Madani Mezrag ne regrette rien
ALGÉRIE - 25 décembre 2005 - par FARID ALILAT, ENVOYÉ SPÉCIAL À JIJEL
Rangé du terrorisme, l'ancien chef de l'Armée islamique du salut prêche aujourd'hui la concorde sans pour autant renier son passé.
Au téléphone, la voix de Madani Mezrag est rassurante : « Vous êtes le journaliste venu de Paris ? Bienvenue à Jijel ! Pour l'adresse, demandez à n'importe quel passant. Tout le monde connaît la maison de Mezrag. » À Kaous, petit village situé à mi-chemin entre la ville côtière de Jijel - à quelque 350 km à l'est d'Alger - et les anciens maquis terroristes d'Oum el-Hout, rares, en effet, sont ceux qui ne connaissent pas cet homme. Hier chef d'une organisation terroriste, l'AIS (Armée islamique du salut), Madani Mezrag est aujourd'hui un notable. Après avoir pris les armes en 1993, mené une guerre impitoyable à l'État algérien, il négocie une trêve avec les généraux en 1997 et bénéficie en janvier 2000 d'une amnistie totale pour lui et les 5 000 combattants de son organisation.
Rangé du terrorisme, Madani Mezrag est devenu un personnage fréquentable et sollicité. Il passe à la télévision, donne des conférences pour prêcher la réconciliation nationale et n'hésite pas à s'afficher au premier rang dans les meetings du chef de l'État. C'est dans son local commercial chichement meublé - des étagères vides, deux chaises en plastique et une petite table - qu'il nous reçoit. Ses visiteurs ? Des repentis qui sollicitent une aide matérielle, d'ex-compagnons d'armes venus prendre des nouvelles du chef ou de simples citoyens qui s'arrêtent pour dire bonjour, et, bien sûr, des journalistes.
« Si j'étais encore au maquis, je n'aurais jamais accepté de vous rencontrer », affirme Madani Mezrag. En 1994, il avait pourtant reçu Phil Rees, reporter à la BBC, l'un des rares journalistes occidentaux à avoir réussi à pénétrer les maquis de l'AIS. À l'époque, lorsque Phil Rees entre en contact avec lui, il ignore totalement le sort que pourrait lui réserver cette entrevue. « Si je vous rencontre, qu'est-ce que je risque ? » demande Rees. La réponse de Mezrag est ironique : « Dans le meilleur des cas, une mort douce. » Phil Rees aurait très bien pu subir les pires tortures avant d'être égorgé. Mais il est reparti vivant. D'autres journalistes, algériens ou étrangers, n'ont pas eu la même baraka que Phil Rees.
Il est donc loin le temps où Madani Mezrag menait la guerre aux militaires, aux policiers, aux intellectuels, bref, à tous ceux qui symbolisaient, de près ou de loin, le taghout, c'est-à-dire le tyran, l'État impie. L'Algérie a changé, et Madani Mezrag aussi. Il a renoncé à la lutte armée, le terrorisme islamiste est vaincu et la paix est enfin de retour au pays. Aujourd'hui que Madani Mezrag prêche la concorde, il peut donc rencontrer un journaliste sans que la vie de ce dernier ne soit menacée.
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http://www.jeuneafrique.com/jeune_af...26madanneiret0
ALGÉRIE - 25 décembre 2005 - par FARID ALILAT, ENVOYÉ SPÉCIAL À JIJEL
Rangé du terrorisme, l'ancien chef de l'Armée islamique du salut prêche aujourd'hui la concorde sans pour autant renier son passé.
Au téléphone, la voix de Madani Mezrag est rassurante : « Vous êtes le journaliste venu de Paris ? Bienvenue à Jijel ! Pour l'adresse, demandez à n'importe quel passant. Tout le monde connaît la maison de Mezrag. » À Kaous, petit village situé à mi-chemin entre la ville côtière de Jijel - à quelque 350 km à l'est d'Alger - et les anciens maquis terroristes d'Oum el-Hout, rares, en effet, sont ceux qui ne connaissent pas cet homme. Hier chef d'une organisation terroriste, l'AIS (Armée islamique du salut), Madani Mezrag est aujourd'hui un notable. Après avoir pris les armes en 1993, mené une guerre impitoyable à l'État algérien, il négocie une trêve avec les généraux en 1997 et bénéficie en janvier 2000 d'une amnistie totale pour lui et les 5 000 combattants de son organisation.
Rangé du terrorisme, Madani Mezrag est devenu un personnage fréquentable et sollicité. Il passe à la télévision, donne des conférences pour prêcher la réconciliation nationale et n'hésite pas à s'afficher au premier rang dans les meetings du chef de l'État. C'est dans son local commercial chichement meublé - des étagères vides, deux chaises en plastique et une petite table - qu'il nous reçoit. Ses visiteurs ? Des repentis qui sollicitent une aide matérielle, d'ex-compagnons d'armes venus prendre des nouvelles du chef ou de simples citoyens qui s'arrêtent pour dire bonjour, et, bien sûr, des journalistes.
« Si j'étais encore au maquis, je n'aurais jamais accepté de vous rencontrer », affirme Madani Mezrag. En 1994, il avait pourtant reçu Phil Rees, reporter à la BBC, l'un des rares journalistes occidentaux à avoir réussi à pénétrer les maquis de l'AIS. À l'époque, lorsque Phil Rees entre en contact avec lui, il ignore totalement le sort que pourrait lui réserver cette entrevue. « Si je vous rencontre, qu'est-ce que je risque ? » demande Rees. La réponse de Mezrag est ironique : « Dans le meilleur des cas, une mort douce. » Phil Rees aurait très bien pu subir les pires tortures avant d'être égorgé. Mais il est reparti vivant. D'autres journalistes, algériens ou étrangers, n'ont pas eu la même baraka que Phil Rees.
Il est donc loin le temps où Madani Mezrag menait la guerre aux militaires, aux policiers, aux intellectuels, bref, à tous ceux qui symbolisaient, de près ou de loin, le taghout, c'est-à-dire le tyran, l'État impie. L'Algérie a changé, et Madani Mezrag aussi. Il a renoncé à la lutte armée, le terrorisme islamiste est vaincu et la paix est enfin de retour au pays. Aujourd'hui que Madani Mezrag prêche la concorde, il peut donc rencontrer un journaliste sans que la vie de ce dernier ne soit menacée.
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