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Palme d’Or pour "Fahrenheit 911" de Michael Moore

lundi 24 mai 2004, par nassim

Le documentariste américain Michael Moore a remporté samedi la palme d’or pour son pamphlet anti-Bush, "Fahrenheit 911"

Le palmarès tarantinien a rendu son verdict : politique et artistique. C’est plutôt malin, tout à fait d’actualité, assez démagogique, mais cela n’est pas forcément une bonne nouvelle pour le cinéma. La Palme d’or à Michael Moore pour son pamphlet anti-Bush, "Fahrenheit 9/11", c’est une tonitruante entrée en campagne électorale : à six mois de l’élection américaine, la planète cinéma, tout autour du monde et en Amérique même (puisqu’une demi-douzaine de films américains étaient en sélection, et Tarantino président), dit non à Bush, et lui montre son bulletin de vote comme une marque d’infamie imprimée au fer rouge.

Le Prix du jury à "Tropical Malady", le plus beau film de ce 57e festival, c’est une manière de récompenser les artistes à travers le plus talentueux d’entre eux cette année, le tout jeune Apichatpong Weerasathakul. De même que reconnaître tout le talent du Japonais Kore-eda et de son magnifique film d’enfants sauvages, "Nobody knows".

Mais il n’est pas sûr que ce coup du chapeau marche à coup sûr. Car, comme le disait Godard lors de sa conférence de presse : "Bush est moins bête que Moore ne le croit, et lui à moitié intelligent. Il ne fait pas la différence entre un texte et une image". Il est vrai que Michael Moore n’a jamais été un grand cinéaste, imprimant d’abord sa lourdeur sur des pamphlets qui ne font pas dans la dentelle.

Et cette Palme d’or très politique pourrait aussi signer un divorce avec les amateurs de cinéma, comme si, cette année, la conjoncture avait pris en otage le festival de Cannes, lui ôtant une part de son rôle légitime de consécration artistique. Tarantino, parangon du cinéphile mondial (son "amoureux fou"), a, en quelque sorte, joué avec la politique en apprenti sorcier.

Sinon, Tarantino semble avoir fait le boulot, imposant aux autres membres du jury sa toquade du moment comme Grand prix, le coréen "Old Boy", ses copains les frères Coen (pour Irma P. Hall, prix du jury dans "The Ladykillers"), et sa découverte "exotique", le film gitan de Tony Gatlif, "Exils" (prix de la mise en scène).

On saluera cependant le prix d’interprétation donnée à Maggie Cheung, l’une des plus grandes actrices du monde, et qui donne à son personnage d’Emily dans "Clean" une formidable énergie et sa grâce féline.

Enfin, signalons, mais sans insister car il faut rester fair play, l’embrouille tout à fait business d’une palme d’or décernée par Quentin Tarantino, auteur produit par Miramax, avec une grosse sortie maison en cours "Kill Bill 2", à Michael Moore, autre auteur Miramax. Il n’y a évidemment pas là de conflit d’intérêt ! Et derrière l’engagement politique (sur toutes les lèvres), il y a aussi un joli coup de pouce commercial (qu’aucune bouche n’évoque).

source : www.liberation.fr

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