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Des médicaments “suspects” vendus en Algérie

mardi 23 novembre 2004, par Hassiba

Aux Etats-Unis, l’agence fédérale chargée d’autoriser la vente des médicaments, FDA, est accusée de complaisance avec les laboratoires pharmaceutiques américains qui commercialisent des médicaments à gros risques. Certains d’entre eux dont le « Servent » destiné aux asthmatiques sont vendus en Algérie.

Au département Redjimi, hermétiquement fermé aux journalistes, personne n’a eu écho de ce scandale qui secoue l’Amérique que la presse algérienne s’est fait le devoir de répercuter et qui, déjà, suscite l’inquiétude des citoyens.

Le 19 novembre dernier, le bureau APS de Washington rapportait qu’un responsable à la FDA « chargé d’évaluer la sécurité des médicaments, a affirmé qu’au moins cinq médicaments actuellement en vente posent des risques de crises cardiaques et de convulsions cérébrales ». Il s’agit de « Meridia » un médicament fabriqué par les laboratoires Abbot et destiné à l’amaigrissement, de Crestor un anti-cholestérol de Astra Zeneca Pharmaceuticals, d’un antiacné « Accutane » fait par les laboratoires Roche, de « Bextra » un anti-douleur de Pfizer et de « Servent » un médicament pour asthmatiques vendu en Algérie et dont le prix est fixé à plus de 2400 dinars.

L’appréhension du responsable de la FDA qui intervenait jeudi dernier devant la commission des finances du Sénat américain vient de la crainte de voir le scénario de la débâcle du « Vioxx », il avait causé entre 1999 et 2003, la mort de près de 28 mille personnes suite à des crises cardiaques - se répéter. Ce médicament fabriqué par Merck prescrit dans le traitement de l’arthrite a été retiré de la circulation en septembre dernier. Il avait causé 160 mille attaques cardiaques et convulsions cérébrales. La sonnette d’alarme tirée par ce responsable de la FDA, qui demande au président des Etats-Unis d’Amérique de relever de ses fonctions le directeur de la FDA, a amené le président de la commission sénatoriale américaine à proposer la création d’une commission chargée de vérifier les médicaments contrôlés par le FDA. Les recherches de ce même responsable ont permis à l’organisme américain de contrôle des médicaments de faire retirer du marché 12 médicaments. Sa sortie au Sénat est suivie de très près par l’Agence française de sécurité sanitaire qui appelle à la prudence.

En Algérie, les responsables de la santé publique n’ont pas l’air de s’inquiéter outre mesure de ce scandale qui vient secouer les USA et qui s’est répercuté sur la Bourse. Nous avons tenté en vain de contacter le ministère de la Santé pour savoir si le danger était réel et dans ce cas quelles précautions on doit prendre. Telle une balle, nous avons été renvoyés de service en service. Au laboratoire national du contrôle des produits pharmaceutiques, bien qu’on n’ait pas entendu parler du danger que pourraient susciter les médicaments en question, le ton se veut rassurant : « Il n’ y pas de raison de s’alarmer, nous n’avons pas été saisis officiellement par l’OMS, ni par l’organisme français de contrôle », nous a déclaré hier une pharmacienne, secrétaire générale par intérim du Laboratoire national. Une autre pharmacienne de cette institution qui dépend du ministère de la Santé déplore le manque de communication du département de Redjimi. « Ce sont des sujets très délicats qui doivent être portés à notre connaissance, ne serait-ce que pour information ». La même réflexion sera faite par le président de l’association des asthmatiques qui n’a pas caché son inquiétude. Le manque de communication du ministère de la Santé l’a poussé à saisir le président de la République. Notre virée chez les pharmaciens que l’on a interrogés sur le sujet a fait ressortir bien d’autres problèmes. Pour bon nombre d’entre eux, il ne sert à rien de retirer un produit du marché, si les médecins et les citoyens ne sont pas informés de son retrait. « Il y a quelques jours un médecin a prescrit à un malade du Vioxx. Alors ? » La question reste posée. Un autre pharmacien y répond différemment. Pour lui il faut un contrôle systématique des officines quand une décision de retirer un médicament est prise. « Bon nombre de confrères n’en ont cure et continuent de vendre jusqu’à épuisement du stock. C’était le cas l’an dernier pour le Collyres-Keratyl ». Le président du Syndicat national des pharmaciens, SNAPO, qui, lui aussi, dénonce le mutisme du ministère indique qu’en Algérie les inspecteurs pharmaciens se comptent sur les doigts d’une seule main. Tous s’accordent à dire que si le produit n’est pas retiré à la source, l’esprit mercantile l’emporte sur l’éthique. C’est là tout le drame du médicament en Algérie.

Par S.A., lesoirdalgerie.com