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Ces Algériens à la recherche d'un eldorado en Europe

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  • Ces Algériens à la recherche d'un eldorado en Europe

    Comment vivent tous ces jeunes Algériens qui tentent l'aventure de l'émigration en Europe ? Parviennent-ils à s'adapter au rythme de vie infernal qu'impose le système capitaliste dominant en Europe ? Ont-ils pu survivre à la désastreuse crise économique mondiale qui a provoqué, surtout, une baisse sensible de l'activité économique et par ricochet une crise de l'emploi ?

    Nous avons rencontré des jeunes Algériens de Tizi Ouzou, Béjaïa, d'Alger, qui vivent en France depuis plusieurs mois et pour certains d'entre eux depuis des années. Ils nous parlent du contexte difficile dans lequel ils évoluent. "La vie devient très chère, je suis obligé de travailler presque toute la journée pour pouvoir garantir à mes enfants une vie décente, ces derniers mois nous étions contraints à faire des restrictions importantes sur nos dépenses quotidiennes", nous dit Kamel la trentaine, vivant à Paris depuis quatre ans. Pour notre interlocuteur, rencontré à Bobigny (banlieue parisienne), les effets de la crise économique mondiale se font chaque jour ressentir. "Il n'est plus rare de rencontrer des Français dans les marchés populaires, destinés par le passé aux “Arabes” et autre ressortissants des pays africains ; même eux subissent de plein fouet cette situation qui n'arrange vraiment personne", ajoute Kamel.

    Au marché populaire de Bobigny, ça grouille de monde en ce lundi. Il est 13 heures et la grande place du marché ne désemplit pas encore. Rabah, qui est étudiant à l'université de Paris VII, joue le guide et nous présente un commerçant “ambulant” originaire de la région des Ouacifs à Tizi Ouzou. "Les gens n'achètent plus comme avant, on est obligé de faire à chaque fois des rabais et parfois on vend au prix de revient, les clients achetant juste, ils sont là car nous vendons moins cher, le marché populaire n'est plus uniquement la destination des gens du sud comme on nous appelle ici, même les Français y viennent car la crise touche tout le monde", indique notre interlocuteur qui ne se prive pas de crier pour faire valoir l'avantage du prix. "Un euro le kilo de pomme de terre" criera-t-il entre deux phrases.

    On prépare déjà le départ au bled

    En fait, ici on ne se sent nullement dépaysé c'est absolument la même ambiance du "bled". Notre accompagnateur fait remarquer que nos compatriotes se préparent déjà pour la saison estivale. "Ils sont là pour acheter graduellement les cadeaux pour leurs familles, c'est aussi là une question épineuse car avec une telle situation financière, les gens d'ici appréhendent beaucoup cette période", d’enchaîner : "Les membres de nos familles attendent toujours notre arrivée. On ne peut pas rentrer les mains vides, c’est pour cette raison que la plupart préfèrent faire l'impasse sur les vacances au pays pour éviter toutes ces dépenses supplémentaires", note Rabah. Il faut dire que les prix affichés sur les étals des différents marchés de la région parisienne que nous avons visités, sont élevés. C'est le cas de le dire pour le marché dit Les quatre chemins de Pantin, au cœur de la région parisienne. Ici nous avons eu l'occasion de rencontrer beaucoup d'Algériens à la recherche des “bons prix”. C'est le cas de Ahcène, la cinquantaine, qui vit à Pantin depuis plus de vingt ans."Ecoutez, les choses ont beaucoup changé, l'image que nous véhiculons est tristement mauvaise, en plus le pouvoir d'achat a sensiblement chuté", déplore notre interlocuteur, lequel nous proposera de faire une virée en ville où plusieurs Algériens vivent, en particulier des Kabyles sans papiers. Là nous découvrons l'autre face de la capitale de l'Hexagone, des murs défoncés, une incroyable insalubrité qui nous rappelle les quartiers de la banlieue d'Alger. C’est un quartier habité en majorité par des immigrés d'origine maghrébine, nous avons rencontré Madjid qui travaille dans le bâtiment. "Je travaille dans le secteur du bâtiment depuis mon arrivée à Paris, ce n'est pas du tout évident de trouver un chantier car ces derniers mois l'activité a sensiblement baissé, en plus nous sommes presque obligés d'être à l'affût de tout contrôle de la police", nous dit Madjid. Ce dernier, qui vient de Maâtkas, nous fait savoir que deux jeunes Kabyles ont été appréhendés par la police avant-hier. "Les sans-papiers sont sur le-qui-vive depuis la mise en place de la nouvelle politique d'immigration de Sarkozy, nous vivons une terrible pression, c'est presque du cache-cache avec la police, on tente toujours d'éviter les endroits fréquentés par beaucoup de gens pour écarter toute mauvaise surprise" raconte encore notre interlocuteur.

    La galère au pays de Jean Jaurès…

    Un autre jeune Kabyle, Arezki, originaire de la région des Ouadhias, dit avoir eu affaire, à plusieurs reprises, à des contrôles de police. "A chaque fois on est contraint d'inventer une histoire … chercher une échappatoire, ce qui n'est pas du tout évident dans ces conditions", affirme Arezki. Ce dernier qui travaille à Sevran, dans la banlieue parisienne, ne cache pas son désir d'y rester malgré toutes ces difficultés. "Nous sommes devant un vrai dilemme, rester ou rentrer au pays. Ici, même si nous évoluons dans la précarité, nous pouvons tout de même travailler, c'est ce qui nous a obligés d’ailleurs à quitter le pays, le chômage et la malvie". Ces jeunes du bled, comme on les appelle ici en France, résistent à tout, l’essentiel est de rester là où on ne pourrait pas les voir. "Je connais des dizaines de jeunes Kabyles qui veulent bien et rentrer au pays mais leur situation financière ne leur permet pas. Vous savez bien comment les gens du bled nous considèrent, tu en France donc automatiquement tu dois avoir les moyens, le pécu, alors qu’eux n'arrivent même pas à subvenir aux besoins de la vie quotidienne, comme l’a dit si bien Lounis Aït Menguellet " indique encore Madjid, qui avoue lui aussi vouloir rentrer : "Dans le fond, j’aimerais bien retourner chez ma famille, mais je suis trop fatigué maintenant et puis c’est la honte, revenir sans rien, après toutes ces années passées en Europe. Surtout que certains ont réussi". Même s'ils ne sont pas nombreux, les Kabyles sont aussi présents dans la région nord de la France. A Grenoble, par exemple, des jeunes Algériens tentent de lutter contre de la discrimination raciale pour s'imposer dans différents domaines, c'est le cas de Akli un jeune réalisateur algérien qui a réussi à marquer de son empreinte la vie culturelle à Grenoble. Il pense qu’il faut absolument que l’immigré soit compétent pour qu’il puisse imposer le respect. Makhlouf, qui vit en Normandie, nous parle de la situation de la classe ‘intellect’ d’Algériens vivant en France. Il citera notamment le cas des étudiants : "Je vais vous parler de cette frange d’immigrés qui galèrent en France. Un grand nombre d’entre eux se retrouvent en situation irrégulière car quelques préfectures refusent de leur renouveler leurs titres de séjour, ils sont considérés comme des clandestins, sans papiers comme les autres", notera notre interlocuteur.

    Des Algériens qui réussissent malgré tout …

    Il y a tout de même des Algériens qui ont pu s’imposer et réussir leur vie en Europe. C’est le cas de Tassadit, une Kabyle de la région de Ouadhias. Elle est diplômée de l’université de Tizi Ouzou, à la faculté des sciences juridiques. "J’avoue que ça n’a pas été du tout facile. J’ai dû consentir beaucoup de sacrifices pour atteindre mes objectifs. Je suis actuellement directrice de formation dans un centre privé à Paris. Et je suis fière de ce que j’ai pu faire jusque-là", raconte Tassadit. Entre les sans-papiers qui éprouvent moult difficultés à évoluer dans un contexte qui leur est hostile et ceux qui ont plus au moins réussi leur séjour en Europe, un élément les réunit : l’amour indéniable du pays et une nostalgie pour tout ce qui représente l’Algérie. N’est-ce pas André Suarès qui disait que c’est aux passions seulement que les idées empruntent la vie.

    Par la Dépêche de Kabylie
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