Accueil > ECONOMIE > Des entreprises étrangères pour le logement en Algérie
Des entreprises étrangères pour le logement en Algérie
mardi 26 octobre 2004, par
“Jamais l’Algérie n’a disposé d’autant d’atouts pour faire un taux de croissance plus rapide”, soutient M. Abdelatif Benachenhou, lors d’une rencontre sur le projet de loi de finances pour 2005, organisée dimanche dernier, par le Club Excellence Management, un forum regroupant des chefs d’entreprise algériens.
Comment transformer ces atouts en croissance effective ? Voilà la question qui interpelle aussi bien l’entreprise algérienne, publique et privée, que le gouvernement.
Le ministre des Finances est convaincu que la situation économique et financière de l’Algérie “est bonne et il y a de bonnes raisons de penser qu’elle le sera pour de nombreuses années”. L’argentier du pays s’appuie, dans son raisonnement, sur les déterminants de la croissance que sont les hydrocarbures, l’agriculture et le secteur de la construction dont la croissance est appelée à durer. Pour le professeur Benachenhou, la question décisive pour la croissance future est de transformer l’épargne (publique et privée) importante en investissement efficace. C’est le rôle de l’entreprise et non du gouvernement, explique le ministre aux hommes d’affaires venus nombreux à la rencontre. Le gouvernement, souligne M. Benachenhou, n’est qu’un facilitateur.
Trois facteurs
Un million de logements à construire est un engagement politique, souligne le ministre. 345 000 unités sont en chantier. Les clés du succès de la politique du logement, selon Benachenhou, sont la combinaison de trois facteurs : le foncier, les bonnes entreprises et le bon financement. Le foncier existe de l’avis de Benachenhou. Pour le financement, le ministre affirme que le budget de l’État sera sollicité uniquement pour le logement social. 100 milliards de dinars de fonds budgétaire sont consacrés chaque année pour financer le logement social et l’aide frontale apportée par l’État pour l’accession au logement. Les autres types de logement seront financés sur l’épargne privée. Selon le ministre, jamais la Cnep n’a eu autant de ressources pour financer le logement. Benachenhou a donné le montant de 450 milliards de dinars sur livret disponibles au niveau de cette banque, soit environ 6 milliards de dollars. “La Cnep doit revenir à son métier”, suggère le ministre. Mais pour lui, le financement n’est pas un facteur limitant de la politique du logement en Algérie. Les facteurs limitants, selon l’argentier du pays, sont les entreprises de réalisation. Le gouvernement, dit-il, “a délibérément pris la position de faire intervenir des opérateurs étrangers”. De grands constructeurs seront appelés à la rescousse. Les 105 entreprises publiques de construction existantes, affirme le ministre, ne sont pas outillées pour participer massivement au programme. Il évoque une ébauche de restructuration de ce secteur. Mais son souhait est de voir les entreprises algériennes se regrouper.
Assainissement des banques
Le bilan des six banques publiques est en croissance continue, souligne le ministre. Seulement, la rentabilité est faible, due à la politique d’approvisionnement massif. L’origine de cette politique d’approvisionnement est la mauvaise santé d’un certain nombre de leurs clients publics, mais aussi privés. Il faut donc traiter le portefeuille de banque en coupant le cordon ombilical qui lie les banques à leurs mauvais clients.
La budgétisation des déficits des entreprises publiques à partir de 2005 va dans cette direction. La politique d’assainissement jusqu’à 2001 a coûté au Trésor la bagatelle de 26 milliards de dollars. Cela n’a pas empêché le stock de se reconstituer. De 2001 à juin 2004, le ministre évoque 2 milliards de dollars de dette supplémentaire. Mais le ministre des Finances est convaincu que l’assainissement du portefeuille des banques n’implique pas nécessairement la modernisation des banques. Pour Benachenhou l’actionnariat unique ne permet pas la modernisation des banques. Au gouvernement de décider d’ouvrir ou pas le capital des banques. Concernant l’instruction d’Ouyahia intimant l’ordre aux entreprises publiques de déposer leur argent dans les banques publiques, le ministre des Finances en marge de la rencontre affirme que “l’instruction doit être certainement à réexaminer”.
Bureaux de change
La situation extérieure, note le ministre, est suffisamment bonne pour permettre un meilleur assouplissement du régime de change. Le ministre des Finances pense, en fait, à trois compartiments qui intéressent les entreprises. Sur l’importation de services, Abdelatif Benachenhou est conscient du fait que les entreprises se plaignent des lenteurs et de l’inadéquation des modalités d’accès à l’importation des services. Partageant le souci de ces entreprises, le ministre des Finances estime que l’économie moderne est une économie de services. Du coup, la Banque d’Algérie doit faire l’effort nécessaire pour rendre plus fluide l’accès à l’importation de services. “Ce n’est pas parce que nous avons eu un accident sur l’autoroute qu’il faut fermer l’autoroute”, ironise le ministre. Ce dernier évoque dans la foulée la possibilité de mise en place d’un marché à terme de la devise et de l’ouverture de bureaux de change. Mais pour l’exportation de capital, c’est-à-dire la convertibilité du compte capital, Benachenhou affirme que “nous n’avons pas les moyens”. Sonatrach, elle-même, est confrontée à ce problème, limitant sa capacité de financement de ses activités à l’étranger dans un contexte où la concurrence est rude.
Transport maritime privé
“Le gouvernement a entamé des discussions en vue de créer une société d’armement maritime à gestion privée, qui nous permettrait de capter de la valeur ajoutée”, annonce le ministre des Finances en faisant le constat de faiblesse de la flotte maritime. “Pour un pays qui importe 16 milliards de dollars de produit et qui ne transporte même pas 1,5 milliard de dollars, il y a problème”, constate le ministre pour qui “nous assistons, les bras croisés, au déclin de notre marine marchande”. La part du marché de la Cnan est tombée de 20% à 10%. Le gouvernement envisage aussi, semble-t-il, l’introduction de la gestion privée dans les ports algériens. Le ministre des Finances a rappelé que “le président de la République a dit officiellement que si nous devons trouver des gestionnaires privés des ports algériens nous le ferons”. De l’avis du ministre des Finances, les ports algériens sont des destinations coûteuses.
Le PDG du port ne partage pas ce constat. Lui qui a toujours prôné la nécessité de professionnaliser toute la chaîne portuaire souhaite voir le port bénéficier de projets d’infrastructures.
Repères
– Le démantèlement tarifaire va engendrer la disparition progressive de 145 milliards de dinars pour le Trésor public. Le ministre soutient que dans un premier temps, les entreprises tirent profit du démantèlement tarifaire, étant donné que les produits concernés seront des matières premières et des biens d’équipements.
– Les Algériens sont irrigués de subventions souligne le ministre. L’argentier du pays affirme que Sonatrach subventionne l’énergie à hauteur de 2 milliards de dollars. Les transferts sociaux sont estimés à 10 milliards de dollars.
– Les services de la dette publique coûtent à l’heure actuelle à la collectivité plus que l’addition des budgets des ministères de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Santé. Le ministre des Finances se préoccupe du remboursement de la dette la plus chère. “C’est ce que nous allons faire. C’est ce que nous continuerons à faire selon le rythme décidé par le premier magistrat du pays.
C’est à lui que revient la décision finale”, annonce le ministre des Finances.
– C’est le président de la République qui a décidé de supprimer du projet de loi de finances pour 2005 la proposition de faire payer par l’employeur 50% des allocations familiales.
Par Meziane Rabhi, Liberté