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Evolution significative du volume de la coopération éducative algéro-française

mercredi 1er décembre 2004, par Hassiba

Dans le cadre de cette coopération, il faut souligner la très bonne réactivité du ministère de l’Enseignement et de la Formation professionnels, de l’Université de la formation continue et des Ecoles normales.

Pour la 22ème année consécutive, le palais des Expositions, Porte de Versailles à Paris, a abrité, du 17 au 19 novembre dernier, le Salon des équipements, systèmes, produits et services pour l’éducation et la formation, appelé communément l’Educatec.

Cette manifestation internationale, qui se déroule dans le cadre du Salon de l’éducation, était particulièrement destinée aux professionnels de l’enseignement et de la formation professionnelle et technique. Le commissaire général du salon, M. Stéphane Pic-Paris, a indiqué à ce propos que sur un nombre total de 16 000 visiteurs attendus à cette manifestation pour la durée de trois jours, près de 52% sont des acheteurs décideurs dans les établissements de formation professionnelle et de l’éducation nationale ainsi que dans les collectivités locales (responsables des achats des régions, départements et communes), alors que les 48% restants sont des enseignants (de la maternelle au supérieur, enseignement général, technique et professionnel, privé et public).

Des équipements de haute technologie y étaient présentés par plus de 200 exposants, représentant des entreprises spécialisées dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication et dont une bonne partie est en partenariat avec les établissements de formation et d’enseignement professionnels. « Notre objectif premier est de rapprocher davantage le monde économique et les enseignants des secteurs industriel et de la gestion et, partant, développer un partenariat durable entre l’éducation nationale et les entreprises de haut niveau », soutient Mme Michelle Martin, responsable adjoint du Centre des études et des ressources pour les professeurs de l’enseignement technique (CERPET). Cette manifestation de grande importance est aussi une occasion d’interpeller les professionnels de l’éducation et de la formation professionnelle sur le recul de l’enseignement technique dans les collèges et les lycées de France. « Nous avons un grand déficit en techniciens, mécaniciens [...] et tous les domaines de l’industrie en général. Les filières techniques sont boudées aussi bien par les élèves que par leurs parents qui préfèrent plutôt orienter leurs enfants vers les filières littéraires dites intellectuelles. Les gens ne savent plus ce qu’est l’enseignement technique. Ils pensent que tout ce qui est technique et industrie graisse les mains et est une corvée. Or, des équipements de haute technologie existent actuellement et permettent des réalisations extraordinaires dans des temps records sans grande difficulté. Ils n’ont qu’à venir ici pour vérifier », confie M. Stéphane Pic-Paris qui est aussi représentant de la société Tarsus, l’organisatrice du salon.Des tables rondes et des conférences ayant notamment pour thème l’évolution de l’enseignement des sciences et technologies au collège et au lycée ainsi que la relation éducation/entreprise ont ponctué les présentations, aussi impressionnantes qu’amusantes, des entreprises.

Bonne représentation de l’Algérie au pavillon multimédia
Une délégation algérienne composée de cadres et responsables du secteur de la formation professionnelle (ministère, Centre national de l’enseignement professionnel à distance, Fonds national de développement de l’apprentissage et de la formation continue et l’Université de la formation continue), le ministère de l’Education nationale et celui de la Jeunesse et des Sports (Lycée sportif international de Draria) était présente à ce salon. Une présence qui ne laisse pas indifférent du fait que l’Algérie était le seul pays du Maghreb et même du Monde arabe à avoir participé, et pour la deuxième année consécutive, à cette manifestation. A quoi cela tient-il ? Cela tient au grand succès de la coopération relancée entre les deux pays surtout depuis la fin 2001, notamment dans le domaine des nouvelles technologies multimédias auquel contribue le Service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France en Algérie. Un service qui travaille principalement sur l’amélioration des compétences humaines ainsi que des dispositifs de gestion et de pilotage. « Nous avons tenu à ce que l’Algérie soit présente à ce salon parce qu’en tant que partenaire de coopération, elle a contribué à mettre au point des logiciels de formation très performants », explique M. Pierre-Yves Jego, l’attaché de coopération éducative. Le succès de cette coopération se trouve dans la réussite de nombre d’enseignants du Centre national d’enseignement professionnel à distance (CNEPD), de l’Université de la formation continue et aussi ceux du Lycée sportif international de Draria, à développer des cours à distance avec le système Serpolet ; un logiciel conçu par le groupe A6-Médiaguide (qui a une filiale en Algérie) et qui permet de répondre à toutes les phases du cycle d’enseignement (création auteur et édition, orientation et création du plan de formation, enseignement et apprentissage, suivi d’évaluation et enfin gestion administrative). Les enseignants qui ont réussi cet exploit ont suivi des stages de formation d’une durée minimum de 15 jours en France et en Algérie.

« La plate-forme informatique Serpolet a permis, grâce à tout un réseau d’expertise français, d’obtenir le même réseau d’expertise algérien en altérité de compétences. Le Maroc ne l’a pas fait. La Tunisie non plus », note M. Jego. Non sans rappeler que « cette plate-forme informatique a désormais une réputation internationale. C’est l’une des seules plate-forme informatiques qui permet de traiter plusieurs langues à la fois ; le français, l’anglais, l’arabe, l’espagnol, le chinois, etc. » Le premier produit de cette coopération a été présenté, l’année dernière au salon, par Mlle Hendi Amel, enseignante en sciences naturelles au Lycée sportif international de Draria. D’autres échantillons ont été également présentés cette année au salon, plus particulièrement au pavillon multimédia des connaissances (le stand H 1 201) qui a abrité une série d’épreuves basées sur les possibilités d’échanges de connaissances via les nouvelles technologies multimédias en ligne (les OMERIADES). L’animation de ce stand était assurée par une équipe mixte d’ingénieurs et d’enseignants français et algériens. La participation algérienne à cette manifestation est aussi un moyen d’exprimer la volonté de coopération bilatérale des deux pays. « Cette coopération procède d’une volonté commune bilatérale des deux pays qui travaillent en altérité de responsabilités. Nous sommes dans un dispositif où il est essentiel que les intérêts de la coopération soient conçus au bénéfice des deux partenaires », souligne le chargé de coopération éducative.

Un budget annuel de 16 millions d’euros pour la coopération
Une enveloppe budgétaire de l’ordre de 13 millions d’euros est dégagée chaque année par le gouvernement français en faveur de la coopération bilatérale algéro-française (coopération annuelle). A cela s’ajoute une enveloppe de 3 millions d’euros sur le Fonds de solidarité prioritaire (FSP) pour des projets spéciaux qui font l’objet d’une étude particulière et pour lesquels les budgets sont arrêtés pour une durée bien déterminée (coopération pluriannuelle).

En tout, 16 millions d’euros sont mis annuellement au profit de la coopération. M. Pierre-Yves Jego apporte les précisions suivantes : « Dans la coopération annuelle, on est dans la flexibilité. En revanche, pour la coopération pluriannuelle sur le FSP, le budget est bloqué pour des projets bien précis, avec des objectifs bien définis et sur lesquels on ne revient pas. » L’Algérie est considérée parmi les pays les plus importants au monde en termes de coopération avec la France. « C’est une coopération très dense qui remonte à l’indépendance de l’Algérie », soutient l’attaché de coopération éducative. Et d’ajouter : « La France est en coopération bilatérale avec plus de 150 pays du monde. La coopération fait partie de la culture française. » Cette coopération remonte à plus d’une centaine d’années si l’on considère que les Alliances françaises en ont été les premières actrices pour la diffusion du français. Pour l’Algérie, tout a commencé par la contribution de coopérants français (enseignants, médecins, techniciens, ingénieurs...) à la formation de cadres algériens en 1962. Vers le milieu des années 1980, cette coopération de substitution a évolué plutôt vers des projets visant les objectifs de la formation professionnelle dans de nombreux secteurs. Mais à partir de l’année 1992, le volume de coopération a commencé à connaître une diminution sensible, on peut même parler de récession, en raison de la montée du terrorisme en Algérie. Ce n’est qu’à partir de l’année 2001 qu’une reprise de cette coopération bilatérale a eu lieu avec le retour progressif des experts et techniciens français. L’Année de l’Algérie en France était le grand moment de la relance. Cette coopération dépend du Service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France en Algérie. Et comme son nom l’indique, ce service s’occupe de deux grands volets : la coopération et l’action culturelle. Le premier volet concerne la coopération dans tous les domaines scientifiques, techniques, éducatifs, linguistiques, etc. Le deuxième porte sur la coopération culturelle. Les échanges culturels concernent bien évidemment les spectacles, les expositions... et autres manifestations culturelles organisées par l’un ou l’autre pays.

La coopération culturelle, quant à elle, vise le développement du dispositif culturel algérien en général et des professions du secteur culturel en particulier (système de bibliothèques, des centres de ressources, formation des plasticiens et professeurs de l’Ecole des beaux-arts, arts de la scène...). La coopération et l’action culturelles sont portées par les Centres culturels d’Alger, Annaba, Constantine, Oran, comme institutions qui ont des actions de coopération régionale et qui relaient aussi des actions nationales quand cela est possible, par exemple dans le secteur audiovisuel et des médias, la presse, la TV, le cinéma. Leurs actions surviennent en plus des budgets d’intervention de coopération mentionnés ci-dessus.

Consacrer le partenariat dans tous les domaines
Tous les secteurs de coopération visent le développement de la formation, le perfectionnement, l’enrichissement et l’acquisition de compétences : études universitaires et recherche scientifique, de la licence jusqu’au plus haut niveau des études post-doctorales, grands secteurs techniques, technologiques, industriels, l’équipement, l’eau, les technologies avancées des divers secteurs de pointe. Il y a ensuite la coopération juridique qui travaille avec les institutions du système juridique algérien, par exemple en action de partenariat conduite avec l’Ecole nationale de la magistrature. Il y a aussi la coopération administrative qui consiste en des formations au profit des cadres dans les différents ministères et en la modernisation des systèmes de décentralisation. On cite également la coopération avec les collectivités locales... Bref, une coopération dans tous les domaines. La coopération universitaire reste la plus importante. C’est la coopération phare et concerne les 53 institutions universitaires du pays. Toutes les questions universitaires y sont traitées et pour la langue arabe, les actions concernent le domaine de la traduction.

Il y a aussi la coopération linguistique pour le français qui concerne la formation des enseignants et des formateurs. A préciser, à ce propos, que la France a un système de coopération lié à la francophonie. Elle est en coopération avec les pays qui ont le français en partage. Tous les secteurs de la coopération sont riches et mériteraient des explications complémentaires. Quel profit tire la France de cette coopération ? « Lorsqu’on fait de la coopération, on est dans la stratégie gagnant-gagnant. Ce sont les deux pays qui y gagnent. Il n’y a pas un qui gagne et un autre qui perd », répond M. Pierre-Yves Jego. « L’objectif de cette coopération est d’aider l’Algérie à réussir son développement et faire en sorte qu’elle devienne un partenaire qui sera en altérité avec le niveau français. Un partenaire de l’Union européenne. Plus l’Algérie se développe, plus elle pourra devenir un partenaire doté de nouvelles compétences scientifiques, technologiques, économiques qui seront à même de faciliter les échanges économiques réciproques. En chiffres, quelque 2 425 personnes sont parties en stage cette année en France pour une période d’au moins 15 jours jusqu’à une année. Pour le seul secteur éducatif, on compte annuellement 1 000 jours de séminaires [formation] en Algérie. Un expert reste 5 jours en moyenne. »

La coopération au service de la réforme des systèmes scolaire et universitaire
La réforme des programmes scolaires de français, mathématiques, biologie, chimie et physique a fait l’objet, durant les deux dernières années, d’actions de coopération entre l’expertise algérienne et française. Cette année, les opérations aideront aussi l’enseignement technique, précise l’attaché de coopération. En dehors de cela, une aide sera apportée dans le pilotage et la gestion du système éducatif. C’est-à-dire la manière de planifier les activités du système éducatif, notamment dans le programme général de formation, dans les programmes d’évaluation et d’orientation, ceux des technologies de l’éducation, ceux de la documentation pédagogique, etc. Dans le cadre de cette coopération éducative, il faut souligner la très bonne réactivité du ministère de l’Enseignement professionnel, de l’Université de la formation continue et des Ecoles normales supérieures.

En ce qui concerne la formation pour le français, et partant du fait que les bacheliers qui sortent du système éducatif normal n’ont pas le niveau nécessaire pour suivre les enseignements scientifiques universitaires en langue française, un énorme projet est en cours de réalisation depuis cette rentrée universitaire en faveur du développement du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Il s’agit de l’ouverture d’une école doctorale du français pour la formation de quelque 2 000 enseignants de français de l’enseignement supérieur. C’est-à-dire 2 000 docteurs. Ce projet de 6,5 millions d’euros sur le Fonds de solidarité prioritaire s’étend sur une période de quatre ans. Un autre projet visant la modernisation du cursus de formation des élèves professeurs de collèges et de lycées et qui sont actuellement formés dans les quatre Ecoles normales supérieures sises à Alger (Kouba et Bouzaréah), Constantine et Oran est aussi à l’étude dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme du système éducatif algérien. Alors qu’un travail tout aussi important que ceux susmentionnés se prépare actuellement pour le perfectionnement des 23 000 enseignants de français que compte le secteur de l’éducation nationale. En somme, grâce à la coopération bilatérale, et suite à la volonté affichée par le gouvernement algérien et le ministère de l’Enseignement supérieur, et celui de l’Education nationale en particulier, le français devra bénéficier d’une aide particulière pour que cette langue de travail soit mieux diffusée et mieux dispensée.

A souligner, par ailleurs, que les étudiants qui vont faire des études en France à titre personnel sont aussi considérés comme des acteurs du développement de l’Algérie grâce aux compétences acquises et que, à leur manière, ils font aussi de la coopération bilatérale.

Par Karima Mokrani, La Tribune