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La main-d’œuvre infantile en Algérie

samedi 20 mars 2004, par Hassiba

Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale qui a commandé cette étude achevée en janvier 2004 n’en a jusqu’à maintenant pas rendu publics les résultats. En attendant leur publication, du côté officiel, on persiste à dire qu’il s’agit là d’un phénomène minime.

Pour les responsables du ministère, la situation n’est pas inquiétante. Il faudrait d’abord maîtriser le travail informel pour mettre fin à la main-d’œuvre infantile. Le secteur du travail a fait réaliser par l’INT une étude sur le phénomène du travail des enfants.

Le travail de l’INT s’est concentré beaucoup plus sur les caractéristiques du travail des enfants que sur l’aspect quantitatif. Le premier responsable du secteur, M. Tayeb Louh, n’a pas donné beaucoup d’importance aux chiffres. La situation actuelle n’est pas dramatique ni même inquiétante.

Cette nouvelle étude qui a pris comme échantillon 1 000 enfants entre 10 et 15 ans a tenté de prendre connaissance du phénomène. Il a été décidé, faut-il le noter, d’approfondir l’étude, avec le concours technique et financier du Bureau international du travail (BIT).

Le ministre, répondant à une question sur le sujet, a indiqué que les premiers résultats enregistrés ont donné des éléments d’information portant sur les principales motivations à l’origine de l’insertion précoce des enfants dans le monde du travail.

Ce phénomène est dû, selon l’étude, à la situation de chômage des parents, à la faiblesse des revenus familiaux ainsi qu’à la déperdition scolaire des enfants. Celle-ci atteint 33 % pour le cycle primaire, 31 % pour le moyen et 24 % pour le secondaire.

Quoi qu’il en soit, M. Louh déclare que ce phénomène n’a pas l’ampleur constatée dans d’autres pays. Il convient de noter également que l’inspection du travail a enregistré en 2002, 95 travailleurs mineurs sur les 5 847 organismes inspectés englobant un effectif de 16 895 travailleurs, soit 0,56 %.

Par ailleurs, le responsable du secteur estime que les enfants travailleurs ne sont jamais recrutés par des employeurs authentiques. En termes plus clairs, la maîtrise de ce phénomène interviendra lorsque le ministère du Travail décidera de mettre fin au travail informel.

Notons que la commune de Gué-de-Constantine est classée première, selon l’étude, en matière d’emploi des enfants. Ce phénomène est directement lié, selon les chercheurs, à la déscolarisation. Un phénomène qui ne peut être maîtrisé sans une action intersectorielle impliquant, notamment, la police, la gendarmerie, l’Inspection du travail, l’éducation et la solidarité.

Cette enquête a été effectuée dans 12 wilayas, notamment Alger, Tissemsilt, Bouira, Relizane, Mascara, Bordj Bou Arréridj, Béjaïa, Béchar et Djelfa. Cette dernière est la première wilaya touchée par ce phénomène, parce que le taux de déperdition scolaire y est élevé.

Une autre enquête vient d’être entamée. Les chercheurs tenteront d’élargir le champ de l’enquête à d’autres wilayas. Elle touchera également la tranche d’âge de 6 à 17 ans. Il faut noter que l’enquête s’est concentrée essentiellement sur les enfants non scolarisés.

Les données de l’enquête révèlent que ce sont les parents qui poussent leurs enfants vers le monde du travail. Pour rappel, signalons que selon une enquête réalisée en 1999 par le bureau de l’Unicef à Alger, près de 500 000 mineurs travaillent en Algérie, soit près de 5 % des enfants âgés entre 15 et 18 ans.

Parmi eux, 60 % sont des enfants appartenant au milieu urbain, 40 % au milieu rural, 40 % des enfants du Nord, 50 % des Hauts Plateaux et 10 % du Sud. A l’époque, l’UGTA est allée plus loin et a estimé le nombre des enfants travailleurs à 1 300 000 dont 700 000 filles âgées de moins de 18 ans.

Le BIT a recensé en 2001 un nombre de 8,4 millions d’enfants assujettis aux multiples formes d’esclavage, à la traite, au recrutement forcé dans les conflits armés. Ces cas n’existent fort heureusement pas en Algérie. C’est probablement la raison pour laquelle le ministère du Travail ne voit pas d’urgence à maîtriser les cas recensés.

L’étude sociologique montre, selon les chercheurs interrogés, qu’il ne faut pas prendre ce phénomène trop négativement.

Nassima Oulebsir, Le Jeune Indépendant