In Libération du 10.04.2004 Par Florence Aubenas
Propos désolants en gras
l est 10 heures vendredi et les cadres du FLN qui grimpent l'escalier du siège de l'ex-parti unique, à Alger, ont la gueule retournée des mauvais lendemains électoraux. Aucun résultat officiel mais la rumeur circule : Bouteflika aurait été réélu. Mohammed Allallou n'en revient toujours pas. Il y a vingt-quatre heures, cet ancien ministre des Sports était persuadé qu'Ali Benflis, ex-chef de gouvernement de Bouteflika, l'emporterait. Allallou n'était pas le seul. Une partie de la classe politique, des hommes de presse, des hauts fonctionnaires, bref de ceux qu'on appelle ici «l'élite», jurait la veille encore de la victoire de Benflis. Dans ce pays où c'est la haute hiérarchie militaire qui fait et défait les présidents, des «assurances avaient été données que nous pouvions y aller», assure un cadre du FLN. Allallou : «Ils nous ont roulés.»
A l'état-major de Benflis, la télé est branchée sur l'annonce des résultats. Le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, fait durer le suspense. Dans l'assistance, un cadre du FLN veut encore y croire. Calme sa voisine : «On aura au moins un deuxième tour.» ça y est, ça tombe. Bouteflika : 83,7 %. Pas un mot. Puis on parle de fraude massive. De recours à déposer. «C'est l'humiliation.»
Brouhaha de panique. A toute élection, n'importe quel gamin peut désigner les yeux fermés les candidats chargés de faire de la figuration et celui que les décideurs militaires ont adoubé. Or, pour la première fois, «le système avait aligné deux chevaux, Bouteflika et Benflis, explique un fin connaisseur du sérail. Chacun était persuadé d'être l'élu des militaires.» La campagne s'est, du coup, déchaînée, en pamphlets, en écrits, déchirant un milieu jusque-là soudé par ses privilèges et sa proximité du pouvoir. Vendredi, chez les perdants, on sentait monter les premiers regrets. Un brouhaha de panique chez ces habitués aux bonnes grâces. «La vengeance de Bouteflika va être terrible, dit un cadre. Je vais peut-être aller quelques mois me faire oublier à Paris.» Depuis six mois, il avait régulièrement en ligne «un colonel qui nous promettait tout». Son portable ne répond plus.
Benflis arrive. Une femme en pleurs se précipite sur lui. Abda Hadda possède et dirige le quotidien El Fadj : «On s'était engagés à fond. Et on nous lâche de partout.» A commencer par «le peuple», cette société de «corrompus qui s'est laissé acheter par Bouteflika». Des incapables. Des analphabètes. «On ne peut jamais leur faire confiance : déjà, ils avaient voté FIS en 1991», martèle un apparatchik. «L'armée avait promis qu'elle interviendrait en cas de fraude généralisée, dit une magistrate. Sans bain de sang bien sûr.» En 1991 déjà, elle avait soutenu l'annulation des élections par les militaires, qui avait provoqué une guerre civile qui a fait de 150 000 à 200 000 morts. Abda Hadda aussi. «On a toujours été avec eux. Alors, qu'ils se démerdent comme ils veulent, mais qu'ils nous enlèvent Bouteflika.»
«Le message est clair.» La veille, dans la nuit, un appel à une «marche pacifique spontanée» avait été lancé depuis le QG de Benflis. Vers 23 heures, une centaine de personnes, en tailleur et cravate, se retrouvent place du 1er-Mai devant un impressionnant cordon policier. Ça matraque tout de suite. «Le message est clair», dit un membre de cette nouvelle opposition. Il remonte dans sa Mercedes. Un groupe de jeunes surgit. Ils allument des pétards, pulvérisent du Flytox pour l'incendier. Hurlent «Vive Bouteflika !». Les premières voitures du candidat victorieux passent en klaxonnant. Le groupe se met à crier «Ulac smah l'vote» «pas de vote» , slogan appelant au boycott en Kabylie. Puis «Vive Mouloudia !», un club de foot. L'un sniffe de la colle. L'autre tape dans un ballon. Ils entourent la petite dizaine de manifestants. A nouveau «Vive Bouteflika !». Les autres finissent par s'en aller. Ont voté.
Fin de l'article de Florence Aubenas
Commentaire :
Ainsi donc Messieurs les partisans de Benflis et M. Benflis avaient eu des ASSURANCES des militaires ? Propos tres interessants. Sans plus de commentaires je dirais que c'est dommage pour l'intégrité tant proclamée de M. Benflis et de ses militants (dégonflé pour celui qui est intervenu dans l'article ... partir à paris se faire oublier ?). Aussi, j'espère que les recours de Benflis seront de meilleure qualité que les propos désobligeants qu'il a proféré lors de sa campagne électoral. Puisque la majorité des PV sont co-signés par les représentants de la coalition Benflis-Sadi-Djaballah.
Propos désolants en gras
l est 10 heures vendredi et les cadres du FLN qui grimpent l'escalier du siège de l'ex-parti unique, à Alger, ont la gueule retournée des mauvais lendemains électoraux. Aucun résultat officiel mais la rumeur circule : Bouteflika aurait été réélu. Mohammed Allallou n'en revient toujours pas. Il y a vingt-quatre heures, cet ancien ministre des Sports était persuadé qu'Ali Benflis, ex-chef de gouvernement de Bouteflika, l'emporterait. Allallou n'était pas le seul. Une partie de la classe politique, des hommes de presse, des hauts fonctionnaires, bref de ceux qu'on appelle ici «l'élite», jurait la veille encore de la victoire de Benflis. Dans ce pays où c'est la haute hiérarchie militaire qui fait et défait les présidents, des «assurances avaient été données que nous pouvions y aller», assure un cadre du FLN. Allallou : «Ils nous ont roulés.»
A l'état-major de Benflis, la télé est branchée sur l'annonce des résultats. Le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, fait durer le suspense. Dans l'assistance, un cadre du FLN veut encore y croire. Calme sa voisine : «On aura au moins un deuxième tour.» ça y est, ça tombe. Bouteflika : 83,7 %. Pas un mot. Puis on parle de fraude massive. De recours à déposer. «C'est l'humiliation.»
Brouhaha de panique. A toute élection, n'importe quel gamin peut désigner les yeux fermés les candidats chargés de faire de la figuration et celui que les décideurs militaires ont adoubé. Or, pour la première fois, «le système avait aligné deux chevaux, Bouteflika et Benflis, explique un fin connaisseur du sérail. Chacun était persuadé d'être l'élu des militaires.» La campagne s'est, du coup, déchaînée, en pamphlets, en écrits, déchirant un milieu jusque-là soudé par ses privilèges et sa proximité du pouvoir. Vendredi, chez les perdants, on sentait monter les premiers regrets. Un brouhaha de panique chez ces habitués aux bonnes grâces. «La vengeance de Bouteflika va être terrible, dit un cadre. Je vais peut-être aller quelques mois me faire oublier à Paris.» Depuis six mois, il avait régulièrement en ligne «un colonel qui nous promettait tout». Son portable ne répond plus.
Benflis arrive. Une femme en pleurs se précipite sur lui. Abda Hadda possède et dirige le quotidien El Fadj : «On s'était engagés à fond. Et on nous lâche de partout.» A commencer par «le peuple», cette société de «corrompus qui s'est laissé acheter par Bouteflika». Des incapables. Des analphabètes. «On ne peut jamais leur faire confiance : déjà, ils avaient voté FIS en 1991», martèle un apparatchik. «L'armée avait promis qu'elle interviendrait en cas de fraude généralisée, dit une magistrate. Sans bain de sang bien sûr.» En 1991 déjà, elle avait soutenu l'annulation des élections par les militaires, qui avait provoqué une guerre civile qui a fait de 150 000 à 200 000 morts. Abda Hadda aussi. «On a toujours été avec eux. Alors, qu'ils se démerdent comme ils veulent, mais qu'ils nous enlèvent Bouteflika.»
«Le message est clair.» La veille, dans la nuit, un appel à une «marche pacifique spontanée» avait été lancé depuis le QG de Benflis. Vers 23 heures, une centaine de personnes, en tailleur et cravate, se retrouvent place du 1er-Mai devant un impressionnant cordon policier. Ça matraque tout de suite. «Le message est clair», dit un membre de cette nouvelle opposition. Il remonte dans sa Mercedes. Un groupe de jeunes surgit. Ils allument des pétards, pulvérisent du Flytox pour l'incendier. Hurlent «Vive Bouteflika !». Les premières voitures du candidat victorieux passent en klaxonnant. Le groupe se met à crier «Ulac smah l'vote» «pas de vote» , slogan appelant au boycott en Kabylie. Puis «Vive Mouloudia !», un club de foot. L'un sniffe de la colle. L'autre tape dans un ballon. Ils entourent la petite dizaine de manifestants. A nouveau «Vive Bouteflika !». Les autres finissent par s'en aller. Ont voté.
Fin de l'article de Florence Aubenas
Commentaire :
Ainsi donc Messieurs les partisans de Benflis et M. Benflis avaient eu des ASSURANCES des militaires ? Propos tres interessants. Sans plus de commentaires je dirais que c'est dommage pour l'intégrité tant proclamée de M. Benflis et de ses militants (dégonflé pour celui qui est intervenu dans l'article ... partir à paris se faire oublier ?). Aussi, j'espère que les recours de Benflis seront de meilleure qualité que les propos désobligeants qu'il a proféré lors de sa campagne électoral. Puisque la majorité des PV sont co-signés par les représentants de la coalition Benflis-Sadi-Djaballah.
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