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L’Algérie consternée

jeudi 28 juillet 2005, par Bilal

La mobilisation en Algérie pour la libération de ses deux diplomates a été unanime. Mais Al-Qaïda a mis ses menaces à exécution. Les deux représentants algériens, Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi ont été décapités par leurs geôliers du groupe d’Al-Qaïda de Mésopotamie. L’ignoble terroriste Abou Mossab Al-Zarkaoui a suivi sa logique assassine jusqu’au bout.

Toute l’Algérie est en deuil après le lâche assassinat des deux diplomates Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi.

Ce que l’Algérie redoutait est arrivé. Moins d’une semaine après leur enlèvement dans le quartier d’Al-Mansour, le chargé d’affaires, Ali Belaroussi, 62 ans, et l’attaché d’ambassade, Azzedine Belkadi, 47 ans, ont été exécutés par le groupe de Zarkaoui. C’est ce qu’a revendiqué Al-Qaïda en Irak, dans l’après-midi de ce mercredi noir. « Vos frères dans la branche militaire de l’Organisation Al-Qaïda en Mésopotamie ont procédé mercredi 27 juillet à l’application du verdict du tribunal islamique (...). Le président de la mission diplomatique algérienne Ali Belaroussi et l’attaché diplomatique Azzedine Belkadi ont été ainsi tués », indique un communiqué sur le site islamiste ayant revendiqué l’enlèvement et diffusé les images vidéos des deux diplomates martyrs.

Malgré les efforts déployés par la commission des experts et diplomates à Bagdad et Amman dans les dernières heures pour tenter de convaincre les ravisseurs de surseoir à leur condamnation à mort prononcée le mardi, El-Zarkaoui est passé aux actes. Comme à chaque prise d’otages de son groupe « Tawhid ouel Djihad », aucun otage n’est sorti vivant d’une opération d’enlèvement perpétrée par ses éléments. Le dernier en date, le diplomate égyptien, Ihab Chérif, a été exécuté à peine trois jours après son enlèvement.

Cette revendication, non authentifiée, sera probablement accompagnée d’images vidéos dans les prochaines heures pour confirmer l’exécution. Le procédé est usuel chez les groupes d’Al-Qaïda qui a dû, avant de les assassiner, faire passer les deux diplomates par d’affreuses séances de tortures physiques et psychologiques. Le groupe El-Zarkaoui utilise les interrogatoires des deux Algériens afin de justifier, par la Chariâa, leur condamnation par un « tribunal légaliste » interne à l’organisation terroriste : « les gouvernements modernes et tyrans ont placé leurs législations et constitutions au-dessus de la chariâa » avait-il prévenu dans le communiqué de mardi dans lequel transparaissait peu de doute sur le sort des deux anciens otages.

Pour expliquer ce rapide passage à l’acte d’El-Zarkaoui, il faut probablement revenir aux événements qui ont précipité le choix de Belaroussi et Belkadi comme cibles d’Al-Qaïda.

D’abord, le fait que « Tawhid ouel Djihad », organisation basée en Irak, avait prêté allégeance à Al-Qaïda qui avait toujours considéré l’Algérie comme un état à « combattre ». Ce groupe partage avec le GSPC le fait qu’ils soient salafistes, unis par le « djihad » et ayant comme ennemis communs des gouvernements accusés d’être les « suppôts des croisés et des juifs ». De cette rhétorique se sont tissés les traditionnels liens entre les terroristes algériens et El-Zarkaoui notamment dans la période allant de 1991/1992 et 2000/2001. Le terroriste jordanien de la tribu de Zarka connaît assez bien les Algériens pour avoir eu à les entraîner au camp de Herat, en Afghanistan, notamment dans le cadre des maniements d’explosifs, en 2000. On lui connaît deux lieutenants algériens qui ont encadré ce que les islamistes appellent « la famille algérienne » à Kaboul et à Peshawar, au Pakistan : Abou Doha, un prétendu docteur, originaire de Constantine, arrêté à Londres et recherché par les Américains et Saïd Arif, arrêté en Syrie, et extradé en France en 2004.

Ensuite, le fait que le groupe d’El-Zarkaoui a besoin des éléments algériens du GSPC pour mener des campagnes terroristes en Europe. Le recrutement des « kamikazes » algériens depuis l’Algérie et la France a été intensif, ces dernières années, surtout à la période de la mobilisation des « volontaires arabes » qui se sont engagés dans les troupes axillaires à l’armée irakienne. Les rapports des services de renseignements indiquent que le départ d’une centaine de Salafistes vers l’Irak a renforcé les liens entre El-Zarkaoui et le GSPC. Ce dernier avait, à maintes reprises, « béni » l’action d’El-Zarkaoui en Irak et comparé les tueries d’Algériens, au combat du Jordanien contre les « apostats où ils se trouvent ».

Enfin, le fait que l’Algérie est perçue par Al-Qaïda comme étant un pays qui a réussi à vaincre leurs affidés. Les contacts entre Abdelouadoud et El-Zarkaoui ne sont pas les premiers qui accréditent la thèse d’une connexion perpétuelle. Les contacts sont nombreux sur les dix dernières années. Entre le numéro deux d’Al-Qaïda, Ayman Al-Zawahiry et Djamel Zitouni du GIA, l’Egyptien Mohamed Attaf, l’ancien chef militaire d’Al-Qaïda et Abderezak « El-Para » du GSPC, ceux du Yéménite Mohamed Abdelouahab avec l’émir GSPC au Sud, Mokhtar Belmokhtar, mais surtout Oussama Ben Laden avec tous les ténors du terrorisme dont Kamredinne Kherbane au Soudan, Djaffer Chabanni en Afghanistan et Hassan Hattab en Algérie. Ces connexions « djihadistes » ont toujours été opérationnelles et ont sanctionné les diplomates algériens à Bagdad. Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi n’ont pas été perçus comme des Algériens « amis de l’Irak » mais comme des agents d’un Etat algérien qui a déclaré la guerre totale au terrorisme.

Par le Quotidien d’Oran