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La Kabylie commémore le Printemps berbère

dimanche 20 avril 2008, par Samir

Les villes de Kabylie commémorent le Printemps berbère avec l’organisation d’activités culturelles et de manifestations politiques.

Le Printemps berbère en Kabylie.

Le Printemps berbère a vingt-huit ans. Ce n’est certainement pas l’âge de la raison, mais l’événement a pris en maturité depuis bien longtemps. Depuis 1980, la date du 20 avril ne passe jamais inaperçue. Activités culturelles, manifestations politiques et autres marches, le Printemps berbère s’est incrusté, de manière pas encore officielle, dans les pratiques populaires des habitants de Kabylie et dans d’autres régions du pays. Parce que, au-delà de l’événement lui-même, c’est-à-dire des manifestations, violentes, pour réclamer la reconnaissance de l’identité amazighe et, par extension, des libertés démocratiques en Algérie, le 20 avril constitue un repère pour beaucoup de citoyens, jeunes et moins jeunes. Et le premier des repères est une date. Une date qui n’est pas venue ex nihilo. Parce que, avant le 20 avril, il y avait, en ce printemps de 1980, d’autres journées aussi sanglantes que mémorables. Mémorable est d’ailleurs cette journée du 10 mars durant laquelle une conférence de l’écrivain Mouloud Mammeri sur Poèmes kabyles anciens, une anthologie de la poésie ancienne publiée en 1969, était interdite par les autorités locales. Comme la communication devait se dérouler dans l’enceinte du centre universitaire, inauguré deux ans plus tôt par Houari Boumediene, les étudiants y voient une provocation de plus. Pas question, pour eux, de se taire.

Des contacts étaient pris avec les anciens militants et fondateurs du Mouvement culturel berbère. Et des manifestations, dont une plus symbolique organisée à Alger, étaient prévues. Une grève générale était aussi au menu. Vint ensuite cette journée du 20 avril. C’était un lundi. Et comme l’essentiel des animateurs du mouvement étaient logés à la cité universitaire d’Oued Aïssi, la police, et l’armée appelée en renfort, ne pouvaient faire mieux que d’y entrer de nuit et de brutaliser certains d’entre eux. Plusieurs femmes étaient violées, tandis que plusieurs arrestations avaient été opérées. Vingt-quatre d’entre eux, parmi lesquels on trouve Saïd Sadi, Saïd Khelil, Arezki Abbout et d’autres figures, étaient emprisonnés et ne seront libérés que plus d’un mois plus tard sous la pression de la rue. Cet événement a servi de détonateur à d’autres. Les étudiants, encore eux, s’étaient révoltés une année plus tard à la faculté centrale d’Alger. Constantine et la Casbah d’Alger connurent des soulèvements en 1986. C’est que le Printemps berbère a cassé la chape de plomb mise en place par le régime. Et c’est logiquement que tout cela aboutit, en octobre 1988, à d’autres soulèvements, encore plus sanglants.

Le cheminement tracé par le Printemps berbère a permis, à partir de 1989, la création de deux départements, devenus par la suite instituts, de langue amazighe à Tizi Ouzou, puis à Béjaïa. Mais le slogan phare de 1980, « tamazight, langue nationale et officielle », ne trouve pas de réponse positive. Et la Kabylie se soulève de nouveau. En 1994, une grève du cartable est décrétée. C’est une année blanche pour les élèves de Kabylie. Le résultat, mitigé il est vrai, a suivi : entrée officielle, même symbolique, de tamazight à l’école, et création, en avril 1995, du Haut-Commissariat à l’amazighité, une institution rattachée à la présidence de la République, dont il ne reste aujourd’hui que l’existence légale. Ou presque.Mais dans ce cheminement, un autre printemps est né. Celui de 2001, appelé printemps noir. Les émeutes qui ont duré plus de deux ans, nées un 20 avril 2001, ont fait 126 morts. Si les problèmes de fond ne sont toujours pas réglés, le pouvoir algérien a concédé, par la voix de Abdelaziz Bouteflika, à constitutionnaliser tamazight comme langue nationale. C’était le 12 mars 2002 lors d’un congrès des deux chambres du Parlement réunies au palais des Nations.
Depuis, si le sang s’est arrêté de couler, les choses n’ont pas vraiment changé. Sur le plan politique, la cause amazighe, qui a servi de cheval de bataille, ne rapporte pratiquement plus. Du Mouvement culturel berbère (MCB), à l’origine des événements de 1980, il ne reste pratiquement plus rien. Autres temps, autres mœurs, les revendications des gens ont également changé. Les problèmes socio-économiques ont pris le dessus sur le reste. Et le folklore a pris la place du politique. Quant à la Kabylie, théâtre de plusieurs événements sanglants, elle a perdu de son lustre. L’insécurité, le manque de projets de développement et le mal-vivre sont devenus le lot quotidien des habitants de la région.

Synthèse de Samir, www.algerie-dz.com
D’après La Tribune