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La diplomatie algérienne s’emballe

lundi 8 novembre 2004, par Hassiba

L’Algérie se met à l’heure de la diplomatie offensive, et ce, en actionnant tous ses relais pour réussir au moins deux grands événements devant se tenir chez elle dans peu de temps, à savoir le sommet du Nepad et celui des chefs d’Etat arabes.

C’est carrément le branle-bas de combat au ministère des Affaires étrangères où responsables et cadres s’activent à mettre en place un édifice solide pour l’organisation d’importants événements. Même si l’on s’amuse à dire que les choses seront plus claires après la fête de l’Aïd, l’on s’active d’ores et déjà à mettre tout en place et dans le détail. Les services du ministre délégué chargé des Affaires africaines et maghrébines, Abdelkader Messahel, sont pris par une grande ferveur. Leur tâche essentielle pour l’instant est de bien préparer la tenue du sommet du Nepad dont les travaux sont prévus pour le 23 du mois en cours à l’hôtel Sheraton d’Alger. Jusque-là, les différentes réunions du Nepad se sont contentées de faire uniquement des évaluations de ce qui a été programmé, sans véritablement comptabiliser des actions concrètes dès lors que les injections d’argent promises à l’Afrique par les puissances mondiales n’ont pas dépassé le stade des promesses. Et dans ce cas, un tel événement n’aura son importance que si les présidents africains, initiateurs de ce nouveau partenariat, deviennent plus offensifs à l’égard des bailleurs de fonds du continent. Ce qui doit les obliger à prendre des décisions fermes et sans détours. C’est ce que pense la diplomatie algérienne qui estime que le comité de suivi et de mise en oeuvre du Nepad, qui se réunira à Alger au cours de ce sommet, compte bien aller dans ce sens.

Au même moment, Oran accueillera les ministres des Affaires étrangères des 5+5. La coïncidence entre la tenue du sommet du Nepad et cette réunion ministérielle, si elle reflète quelque part l’effet d’une mauvaise programmation, aura cependant le mérite de faire réunir dans un même pays et exactement à la même période, les responsables de pays importants en charge des grands dossiers, à l’exemple de celui du Nepad, du dialogue euroméditerranéen et de l’UMA. L’Algérie se veut justement de devenir ce carrefour de la diplomatie internationale. D’autant qu’à l’ordre du jour des 5+5, une question cruciale, celle de la stabilité de la région et de la sécurité. Question sur laquelle l’OTAN demandera certainement dans peu de temps, à voir de plus près. De même que l’on annonce au titre de ce dossier, une réunion des ministres de la Défense des 5+5 à Paris d’ici à la fin de l’année.

Il sera question pour eux d’examiner la stratégie commune relative aux problèmes de sécurité que les pays concernés veulent mettre en place. Une chose est sûre, telles que programmées, les réunions des 5+5 décrètent définitivement la notion des 4+3 (France - Espagne - Portugal - Italie et Algérie - Maroc - Tunisie) un mort-né. Celle des ministres de la Défense, prévue à la fin du mois en cours, confirme en tout cas les faits. Pour rappel, c’était Michèle Alliot-Marie, la ministre de la Défense française, qui avait évoqué pour la première fois dans l’histoire du dialogue euroméditerranéen, une concertation au niveau des 4+3. Elle l’avait fait lors de sa visite à Alger en juillet dernier.

Cette déclaration, faut-il le souligner, avait étonné les ambassadeurs des pays maghrébins et avait particulièrement choqué la Libye qui avait réagi avec fracas par le biais de son ministère de l’Intérieur. Après concertation et discussions approfondies entre les pays concernés, la décision a été prise de réintégrer Nouakchott et Tripoli dans le cercle euroméditerranéen initial. Il est clair que les efforts déployés par la Libye pour être acceptée en tant que partenaire à part entière ont été pris en considération. Ces deux dernières capitales ont reçu ces derniers temps la visite de deux responsables algériens. Tripoli a même abrité une rencontre au sommet Bouteflika - Kadhafi tandis que Nouakchott a reçu le chef de la diplomatie algérienne, Abdelaziz Belkhadem. Au-delà du fait que la visite du président Bouteflika en Libye a coïncidé avec l’extradition vers Alger de Abderezak El Para, elle n’en est pas moins une importante médiation pour rapprocher deux hommes en total désaccord, Kadhafi et Ould Taya. La diplomatie algérienne s’emballe à quelques mois de la tenue du sommet des chefs d’Etat arabes. Prévu à Alger en mars prochain, le sommet sera cet événement que l’Algérie se doit de réussir. La médiation entre la Mauritanie et la Libye se veut un pas dans ce sens. Tunis a aussi accueilli le chef de l’Etat. Des entretiens à ce sujet ont eu lieu entre Bouteflika et Zine El-Abidine Benali. Le chef de la diplomatie algérienne se trouve depuis hier au Yémen dans le cadre du renforcement, dit-on, des relations bilatérales. Mais la toile de fond reste indéniablement la préparation du sommet de la Ligue arabe de mars prochain. Au programme de Belkhadem pour les jours à venir, d’autres déplacements dans plusieurs capitales arabes. L’intérêt politique que doit revêtir ce rendez-vous sera perceptible par le niveau de la participation. D’autant qu’il interviendra dans une conjoncture très particulière marquée par la réélection de Bush, la fin d’une époque pour l’Autorité palestinienne que la détérioration physique de son leader Yasser Arafat impose et l’enlisement de la situation en Irak.

En attendant, l’on s’attend à ce que les esprits marocains reviennent à de meilleurs sentiments pour tenter le rapprochement entre les pays de l’UMA. La rencontre du représentant marocain à l’ONU à sa demande, avec Abdallah Baali, n’engage certes à rien à ce niveau mais elle ne peut être ignorée par la diplomatie. Grand rendez-vous, enfin, de la diplomatie algérienne : la visite très attendue du président de la République au pays du Japon, du 5 au 8 décembre prochain.

Par Ghania Oukazi, Le Quotidien d’Oran