Pour cela, tout est bon pour gagner du temps et du temps il en faut, pour ce Pouvoir agonisant, afin d’organiser la mise en œuvre d’une passation de pouvoir à son seul profit et sous son contrôle, appliquant ainsi, la formule désastreuse, usitée depuis l’indépendance, dite du "changement dans la continuité".
Pour le Pouvoir, il n’est donc pas question de changer de mode de gouvernance mais simplement de changer d’homme et l’"homme providentiel", il semble l’avoir trouvé, c’est l’actuel Président… pourvu que Dieu lui prête vie (13), enfin presque, compte tenu des dernières manœuvres sournoises révélées (14). Le danger mortel pour le Pouvoir réside dans le fait que certaines voix s’élèvent clairement pour demander un "changement systémique comme solution durable" et entre autres, celle de M. Mouloud Hamrouche (15), qui lui est particulièrement subversive et nocive, puisqu’il s’égosille à répéter, à chacune de ses sorties médiatiques, qu’on lui autorise, que la seule solution durable réside dans le "changement du système de gouvernance" tout en ajoutant que le système politique, à bout de souffle, "ne sait pas comment finir cette crise" (16). Il met, en garde, une énième fois, contre "le maintien d’un statu quo malgré le danger qu’il fait peser sur le pays, sur son devenir et sur son unité". Il va, en outre, imputer cette situation chaotique et en régression constante, à une règle chère au système dont il a usé et abusé : La cooptation (17). Est-ce une découverte ? Certainement pas, cette règle redoutable et inamovible c’est tellement incrustée dans le système qu’elle fait corps avec lui (18), obtenant le statut labélisé d’instrument privilégié du Pouvoir algérien. Il conclura que cet instrument a permis «d’alterner des hommes, des équipe, des citoyens et la société de s’épanouir, de se projeter et de se donner un destin… Elle sert à nourrir des rivalités et des luttes de clans. Elle a besoin des gardiens du temple pour fonctionner et de broyer pour survivre» ! Tout est dit ou presque… puisqu’il ajoutera que le danger caché réside dans l’action pernicieuse de cette règle qui a «déstructuré l’idée nationale comme elle a détruit la volonté nationale au profit des penchants régionalistes».
Or, qui a été le concepteur et l’agent d’exécution de la cooptation ? La question mérite un détour, que visiblement peu d’hommes politiques abordent avec sérénité. A n’en pas douter, cette règle a trouvé sa raison d’être et ses adeptes, dès le début de la prise de conscience par le peuple algérien de sa situation de colonisé. Les animateurs de cette prise de conscience ont considéré que la notion de zaïm, pouvait aider à cette action d’éveil des masses populaires et notamment avec l’avènement de Messali Hadj (19) à la tête du mouvement national (20), incarné par ses différents partis (l’étoile nord-africaine, le PPA, le MTLD et le MNA). Pour beaucoup d’historiens, la création du FLN venait en réaction à cette notion de zaïm (21), puisque ses fondateurs vont prôner, au contraire, comme principe de base la collégialité, au sein des instances dirigeantes du parti et la liberté citoyenne, dans l’exercice du pouvoir politique. Ces principes sont clairement affirmés par le Congrès de la Soummam (22), conçu sous l’autorité morale d’Abane Ramdane, auquel on doit la phrase programme-politique "la primauté du politique sur le militaire et celle de l’intérieur sur l’extérieur" (23). Il faut attendre la création du GPRA et les crises qui vont l’opposer à l’état-major général pour voir l’émergence des prémices d’un régime autocratique, s’installaient subrepticement et se renforçaient, par coups d’Etat successifs, pour aboutir à ce que nous vivons actuellement, à savoir une dictature absolue spécifique, enturbannée d’un vernis démocratique (24).
S’agissant des organes d’exécution de cette règle, il faut se replonger dans l’histoire de la création du MALG, comme instrument essentiel de «renseignement et de soutien multiforme aux forces combattantes», pour analyser l’évolution des différentes organisations et des missions qui lui ont été assignées par les Pouvoirs du moment, pour prétendre comprendre comment ses services ont évolué, depuis la Sécurité Militaire jusqu’à l’actuelle Direction de la Sécurité intérieure, après le passage triomphant par le Département du Renseignement et de la Sécurité (25). Certains vont les dénommer "police politique", d’autres de «services secrets ou de renseignements» enfin d’aucun considère que cet instrument est entre les mains de la «mafia politico-financière» (26)… La réalité crue révèle que les différentes formes qu’ont revêtu les services de sécurité (27) ont été celles que les Pouvoirs du moment ont exigé qu’elles soient, pour servir leurs intérêts exclusifs, sous couvert de servir l’intérêt général du pays et notamment, pour ce qui concerne le partage du pouvoir. En effet, la mise en œuvre de toutes les désignations électives de tous les présidents de la république (poste-clé dans l’organigramme institutionnel de notre pays) depuis l’indépendance jusqu’au jour d’aujourd’hui, en est la preuve par neuf et en commençant par celle d’A. Ben bella, suivie de M. Boukharouba alias H. Boumediene. La restructuration actuelle de ce service ne trompe personne (28), elle correspond simplement à la mise en œuvre de nouvelles missions que le clan, sorti vainqueur, a décidé de mettre en place (29), pour préparer la cinquième désignation élective.
A ce propos, M. Hamrouche dira qu’"il ne faut pas se réjouir du sort des personnes qui sont tombées ni être pessimiste pour ceux qui arrivent", rappelant ainsi à tous que c’est bien le DRS qui a intronisé le Président actuel, en 1999 et c’est également lui qui lui a permis quatre mandats consécutifs, neutralisant toute idée d’alternance au pouvoir (pourtant constitutionalisée par le pPrésident L. Zeroual) et notamment lors du troisième mandat, au détriment des autres candidatures (notamment celles des 7+1) qui ont dû interrompre leur participation à un scrutin dont le résultat était préfabriqué à l’avance ! Dès lors, il ajoutera, non sans une pointe d’humour, que "pour cette institution, les changements n’ont pas touché que les personnes, ils ont concerné aussi des aspects liés à son fonctionnement, ce qui est encourageant" puisque la thèse officielle consiste à lier la restructuration du DRS au retour à "l’Etat civil", ce qui revient à avouer, indirectement, que notre pays vivait, avant cette opération, sous une dictature militaire. Cependant, remarquera-t-il, pour que l’armée obéisse aux politiques, il faut que leurs décisions soient dictées par "des institutions politiques légitimes" (30) et il faut que ces décisions «remplissent toutes les conditions légales… Or, il se trouve que cette légitimité politique fait défaut en Algérie". Comment donc reconstruire cette légitimité perdue et par quels cheminements y accéder ? La réponse, dira-t-il, est, on ne peut plus claire : "Il faut commencer par changer de système !". (A suivre)
Mourad Goumiri, Professeur associé
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En effet, deux objectifs vitaux ont animé l’action du Président dès son intronisation : liquider, d’une manière ou d’une autre, tous ceux qui ont contribué, de près ou de loin, à sa désignation élective et prendre sa revanche sur ceux qui l’on éliminé du chemin de la présidence à la mort de Houari Boumediene, c’est-à-dire, la sécurité militaire de l’époque ! L’artisan inconditionnel de ce retour, feu le général Larbi Belkheir, a plaidé sa cause auprès des chefs de l’institution militaire (1), auprès de la France et des pays du Golfe, les plus influents. Il fut, comme tout le monde le sait, le premier à être sacrifié sur l’autel d’une politique de destruction systématique, de tous prétendants au partage du pouvoir ou du moins, se considérant comme ayant été déterminants dans l’ascension présidentielle et donc éligibles au partage des rentes, liée au pouvoir.
Son renvoi humiliant et humilié, de la présidence de la république, n’a pas servi de leçons aux autres généraux, tenants du pouvoir, pour prendre la décision de déchoir le Président, dès le premier mandat, alors qu’ils pouvaient aisément le faire (2). Chacun d’eux a fait son calcul personnel, trop heureux de voir débarquer d’une pièce capitale du pouvoir de l’époque, d’autant que le TPI leur pendait au nez et qu’il redoublait d’efforts pour leur demander des comptes sur ce que nous appelons pudiquement la "décennie noire". Pour arriver à ses fins, le président a compris que seul un découplage de l’institution militaire, entre le corps de bataille et les services de sécurité, pouvait lui assurer la pérennité au pouvoir, tout en lui permettant de mener à bien cette mission "d’épuration" de tous ceux, civils et militaires, qui prétendaient partager son pouvoir.
Utilisant tantôt l’un, tantôt l’autre, en fonction du rapport de force du moment, il va créer des tensions antagoniques entre les tenants du pouvoir, en distribuant parcimonieusement, ses attributs, afin d’éliminer tous ceux qui lui contestent la manière dont il partage de la rente. Cette politique est construite sur une déstabilisation permanente des institutions et leurs responsables de manière systématique, consommant ainsi des centaines de cadres, d’officiers supérieurs, de ministres, une dizaine de Premiers ministres et de chefs du gouvernement et bien entendu des milliards de dollars US, à travers le FRR (3). Cette politique d’éradication politique, par le vide, va être dévastatrice pour notre pays et en particulier pour les élites, qui n’auront pour choix qu’entre l’obséquiosité et l’apologie du pouvoir ou l’exil intérieur et extérieur. En même temps, cette politique va favoriser l’installation de la médiocrité et le régionalisme, dans toutes les institutions, les organismes, les entreprises, les partis, les syndicats, la diplomatie, l’éducation, l’université, l’art, la culture, la religion… à la recherche permanente des rentes et des attributs du pouvoir, ce qui va structurer sociologiquement la nation algérienne.
Ainsi, pour consolider son pouvoir durant son premier mandat, les services de sécurité (organisés autour du DRS) vont être "privilégiés" pour mater les coups de boutoirs portés par le chef d’état-major, commandant du corps de bataille (4).Cette politique va payer puisque ces derniers lui ont assuré quatre mandats consécutifs (5) et peut-être même un cinquième, si ce n’était l’incident cardiovasculaire du Président et la problématique de sa succession, qui vont brouiller les "cartes boulitiques" et qui vont aboutir au départ coloré du commandant du DRS et de la concentration du pouvoir de l’institution militaire, entre les mains de son chef d’état-major et vice-ministre de la défense (6) !
Comme analysé dans diverses contributions antérieurement, la problématique du cinquième mandat, anticipé ou pas, est réelle, n’en déplaise à ceux qui persistent dans le déni de la réalité politique de notre pays, niant l’évidence d’une lutte clanique (7) et la victoire incontestable d’un clan du Pouvoir sur l’autre. Le vainqueur tente d’éradiquer le vaincu, là où ils se trouvent afin de neutraliser ses capacités de nuisance (8) et de récupérer tous les leviers du Pouvoir (9)… Apparemment, peu importe le nom du successeur pour réaliser ce cinquième mandat (10). Sans changement systémique, il faut occuper le terrain "boulitique" (11) et mettre en œuvre les moyens de son redéploiement (12). Tel est le leitmotiv du Pouvoir actuel. Il ne faut surtout pas laisser, à l’opposition officielle, regroupée au sein des partis et les personnalités politiques, l’annexion du terrain sociopolitique et économique. Pour cela, tout est bon pour gagner du temps et du temps il en faut, pour ce Pouvoir agonisant, afin d’organiser la mise en œuvre d’une passation de pouvoir à son seul profit et sous son contrôle, appliquant ainsi, la formule désastreuse, usitée depuis l’indépendance, dite du "changement dans la continuité".
Pour le Pouvoir, il n’est donc pas question de changer de mode de gouvernance mais simplement de changer d’homme et l’"homme providentiel", il semble l’avoir trouvé, c’est l’actuel Président… pourvu que Dieu lui prête vie (13), enfin presque, compte tenu des dernières manœuvres sournoises révélées (14). Le danger mortel pour le Pouvoir réside dans le fait que certaines voix s’élèvent clairement pour demander un "changement systémique comme solution durable" et entre autres, celle de M. Mouloud Hamrouche (15), qui lui est particulièrement subversive et nocive, puisqu’il s’égosille à répéter, à chacune de ses sorties médiatiques, qu’on lui autorise, que la seule solution durable réside dans le "changement du système de gouvernance" tout en ajoutant que le système politique, à bout de souffle, "ne sait pas comment finir cette crise" (16). Il met, en garde, une énième fois, contre "le maintien d’un statu quo malgré le danger qu’il fait peser sur le pays, sur son devenir et sur son unité". Il va, en outre, imputer cette situation chaotique et en régression constante, à une règle chère au système dont il a usé et abusé : La cooptation (17). Est-ce une découverte ? Certainement pas, cette règle redoutable et inamovible c’est tellement incrustée dans le système qu’elle fait corps avec lui (18), obtenant le statut labélisé d’instrument privilégié du Pouvoir algérien. Il conclura que cet instrument a permis «d’alterner des hommes, des équipe, des citoyens et la société de s’épanouir, de se projeter et de se donner un destin… Elle sert à nourrir des rivalités et des luttes de clans. Elle a besoin des gardiens du temple pour fonctionner et de broyer pour survivre» ! Tout est dit ou presque… puisqu’il ajoutera que le danger caché réside dans l’action pernicieuse de cette règle qui a «déstructuré l’idée nationale comme elle a détruit la volonté nationale au profit des penchants régionalistes».
Or, qui a été le concepteur et l’agent d’exécution de la cooptation ? La question mérite un détour, que visiblement peu d’hommes politiques abordent avec sérénité. A n’en pas douter, cette règle a trouvé sa raison d’être et ses adeptes, dès le début de la prise de conscience par le peuple algérien de sa situation de colonisé. Les animateurs de cette prise de conscience ont considéré que la notion de zaïm, pouvait aider à cette action d’éveil des masses populaires et notamment avec l’avènement de Messali Hadj (19) à la tête du mouvement national (20), incarné par ses différents partis (l’étoile nord-africaine, le PPA, le MTLD et le MNA). Pour beaucoup d’historiens, la création du FLN venait en réaction à cette notion de zaïm (21), puisque ses fondateurs vont prôner, au contraire, comme principe de base la collégialité, au sein des instances dirigeantes du parti et la liberté citoyenne, dans l’exercice du pouvoir politique. Ces principes sont clairement affirmés par le Congrès de la Soummam (22), conçu sous l’autorité morale d’Abane Ramdane, auquel on doit la phrase programme-politique "la primauté du politique sur le militaire et celle de l’intérieur sur l’extérieur" (23). Il faut attendre la création du GPRA et les crises qui vont l’opposer à l’état-major général pour voir l’émergence des prémices d’un régime autocratique, s’installaient subrepticement et se renforçaient, par coups d’Etat successifs, pour aboutir à ce que nous vivons actuellement, à savoir une dictature absolue spécifique, enturbannée d’un vernis démocratique (24).
S’agissant des organes d’exécution de cette règle, il faut se replonger dans l’histoire de la création du MALG, comme instrument essentiel de «renseignement et de soutien multiforme aux forces combattantes», pour analyser l’évolution des différentes organisations et des missions qui lui ont été assignées par les Pouvoirs du moment, pour prétendre comprendre comment ses services ont évolué, depuis la Sécurité Militaire jusqu’à l’actuelle Direction de la Sécurité intérieure, après le passage triomphant par le Département du Renseignement et de la Sécurité (25). Certains vont les dénommer "police politique", d’autres de «services secrets ou de renseignements» enfin d’aucun considère que cet instrument est entre les mains de la «mafia politico-financière» (26)… La réalité crue révèle que les différentes formes qu’ont revêtu les services de sécurité (27) ont été celles que les Pouvoirs du moment ont exigé qu’elles soient, pour servir leurs intérêts exclusifs, sous couvert de servir l’intérêt général du pays et notamment, pour ce qui concerne le partage du pouvoir. En effet, la mise en œuvre de toutes les désignations électives de tous les présidents de la république (poste-clé dans l’organigramme institutionnel de notre pays) depuis l’indépendance jusqu’au jour d’aujourd’hui, en est la preuve par neuf et en commençant par celle d’A. Ben bella, suivie de M. Boukharouba alias H. Boumediene. La restructuration actuelle de ce service ne trompe personne (28), elle correspond simplement à la mise en œuvre de nouvelles missions que le clan, sorti vainqueur, a décidé de mettre en place (29), pour préparer la cinquième désignation élective.
A ce propos, M. Hamrouche dira qu’"il ne faut pas se réjouir du sort des personnes qui sont tombées ni être pessimiste pour ceux qui arrivent", rappelant ainsi à tous que c’est bien le DRS qui a intronisé le Président actuel, en 1999 et c’est également lui qui lui a permis quatre mandats consécutifs, neutralisant toute idée d’alternance au pouvoir (pourtant constitutionalisée par le pPrésident L. Zeroual) et notamment lors du troisième mandat, au détriment des autres candidatures (notamment celles des 7+1) qui ont dû interrompre leur participation à un scrutin dont le résultat était préfabriqué à l’avance ! Dès lors, il ajoutera, non sans une pointe d’humour, que "pour cette institution, les changements n’ont pas touché que les personnes, ils ont concerné aussi des aspects liés à son fonctionnement, ce qui est encourageant" puisque la thèse officielle consiste à lier la restructuration du DRS au retour à "l’Etat civil", ce qui revient à avouer, indirectement, que notre pays vivait, avant cette opération, sous une dictature militaire. Cependant, remarquera-t-il, pour que l’armée obéisse aux politiques, il faut que leurs décisions soient dictées par "des institutions politiques légitimes" (30) et il faut que ces décisions «remplissent toutes les conditions légales… Or, il se trouve que cette légitimité politique fait défaut en Algérie". Comment donc reconstruire cette légitimité perdue et par quels cheminements y accéder ? La réponse, dira-t-il, est, on ne peut plus claire : "Il faut commencer par changer de système !". (A suivre)
Mourad Goumiri, Professeur associé
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