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Six Algériens auraient été torturés à Guantanamo

jeudi 17 mars 2005, par Stanislas

Les six Algériens incarcérés dans la prison de Guantanamo Bay à Cuba ont subi des actes de torture et des sévices de toutes sortes, selon le magazine américain New Yorker, qui cite dans sa dernière livraison les témoignages des prévenus ramenés du goulag américain par leurs avocats.

Interpellés à Sarajevo en octobre 2001 par la police bosniaque, les six Algériens avaient été accusés d’avoir planifié des attentats contre les ambassades américaines et britanniques. Il s’agit des nommés Boudela Omar El Hadj, Mustapha Aït Idir, Mohamed Nechla, Belkacem Bensayah, Boumédiène Lakhdar et Saber Lahmar, qui avaient été libérés par la justice bosniaque en janvier 2002 avant d’être kidnappés par des agents de la CIA puis extradés vers l’enclave américaine à Cuba.

Selon les récits des prisonniers algériens révélés par le magazine, ils subissaient des tortures depuis plus de trois ans, alors que le Pentagone avait nié ces pratiques. Mustapha Aït Idir a été la victime la plus exposée à la torture parmi les autres Algériens. Il aurait eu deux doigts brisés par des soldats américains, selon un exposé adressé au Pentagone par son avocat Rob Kirsch. Durant trois ans, indique son avocat, Bensayah, Nechla et Aït Idir ont été placés à plusieurs reprises en isolement dans des conditions inhumaines, dans un lieu où tous les détenus étaient privés de leurs pantalons et souliers.

Refusant de rendre son pantalon expliquant qu’en tant que musulman, il ne pouvait accomplir ses prières sans être vêtu, le prisonnier algérien a dù faire face à la brutalité des soldats de la force de réaction rapide (IRF) chargés de mater les prisonniers récalcitrants.

Après avoir coupé la partie inférieure de son pantalon pour la remettre à ses geôliers, raconte son avocat, les soldats de l’IRF, équipés de matraques et de boucliers, ont lancé des bombes lacrymogènes à l’intérieur de la cellule d’isolement pour le neutraliser, poursuit Me Kirsh.

Il subira deux charges en règle d’une dizaine de soldats antiémeute et un effroyable matraquage durant lequel ses doigts seront brisés tout en essuyant une série de coups de rangers dans ses parties pendant qu’il était au sol. Connu pour être un champion de karaté, Aït Idir était redouté chaque fois qu’une descente était organisée dans sa cellule depuis qu’il s’était défendu contre un groupe de soldats qui tentaient de le torturer.

Quelques jours après cette agression, Aït Idir fut également retiré de sa cellule avec la même violence puis menotté et pendu la tête en bas sur de la pierre. Il subira plusieurs lésions aux bras et au visage. Son avocat qui l’avait interrogé assure qu’il n’avait reçu aucun soin médical pour toutes les blessures et les traumatismes qu’il a subis, notamment pour ses doigts et les plaies au visage.

Son avocat avait dès lors introduit un dossier devant le tribunal de révision du statut de combattants mis en place par le Pentagone. Les 540 prisonniers de Guantanamo sont considérés comme des « combattants ennemis » et ne bénéficient d’aucun statut particulier, les Etats-Unis refusant de leur appliquer la convention de Genève.

Interrogé par le magazine New Yorker, le porte-parole de la prison de Guantanamo, le lieutenant-commandant Flex Plexico, a refusé de commenter ces incidents, se contentant d’indiquer qu’une enquête sera diligentée pour établir la vérité.

Vendredi dernier, le ministre américain de la Défense a annoncé que quatre officiers en poste à Guantanamo ont été suspendus de leurs fonctions pour « mauvais traitement » envers des prisonniers. Il s’agit de deux lieutenants-colonels, d’un colonel et d’un autre officier dont le grade n’a pas été précisé.

Le Pentagone a refusé de révéler les identités des quatre officiers. Plusieurs pensionnaires de Guantanamo, qui ont été ensuite libérés, ont affirmé qu’ils avaient été torturés durant toute la période de leur détention, ce qui avait amené les organisations de défense des droits de l’homme à fustiger les abus de l’armée américaine.

Z. M., www.jeune-independant.com