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Ce qui attend les Algériens avec Bouteflika

vendredi 9 avril 2004, par Hassiba

Des jours sombres attendent l’Algérie. Bouteflika l’a parfaitement expliqué durant les vingt et un jours de campagne électorale, ce pays sera forgé de la manière dont lui seul l’entend, à travers un projet de consolidation de la politique désastreuse mise en oeuvre depuis son arrivée au pouvoir en 1999.

Le président réélu a défini son projet durant sa tournée à travers de nombreuses wilayas. Un projet qui tient essentiellement en trois points contenus dans chaque discours prononcé lors des meetings qu’il a tenus : promotion de la concorde civile en réconciliation nationale, « épuration » du champ médiatique et enfin mettre un terme aux agissements des « extrémistes qui veulent imposer leur diktat ».

Le mouvement citoyen de Kabylie en l’occurrence, qui a fait échouer lamentablement sa visite éclair à Tizi Ouzou d’où il avait déjà été chassé à coups de pierres durant sa campagne électorale, il y a cinq années de cela.

Prudent, le président réélu ne s’est cependant pas exprimé sur le sort qu’il réserve à cette région, contrairement à celui qu’il réserve aux journalistes. Une corporation traitée de tous les noms et à laquelle il a promis publiquement un avenir des plus incertains. Bouteflika l’a déclaré à maintes reprises, il fera « la presse qu’il voudra » car celle qui est déjà en place « n’arrange pas les affaires du pays ». Relayé par le chef de l’exécutif et les imams, qui ont reçu l’ordre de fustiger les journalistes à travers de véritables appels au meurtre au cours des prêches de vendredi, il a nommément cité les cinq titres de la presse qui le dérangent, signifiant, d’autre part, la nécessité de leur disparition du champ médiatique pour le « bien de l’Algérie ». El Watan, El Khabar, Liberté, Le Matin et Le Soir d’Algérie, tel que les a cités Ouyahia durant le meeting qu’il a animé à El Khroub, ont été, tour à tour, accusés d’être à la solde « des ambassades et officines étrangères », de « harkis » et « d’impies qui ne croient ni en Dieu ni en son prophète ». Plus grave encore, les journalistes ont été carrément assimilés aux terroristes.

N’a-t-il pas déclaré à Constantine que « l’Algérie a vécu une guerre civile entre laïcs et démocrates qui utilisent des plumes empoisonnées, et des islamistes venus avec des traditions étrangères pour tuer violer et brûler » ? Une raison pour laquelle les journalistes seront « exclus de la réconciliation nationale », a-t-il ajouté une wilaya plus loin.

Les propos tenus durant son périple trahissent cependant une vérité incontournable : l’Algérie doit s’attendre à une régression notable des libertés durant les cinq années à venir. Les cinq titres ne sont que la partie visible de
l’iceberg si l’on tient compte de ses autres déclarations par lesquelles il apprend aux algériens de ne pas ouvrir le champ audiovisuel et politique. Ses récentes réponses aux questions qui lui ont été posées par le journal El Nasr sont éloquentes en la matière. « Le paysage actuel représente largement toutes les sensibilités », a-t-il fait savoir au sujet de la possibilité d’autoriser la création de nouveaux partis politiques. Cela, Bouteflika a évité de le déclarer publiquement dans ces meetings, tout comme son intention de modifier la Constitution en vue de consolider les pouvoirs présidentiels.

Quant au seul projet politique que Bouteflika projette de mener à présent, il se limite à la « promotion de la concorde civile en réconciliation nationale ». En d’autres termes, livrer le pays aux intégristes qui ont soutenu sa réélection.

Abla Chérif, le Matin